Votre avis sur Le Septieme Juré ?
4,0
Publiée le 19 juin 2013
Le film s'ouvre sur la séquence du meurtre, abrupte et sans finesse. Puis la conscience du meurtrier s'exprime en voix off, comme dans mille autres films. On craint alors le pire... Mais pas du tout. Le portrait du personnage joué par Blier s'affine petit à petit, et avec lui celui d'une bourgeoisie de province qui se complaît dans un quotidien routinier, "respectable", où tout n'est qu'apparence. À cause de cet assassinat, M. Duval sort de lui-même et du monde dans lequel il vit. Avec cynisme, il se contemple : aigre, "vacciné contre le bonheur", frustré d'amour, plongé dans le formol. Il a tué la jeune femme parce qu'il la trouvait "trop jolie, trop libre, trop facile ; elle riait tout le temps"... C'est en quelque sorte la vengeance inconsciente d'un homme devenu vieux sans avoir eu le temps d'être jeune. La scène où Duval raconte à son fils un coup de foudre de jeunesse, amour manqué, suivi d'un mariage "de raison", est très touchante. Et la discussion "humaniste" avec le personnage interprété par Maurice Biraud (très bien) est d'une belle subtilité. En fait, plus le film avance, plus le ton est grave et désabusé. On assiste à une charge cinglante contre une société prison, hypocrite, d'une violence feutrée. Le personnage le plus terrible est sans aucun doute celui de l'épouse de Duval, incarnation de la "sauvagerie des honnêtes gens".
Peu connu, ce Septième Juré est donc un très bon Lautner, très noir (aux antipodes des comédies qui l'ont rendu célèbre, comme Les Tontons flingueurs). Une réussite qui doit beaucoup aux excellents dialogues de Pierre Laroche et à la performance de Bernard Blier. Ce "drame bourgeois" pourrait être la matrice de tout le cinéma de Claude Chabrol.
5,0
Publiée le 2 septembre 2011
Oh la la c'est énorme. Je n'avais pas encore vu ce Lautner et c'est un vrai must. Les acteurs et notamment Blier sont magistraux, les plans de caméra sont extraordinaires, l'histoire parfaite et tellement banale que Lautner en fait une véritable perle. Un pur chef-d'oeuvre!!! Blier nous manque...
5,0
Publiée le 19 janvier 2010
Un des meilleurs de Lautner qui amènent ses acteurs à leur meilleur niveau. Blier démontre ici tout son immense talent. A noter son fils comme assistant réalisateur.
anonyme
Un visiteur
5,0
Publiée le 31 août 2008
Plutôt méconnu comme film, pourtant c'est vraiment du bon cinéma, un scénario très intelligent et engagé, une belle réalisation qui n'a pas vieilli et des acteurs géniaux particulièrement Blier, francis Blanche en procureur cynique vaut aussi le coup d'oeil.
A voir
anonyme
Un visiteur
5,0
Publiée le 5 mai 2008
Coup de pied dans l'ordre établi, le film de Georges Lautner est une critique acerbe de la bourgeoisie et de ses passe-droits, des préjugés et des faux-semblants qui caractérisent notre société. Grinçant et résolument moderne, d'un cynisme renversant.
4,5
Publiée le 2 décembre 2013
Très bon film de Lautner plutôt connu pour ses comédies qui font référence. Or ici nous avons le plaisir de découvrir un film noir de belle facture qui vaut bien des Chabrol. En plus d’un Bernard Blier magistral, très fin et très humain, on retrouve Maurice Biraud en humaniste, Danièle Delorme, belle et msytérieuse, et tant d’autres ! L’histoire est bien menée, le montage intelligent et les plans, en noir et blanc, superbes et très travaillés. De « la belle ouvrage » qui n’a pas vieilli, qui est inédit pour beaucoup et qui méritait une rediffusion.
4,0
Publiée le 12 février 2009
Un des meilleurs films de Georges Lautner et certainement sa réalisation la plus originale. L'idée de départ est excellente et très bien exploitée, le casting du film lui aussi est très brillant en particulier Bernard Blier (qui en a jamais marre d'être génial !), Danièle Delorme et Maurice Ronet. Un film qui prouve que Georges Lautner peut être aussi parfois un très bon réalisateur de film dramatique.
3,5
Publiée le 26 avril 2016
Le seul autre film que j'ai vu de Lautner c'était les tontons flingueurs que j'avais détesté, donc forcément ça ne me donnait pas spécialement envie de voir ce septième juré dont je ne savais rien, si ce n'est, vu le titre, qu'il allait y avoir une histoire de procès et j'adore les procès...

