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Plume231
3 872 abonnés
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4,0
Publiée le 5 mai 2012
Une dose de néoréalisme italien du côté de la mise en scène, un peu de dostoïevskisme pour la confrontation face à l'inévitable mort et une grosse poignée de Gogol pour la description sarcastique des fonctionnaires ; voilà les ingrédients avec lesquels le géant Kurosawa fait un grand film. Si on oublie quelques longueurs dans la seconde moitié, "Vivre" est un portrait d'homme très émouvant magnifiquement incarné par Takashi Shimura. Le réalisateur est comme à son habitude très pessimiste sur l'homme en général mais réussit à insuffler une touche d'optimisme sur ce tableau très noir montrant que celui-ci dans certaines circonstances est capable de se dépasser.
"Vivre", très long film d'Akira Kurosawa s'insurge contre le conservatisme de la société japonaise minée par un enchevêtrement administratif digne de l'univers « orwelien » du truculent "Brazil" de Terry GiIliam (1985). Le réalisateur, encore dans la première partie de sa carrière, a été frappé par l'arrivée du néo-réalisme italien et plus particulièrement par un de ses chefs de file Vittorio de Sica. C'est donc en s'inspirant de ce courant qu'il entreprend le tournage de "Vivre". Curieux hasard, au même moment de Sica réalise "Umberto D", film au thème approchant. Quand il prend conscience de l'issue fatale et proche de son cancer gastrique, Kenji Watanabe (Takashi Shimura) constate amèrement la vacuité de sa vie de bureaucrate passée à tamponner des formulaires transitant sur son bureau avant d'aller se perdre dans les méandres de l'administration japonaise. Surnommé la "momie" par ses collègues de travail, Kenji s'est progressivement oublié au profit de l'éducation de son fils depuis la mort prématurée de sa femme vingt ans plus tôt. Un fils qui ne lui a pas rendu l'amour reçu et qui aujourd'hui ne pense qu'aux économies de son père. spoiler: C’est donc dans la recherche frénétique du plaisir qu’il n’a jamais réellement connu qu’il va dans un premier temps, tenter de dépasser l’angoisse qui l’envahit. La rencontre d’un écrivain raté va lui ouvrir les secrets du Tokyo nocturne mais Kenji comprend vite que cet univers n’est pas le sien. La question lancinante de l’attitude à adopter face à sa mort prochaine reste donc sans réponse pour Kenji. C’est grâce à une jeune collègue de travail retrouvée par hasard qu’il va avoir l’illumination salvatrice. Puisqu’il lui est impossible de se projeter dans l’avenir, le don de soi-même aux autres lui semble soudainement la meilleure façon d’oublier l’issue fatale tout en inscrivant son action dans la postérité . Lui le fonctionnaire sans âme va mettre l’énergie qui lui reste pour vaincre l’immobilisme de l’administration et œuvrer à l’édification d’un parc pour enfants dans un quartier déshérité. Le thème choisi par Kurosawa est sans aucun doute déchirant et nous interroge sur notre rapport aux autres mais pour une fois le réalisateur fait preuve d’une lourdeur qui détruit en partie la force initiale de son propos. La longueur du film n’est justifiée que par l’appesantissement du récit sur certaines parties qui auraient mérité un traitement plus concis comme la déambulation en compagnie de l’écrivain ou la narration en flashbacks répétitifs par ses anciens collègues du long combat de Kenji pour franchir les obstacles administratifs cherchant chacun à récupérer un peu de son action devenue glorieuse après sa mort. En revanche l’épisode de l’illumination tombe comme un cheveu sur la soupe et parait assez peu crédible. Takashi Shimura acteur fétiche de Kurosawa d'habitude si sobre, semble comme son réalisateur s’être englué dans l’emphase, en faisant des tonnes pour rendre la fragilité physique grandissante de son personnage. Kurosawa dénonce de manière très juste la bureaucratie paralysante de son pays via une question existentielle majeure mais sa réalisation d’habitude si juste et alerte semble avoir paradoxalement été frappée du même mal. Pour l’hommage au néo-réalisme italien c’est raté, si l’on compare « Umberto D », le chef d’œuvre de De Sica, avec cette production un peu trop lourde pour être vraiment réaliste. Certains comme Jean Douchet classent « Vivre » parmi les films majeurs du maitre. Revoir « L’ange ivre » (1948) « Chien enragé » (1949) ou « les salauds dorment en paix » (1960) les ferait peut-être changer d’avis.
