L’immense Jean Renoir finit sa carrière par un film à sketch plutôt mitigé. Heureusement le dernier, libertaire et amoral, renoue par instant avec l’œuvre glorieuse du réalisateur. Filmé en décors naturels, rempli de bonheur et de gaité, porté par une belle musique, « Le roi d’Yvetot » nous offre un excellent numéro du trio d’acteur central. Fernand Sardou et Jean Carmet, encadrant la charmante Françoise Arnoul, lumineuse et harmonieuse. Les seconds rôles sont également épatants avec une mention pour Dominique Labourier et Edmond Ardisson. Les autres sketchs, réalisés en studio, se composent du « Dernier réveillon », un joli conte, mais en toc, avant de se perdre dans « La cireuse électrique » mixage hasardeux d’un Tati mal compris et d’un Demy au talent qui se serait noyé dans la laideur, où vacherie, balourdise, mufflerie et cruauté se sont substitués à la finesse et l’ironie. Pour être complet, Jeanne Moreau chante « Quand l’amour meurt » avec un filet de voix et un statisme que n’auraient pas reniés certaines de chanteuses de variété française. Quant à la partition musicale, les premiers et derniers sketchs sont de Wiener (plutôt bonne), « La cireuse électrique » est de Joseph Kosma, aussi médiocre et saugrenue qu’à l’habitude. Pour Rohmer « Le petit théâtre de Jean Renoir » est le meilleur film du monde. Ouais… on comprend mieux pourquoi son cinéma peine à être ne serait-ce que moyen !