Ce que j'aime dans ce genre de film c'est d'être surpris, de voir comment est-ce-que l'on va me raconter une histoire et réussir à me surprendre malgré tout, tout en proposant, je l'espère des joutes verbales de hautes volées en huis clos. Et là le traitement est absolument génial, si le concept de départ est un peu tiré par les cheveux, l'assassin qui est dans le jury du procès qui juge un innocent pour le crime qu'il a commis, la tournure que ça prend rend le tout vraiment intéressant.

Déjà parce qu'une fois le meurtre commis on a une vraie réflexion sur la culpabilité, sur ce que ça fait de tuer un homme, comment même si on n'est pas accusé, on continue à vivre, si on peut encore dormir... et la narration par le personnage principal renforce ce questionnement parce que je me suis vraiment mis à sa place et à travers cette identification je me posé la question de comment j'arriverai à vivre avec un meurtre sur la conscience. J'en ai déduis que c'était comme tout, on finit par oublier, par ne plus se réveiller la nuit et continuer sa vie en y repensant de temps en temps avant de passer à autre chose. Mais faire se poser cette question c'est assez intéressant d'autant plus que là, étant donné que le type n'est pas un malade mental ou un psychopathe on peut vraiment s'identifier à lui, comprendre pourquoi il a tué, on voit que ce n'est pas quelqu'un de profondément malsain mais que c'est juste un homme.

J'aime aussi cette façon qu'il a de tenter de faire récuser au procès... L'ambition de sa femme... son attitude au procès...

Et même la fin... spoiler: La fin qui rajoute quelque chose sur la culpabilité dans cette situation il faut bien le dire assez spéciale où l'on paraît absolument innocent.


En somme ce n'est pas un film qui va surprendre dans son déroulé, les étapes sont connues, voire même assez mécaniques, mais c'est les réflexions qu'elles apportent qui sont intéressantes, comment en détournant légèrement les codes on peut parler de l'humain et de ses faiblesses.

