Au début, y'a Paris. Ville lumière à la tombée de la nuit, illuminations, vitrines décorées, grand sapin. Dans les rues, des citoyens déguisés en papa au manteau rouge, distribution de chocolat, photo avec les enfants...Puis, plus loin, un autre. Il a la moustache sombre, le crâne dégarni, il parle comme un charretier, donne des claques aux bambins. Sur son panier est accroché un panneau, pub pour une boite un peu spécial, mais bon : c'est Noël, alors...Son périple continue, donc, à travers Paris, belle Paris, dans un supermarché, où il s'empare d'une chose longue et molle, avant de rejoindre sa hotte près du périph', pleins de jolies cadeaux : petits lapins courant de partout, et le caddie de Zézette, qu'on connaît. Dix minutes, bien moins peut-être, dix minutes où le mythe de Noël est déjà déglingué, zigouillé, explosé, puis enterré. Et puis quel titre ! Ca aurait pu pousser au scandale publicitaire : se balader dans la ville, en famille, sourire au lèvres, après avoir contemplé le sapin sur la place, puis voir ce gros titre mis en gras affiché sur un arrêt de bus, ça irrite. Noël, on n'y touche pas. Et pis c'est tout. De la bien-pensance, de la gaieté qu'inspire Noël, le film s'en amuse. Tout ce qui pourrait choquer gît à l'intérieur. Mais c'est un film que l'on à plus honte d'aimer. Devenu classique pour tous, cette petite pépite de cruauté moult fois rediffusée, résiste à l'oubli : des dîners entre amis finissant en récitations de toutes les meilleurs répliques du film, on n'en a vu passer. Des fous rires personnels au souvenir de l'image de Pierre imprégné dans le canapé, il y en a sûrement eu. Intelligemment, écrit, interprété et sobrement filmé, le film se construit en deux parties. Au début, humour glacé, grinçant, sophistiqué et absurde, à la fin, situations grotesque et grivoiserie. Ici, la vulgarité est enrobée d'un mince filet d'or, la cruauté se mélange à la tendresse. D'un côté, les coincés, de l'autre, les paumés. Et bien sûr ; pas un pour rattraper l'autre. Mesquinerie, hypocrisie, indifférence : les coincés son gâtés. Les autres ne sont pas mal non plus : ici, la pauvreté n'enjolive pas l'esprit, elle le détruit, sans pitié, sans compassion : elle enterre l'homme et ses valeurs. Il n'y a aucun pathos, aucune intervention de l'émotion : il y a le pathétique, pour tout les hommes, ces bofs filmés comme des affreux imbéciles, mais derrière tout cela, la présence d'un cœur. Le père noël est une ordure juge la connerie humaine, ses affreuses moeurs bien pensantes des années 80, mais ne critique pas son fond : personne n'est bon, personne n'est mauvais. Mais vulgaire et idiot. La peinture est cruelle, sombre et glauque. Ca commence doucement, tout en retenue, avec Pierre, sa collègue Thérèse, et Mme. Musquin, effectivement très gentille, même si on aime pas dire du mal des gens...C'est grinçant, pince-sans-rire, très "caustique" : bref, on se régale. Puis après...Les situations propres au mauvais goût s'alignent sans temps mort : et ça se tire dessus, et ça se donne des coups de pieds, des coups de chaises, des coups de feu, et ça s'insulte, ça se tape, ça se crache à la gueule...Et puis, qu'est-ce que c'est con, mais qu'est-ce que c'est con, mais qu'est-ce que c'est con, se dit-on...Et on rit de plus en plus. Magique. 17/20.