Si j’étais un espion est donc le premier film de Bertrand Blier, du moins son premier de fiction. Un film dont je conviens qu’il n’est pas fort niveau rythme, mais qui sait rester accrocheur, jusqu’à son final un peu faible.
Si j’étais un espion n’est en effet pas un film d’action, c’est surtout une confrontation entre deux acteurs, Bruno Cremer et Bernard Blier, qui livrent tous deux de solides prestations. Blier est spécialement bon ici, héritant en plus d’un personnage ambigu et mystérieux, et qui saura le rester jusqu’à la fin. Convaincant lui aussi, Cremer me fait encore une fois belle impression dans un rôle froid et mutique qui est assez caractéristique de ses rôles au cinéma. Suzanne Flon livre aussi une prestation fort honorable. Patricia Scott, méconnue et qui ne fera guère carrière ne se débrouille pas mal, sans enthousiasmer outre mesure dans un rôle somme toute de convention.
Le scénario a cette intelligence de compenser le manque d’action par un suspens solidement entretenu. Difficile ainsi de ne pas être pris de doutes sur l’identité réelle de Bernard Blier, sur son rôle, et pour tout dire cela rend la partie centrale du métrage tout à fait accrocheuse, après une surprenante première partie qui frôle presque le fantastique ! Efficace, Si j’étais un espion aurait certes pu avoir un poil plus de punch, notamment sur la fin, mais le résultat est un film d’espionnage intelligent, et j’en viens presque à être déçu que Blier n’ait pas poursuivi un peu plus dans ce registre.
Visuellement j’ai aimé la mise en scène rythmée, cassante, avec des ruptures de plans assez abruptes, ce dont on se rend aisément compte dans la première partie surtout. Blier donne un peu de nervosité avec cette mise en scène, et il y a de superbes scènes, notamment toute l’ouverture du métrage plutôt angoissante. Le film ensuite devient plus classique à mon sens, mais il y a un réel sens de l’image, une ambiance travaillée, et la bande son de Gainsbourg, très reconnaissable d’ailleurs, est un atout de plus non négligeable.
En clair, Si j’étais un espion est un Blier qui s’inscrit peu dans le style du réalisateur, mais qui s’avère un film d’espionnage de facture solide, et qui m’a accroché en dépit de son manque d’action. Je donne 3.5