Après j'ai pas adoré non plus, malgré une restauration rendant hommage à un très beau noir et blanc, parce que j'ai trouvé ça un peu lent à se mettre en place et que finalement puisque le film s'ouvre sur le meurtre, on sait qui est le tueur, ce qui rend forcément l'issue du procès assez certaine et donc j'ai cette impression qui dit des banalités, qu'on le sait déjà ça et que malheureusement pour moi qui aime les procès et bien ce n'était limite pas indispensable de s'attarder réellement dessus. D'autant plus que finalement il n'y a pas cette jouissance que l'on peut avoir dans d'autres films au niveau du verbe (bien que ça ne soit pas le sujet non plus ici). Donc si j'aurai un défaut à formuler c'est que le film est peut-être un peu trop redondant et qu'on aurait pu éventuellement le recentrer d'avantage afin qu'il soit plus dense.
4,0
Publiée le 8 juin 2017
Un vieux film en noir et blanc, avec une bonne réputation malgré son côté méconnu, trop d’après les critiques.
On est vite dans le vif du sujet : une folie passagère accompagnée d’un beau morceau de musique classique (et de femme). Une ambiance sombre et taciturne, des contreplongées bien utilisées, des monologues intérieurs intéressants qui montrent un Blier à contre-emploi, surtout si on est habitué à le voir dans du Audiard, sa réserve et sa bonhommie convenant tout à fait ici. Les dialogues ne sont pas du même genre mais ils sont du même niveau. C’est certes bavard mais la justification du crime par son coupable donne matière à réflexion, sans expliquer ou excuser quoi que ce soit, et on suit un déroulement logique menant de sa déresponsabilisation à ses remords. Puis ça dévie vers une critique cynique de la société, de la justice, de la foi, de la renommée, de la réputation bourgeoise, les convenances, du couple, des autres, de la vie des petits villages de province avec ses bouseux et ses conversations de bar, mais avec justesse et des enchaînements bienvenus. Assez complet en somme, surtout que c’est bien joué, de la part de tous, leurs regards suffisant parfois à comprendre les intentions, que l’histoire est bonne, la trame pas si classique, le scénario bien monté et le rythme se tient sans trop de longueurs.
Pas comparable à 12 hommes en colère malgré le thème et le retournement de situation (ainsi que des preuves), un peu moins bon mais sans plus, trop sobre peut être. Néanmoins c’est un film atypique qui m’a surpris, méconnu sans raison, qui joue juste un thème trop rare. Parfois on se demande pourquoi certains remakes, d’autres fois c’est pourquoi il n’y en a pas.
4,5
Publiée le 10 janvier 2016
G. Lautner n'est pas qu'un réalisateur de comédies populaires et B. Blier n'a pas toujours été un acteur comique. Non, et ce film en est une des preuves les plus éclatantes. Le sens visuel du cinéaste explose à chaque cadre tandis qu'il propose une mise en scène aboutie, pétri d'idées et qui n'hésite jamais à désarçonner le spectateur. Il propose surtout une peinture acide, d'une grande violence philosophique, contre la petite bourgeoisie, engoncée dans ces certitudes, ses idéologies rétrogrades et ses envies conformistes. Le scénario est assez original, dans le sens où il nous immerge directement dans la tête de son protagoniste, nous faisant partager ses pensées et nous montrant son acte meurtrier inaugural sans en masquer son horreur. La suite est remarquable, jouant admirablement sur les codes du film judiciaire, renversant les codes de ce dernier et proposant quelques scènes de haute volée. Un film audacieux, noir, désespéré presque, parfois drôle via quelques saillies savoureuses (M. Biraud est formidable) et qui bouscule le confort du spectateur. Une grande claque. D'autres critiques sur
anonyme
Un visiteur
4,5
Publiée le 29 novembre 2013
J'ai été trés surpris par la qualité de ce film, qui m'a fait penser au Corbeau et aussi à Garde à vue.
Deux mondes se cotoyent : un monde d'ordre et un monde de fantaisie et d'instinct. Malheur à celui qui ne choisit pas clairement l'un ou l'autre.
Bernard Blier est exceptionnel d'humanité mais les seconds rôles comme Maurice Biraud et Francis Blanche sont aussi remarquables.
Aucune fausse note dans ce film remarquable à tous points de vue.
3,0
Publiée le 26 juin 2011
Un film efficace avec des acteurs hors pair, un bon moment.
anonyme
Un visiteur
4,0
Publiée le 14 juillet 2010
Deux choses intéressantes hormis cette série noire cousue du fil jubilatoire du jeu des acteurs, la caméra de Lautner film l’envers du décors autour de deux scènes explicatives. Le cadavre de la jeune fille paraît sous les traits d’une frayeur horrifiante lorsqu’il est filmé au raz du sol, des pieds vers la tête pour tout en haut saisir un visage en grimace tandis que lorsque l’assassin s’enfuit et qu’il se retourne pour jeter un dernier coup d’œil sur son méfait, le visage de la très belle jette un sourire presque moqueur, annonce souriante de la suite d’un scénario tiré à quatre épingles entre la vindicte d’une société pudibonde et bourgeoise de notables et de commerçants.
Et puis pour finir très cinématographiquement, il y a cette caméra de Lautner qui tout simplement placée une fois du côté gauche de l’acteur, puis de l’autre permet à celui-ci de se rencontrer dans son dédoublement dans une marche accélérée où deux personnages (finalement qui sont les mêmes) pourraient bien se croiser tout comme le coupable croise vérité et mensonges…
4,0
Publiée le 15 octobre 2016
Incroyable film d'un procès qui va titiller la société bourgeoise et sa fatuité, les interprètes sont excellents.
4,0
Publiée le 1 octobre 2016
Un film français oublié à découvrir impérativement pour sa satire sociale chabrolienne, sa réhabilitation d’un Lautner que l’on cantonne trop souvent aux films de Bébel et aux « Tontons flingueurs » et son rythme d’une modernité rare pour l’époque. Juste un bémol, le final force légèrement le trait sur ce qui apparait comme un procès à charge.
Une fois n’est pas coutume, j’ai lu une très belle critique d’un dénommé Jean-Paul sur DVD Classik qui est d’une précision et d’une justesse que je ne pourrais reproduire… Alors je le nomme :
« Alors qu'il s'apprête à réaliser Le 7ème juré, Georges Lautner n'est pas encore le réalisateur des Tontons flingueurs, des comédies signées Francis Veber ou des films avec Jean-Paul Belmondo. Il est encore un cinéaste méconnu, qui vient de tourner ses cinq premiers films. Entre autres deux films forts et marquants, même s'ils restent des titres oubliés de sa filmographie, Marche ou crève et Arrêtez les tambours, tous deux portés par le talent de Bernard Blier, puis Le Monocle noir, premier titre de la série qui lancera réellement sa carrière. De nos jours, Lautner est trop souvent considéré comme un petit artisan du cinéma français, metteur en scène sans grande personnalité d'un Belmondo ronronnant ou de comédies balourdes. Un statut qui nous semble fort réducteur, et qui est sans doute dû aux œuvres plus poussives de la dernière partie de sa carrière qui ont fait oublier l'audace visuelle et la maîtrise du rythme que Lautner sut nous offrir dans la plupart de ses œuvres précédentes. Même alors qu'il était déjà un cinéaste installé, il y avait toujours dans ses films un grain de folie, un côté rebelle qui font la "patte Georges Lautner" et le distinguent à nos yeux de la masse des réalisateurs populaires. En découvrant ses premières œuvres, ces particularités se font peut-être plus évidentes. Dans un registre encore éloigné de la comédie, même si le rire est toujours présent au détour d'une réplique, Lautner propose des films socialement engagés, au ton particulièrement tranchant et parsemés d'idées visuelles surprenantes. Le 7ème juré en est une illustration parfaite, en plus d'être un film absolument passionnant, et se distingue comme l'une des réussites majeures de son auteur.

Dans la genèse de ce film, il faut en premier lieu souligner le poids de Bernard Blier. Tout au long de sa carrière, l'acteur sut jouer de sa popularité pour apporter son soutien à de jeunes réalisateurs. Ce fut le cas avec Georges Lautner, à qui il permit de monter Marche ou crève sur son nom. Il lui reste fidèle sur ses films suivants, et c'est lui qui insiste auprès du cinéaste pour qu'il tourne Le 7ème juré, un sujet parfait pour ses talents d'acteur et pour ceux de son ami réalisateur. L'histoire nous plonge dans une petite ville de province, Pontarlier, secouée par le meurtre d'une jeune fille aux mœurs légères. L'auteur du crime, le pharmacien Grégoire Duval, respecté dans sa ville, n'est pas inquiété. C'est Sylvain Sautral, petit ami de la victime et lui aussi considéré comme marginal, que les circonstances désignent comme le coupable idéal. Lors du procès, Duval est désigné comme juré et va faire son maximum pour ne pas voir un innocent condamné à sa place. Un sujet qui mêle donc à la fois drame judiciaire et analyse sociale de la petite bourgeoisie provinciale, à mi-chemin entre les sujets de prédilection d'un André Cayatte et l'ambiance propre au cinéma de Claude Chabrol. D'ailleurs, à la simple lecture de l'histoire, on pourrait voir un scénario typique des drames judiciaires tournés par le réalisateur de Nous sommes tous des assassins. Et force est de constater que dans ce domaine, Lautner montre à quel point il est un metteur en scène plus habile que Cayatte. Les séances de prétoire, qui peuvent vite devenir ennuyeuses au cinéma, ont devant sa caméra une force et un impact presque inégalés. Et, alors que le procès occupe près de la moitié du film, il semble se dérouler en un éclair grâce au rythme insufflé par le metteur en scène, caractéristique bien trop souvent absente dans l'œuvre de Cayatte. Finalement, le parallèle qui pourrait être fait avec le cinéma de Chabrol serait plus pertinent, tant Le 7ème juré, bien plus qu'un film de procès, est une véritable charge sociale, même si le ton de Lautner se fait probablement plus virulent, plus mordant, que dans la moyenne des œuvres chabroliennes.

Dès l'ouverture, Lautner semble d'ailleurs refuser d'inscrire son film dans un simple contexte policier. L'introduction, qui nous montre le meurtre commis par Duval, se fait sur un ton étrange, presque onirique, comme si l'action se déroulait dans un rêve. Le réalisateur joue avec la lumière, qui filtre dans la végétation, use de fortes contre-plongées et d'un montage rapide pour nous montrer que Duval n'est pas dans son état normal, mais aussi pour illustrer le profond basculement psychologique que son acte va engendrer. Cette entrée en matière frappante, visuellement très travaillée, est la mise en évidence immédiate du talent de Lautner. Une introduction plutôt audacieuse si l'on se réfère au cinéma français traditionnel, tout autant par la mise en scène que par le choix, plus anecdotique, de monter la victime nue à l'écran, qui situe immédiatement Le 7ème Juré comme un film atypique. A l'issue de cette scène, plutôt que de voir se dérouler simplement l'enquête, nous assistons pendant quelques minutes à une forme d'introspection chez Grégoire Duval. Le crime crée chez lui un bouleversement, qui n'est pas, dans un premier temps de la culpabilité, mais une prise de conscience de l'hypocrisie dans laquelle il vit. En voix off, il commente les images de sa vie. Ses habitudes, son quotidien, sa famille deviennent l'illustration du carcan dans lequel son existence s'est déroulée, par opposition à la liberté qu'incarnait sa victime. Alors que depuis des années cet homme semblait ne s'être posé aucune question sur sa situation sociale, son acte monstrueux lui ouvre les yeux sur ce qu'il est vraiment, et sur les échecs de sa vie : un mariage sans passion et des relations ternes avec des petits bourgeois uniquement préoccupés par leur tranquillité. C'est cette prise de conscience, et non le meurtre en lui-même, qui change le personnage. Sa désignation en tant que juré va lui donner l'occasion de s'opposer à la société à laquelle il appartenait jusqu'alors et, d'une certaine manière, de se venger de sa propre vie.

Ainsi, plutôt que de s'engager dans une narration routinière, qui aurait simplement suivi un processus judiciaire, Lautner nous propose une plongée dans l'âme du tueur pour mieux déplacer son propos sur un terrain plus large, celui du libre arbitre, de la liberté et de la charge envers les institutions morales. C'est une position que conserve Lautner dans la longue séquence du procès, qui se centre de plus en plus sur le personnage de Duval. Blier occupe l'écran et transforme son personnage, le septième juré du titre, en acteur central d'un événement codifié, dont il ne devrait être qu'un témoin privilégié. C'est à la fois une démarche qui permet au personnage d'exorciser son crime et à Lautner, dans sa position de réalisateur, de proposer une forme de subversion de l'institution judiciaire puisque les protagonistes habituels d'un procès se trouvent peu à peu réduits au rôle de spectateurs. Ce procès, cœur du film, constitue une séquence mémorable par son écriture, et notamment les échanges entre Bernard Blier et Francis Blanche, remarquable en procureur, par son rythme, mais aussi par sa portée symbolique. Et ce n'est qu'un début, carLe 7ème juré prend une nouvelle dimension à l'issue de ce procès. Alors que les notables de Pontarlier n'acceptent pas le verdict qui innocente un homme coupable de ne pas leur ressembler, Duval se voit accusé non pas du meurtre qu'il a réellement commis mais d'avoir trahi les siens en prenant ostensiblement la défense de Sautral. Ultime illustration de cette société qui marche sur la tête, on lui rit même au nez lorsqu'il passe aux aveux, démonstration finale de la décadence que filme Lautner puisque nous savons, en tant que spectateurs, que Duval dit vrai.

Cette peinture sociale, c'est évidemment l'occasion pour Lautner de nous offrir une réjouissante galerie de personnages plus veules les uns que les autres, un exercice dans lequel il excelle. On les retrouve dans l'atmosphère rance d'un vieux café qui semble héberger leurs parties de bridge depuis une éternité et qui contraste avec la boîte de nuit dans laquelle sortaient la victime, l'accusé et les jeunes de la ville, baignée dans une sonorité jazzy bien plus moderne. Une atmosphère que réutilisera Lautner dans beaucoup de ses films et qui ne laisse aucun doute sur sa préférence, et donc sur le jugement qu'il porte sur ses personnages. Il sauve toutefois un des notables, d'ailleurs il s'agit de celui qui fréquente les deux lieux, celui du vétérinaire. Impeccablement interprété par cet indispensable second rôle du cinéma français qu'est Maurice Biraud, celui-ci tient un discours radicalement opposé à celui de ses congénères. Presque excessif, mais lucide à la vue des éléments qui nous sont proposés, il condamne l'ensemble de la bonne société, la jugeant coupable, dans son ensemble, du crime commis par Duval - dont il semble d'ailleurs deviner la culpabilité. Il ne fait que peu de doutes que ce personnage est le porte-parole du réalisateur dans le film, Lautner lui laissant régulièrement le dernier mot et nous montrant des faits qui lui donnent raison.

Le 7ème juré est un film profondément sombre, au message particulièrement pessimiste - le final édifiant renforcera ce sentiment - qui semble trancher particulièrement avec les œuvres les plus connues de son réalisateur. L'atmosphère est oppressante, grâce à une esthétique travaillée pour laquelle il faut saluer le travail du fidèle chef opérateur de Lautner, Maurice Fellous, qui crée une véritable ambiance de film noir, mais aussi grâce à une utilisation particulièrement pertinente du son avec ces bruits qui se détachent, notamment celui des cloches que Duval se remet à entendre après son crime, symbole de son réveil. Le propos, lourd, est la condamnation sans appel d'une société sclérosée, et l'on pourrait d'ailleurs presque faire à Georges Lautner le reproche de mener un procès exclusivement à charge, le problème récurrent des films à thèse, si la démonstration n'était pas si fluide, si élégante et si brillamment portée par un casting d'exception. Toutefois, on ne se refait pas, on décèle quelques touches de l'humour décalé typique de la suite de son œuvre, comme lors de la reconstitution de la découverte du corps lorsque le témoin, une vieille fille typiquement Lautnerienne, s'enfuit de peur de manière quasi burlesque. Le mélange entre comique et réalisme est la véritable marque de Georges Lautner, quel qu'en soit le dosage. Le 7ème juré s'impose comme sa face la plus noire, la plus frappante aussi car plus engagé qu'à l'accoutumée, mais on pourrait retrouver, de manière plus ou moins affirmée, cette critique sociale dans nombre de ses œuvres. Les qualités visuelles, rythmiques et narratives qui ont fait ses grands succès sont, elles, communes à tous ses films, et ce sont elles qui font du 7ème juré une réussite formidable qui trône très haut dans une filmographie qui mérite d'être redécouverte. »
Un film donc à voir impérativement… Merci à Arte pour sa programmation hors sentiers battus et valorisant le patrimoine culturel.
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