Parmi les films de Kurosawa, "Vivre" possède une réputation des plus favorables, certainement liée à sa dimension humaniste et mélodramatique. Or, c'est sur ce point que le film déçoit dans sa première partie, trop larmoyante et sans densité. Pendant une bonne heure, on assiste à un Kurosawa en mode mineur, qui suit certes avec sensibilité mais aussi sans nuances le désespoir d'un homme condamné, qui se demande ce qu'il va pouvoir faire pour sauver sa vie. Watanabe (Takashi Shimura) se raccroche à une jeune fille pour tenter in extremis de vivre et cherche un moyen de réaliser une action louable. C'est dans son second mouvement que le film trouve son envol, dramatique et politique, qu'il trouve une subtilité et une acidité incarnées par la précision des cadrages, l'intelligence des dialogues et la pertinence d'une construction en flashbacks qui relate par bribes la démarche de Watanabe, celle de construire un parc pour enfants sur un terrain détruit. En confrontant le présent (les administrateurs qui débattent lors de la veillée funèbre) et le passé (l'avancée du projet), Kurosawa ne minimise pas l'obstination et le courage de Watanable, décidé à construire ce parc, mais n'oublie pas non plus que la concrétisation de ce projet doit surtout à l'opportunisme des pouvoirs politiques en période électorale. Ce que la fin du film résume avec brio, synthétisant parfaitement la dialectique politique à l'oeuvre, c'est que ce parc, quelles que soient les raisons pour lesquelles il a vu le jour, existe bel et bien et donne un peu de bonheur aux enfants d'un quartier pauvre; mais en parallèle est également affirmée la paresse d'une administration incorrigible qui n'a que faire d'une population en détresse. Au final, "Vivre" n'est pas un sommet dans le filmographie de Kurosawa, mais une pièce singulière et importante.
Avec "Vivre", Akira Kurosawa signe un film profond sur le sens de la vie et l'absurdité de notre quotidien/société. Un film dure aussi puisqu'il touche la maladie et la fin de vie.
Tout cela, Kurosawa le met en scène dans un magnifique noir et blanc, avec une écriture subtile à la fois humaniste et cynique. Le cinéaste japonais possède un talent indéniable. J'ai toutefois ressenti de nombreuses longueurs durant le visionnement de ce long métrage notamment vers la fin.
Loin d'être mon Kurosawa préféré mais "Vivre" reste, à raison, une oeuvre importante dans sa filmographie.
Un film d'un grand humanisme qui, s'il a vieilli, conserve une force d'évocation intacte. Le côté kafkaïen de l'administration japonaise est particulièrement bien dépeint, avec ses innombrables chefs de service imbus de leur condition, incapables de prendre une décision, fermés à tout projet émanant de la société civile. Les relations entre le vieux fonctionnaire et ses rencontres fortuites (l'insomniaque, la jeune employée) sont magnifiquement narrées.
Vivre, Ikiru, faire une analyse sémiologique du film n'aurait pas autant d'impact que toute la charge symbolique renvoyée par le seul titre du film. Les scènes choisies par le maître Kurosawa montrent habilement les paradoxes d'un homme qui se sait condamné. On observe les derniers instants d'un homme qui connait tous les sentiments que l'on ne souhaiterai à personne : la sagesse et le coeur de l'homme prend le dessus et on passe à notre tour de sentiments comme la pitié à une profonde empathie qui ne nous fait pas sortir indemne de cette incarnation filmique de la valeur et du sens de la vie dans toute sa poèsie.
Ca faisait bien 5 ans qu'un film n'avait reussi à me tirer une larme. D'une finesse extreme, Kurosawa se detache du cinema "historique" (retenez les guillemets) et nous livre une fable sociale (qui depuis 56 ans n'as pas pris une ride) impertinament juste sur qu'est ce que l'humanité et, surtout, qu'est ce qu'une vie, quel est son poids, son interet? Un film en deux partie extremement bien monté sur les desillusions et la reconstruction soudaine de la vie d'un homme mourant. Tendre et violent, beau et laid à la fois humain et monstrueux: ce film est une ode à la vie mené avec perfection decrivant aussi bien à quel point la vie est precieuse que comment les hommes la gache.
2h20 de pure magie exécutée par l’un des plus grands Maître du 7ème art : Kurosawa. Mais comment fait-il pour imaginer un pareil scénario et une telle mise en scène qui n’en finit pas de nous émerveiller à chaque plan qui pourrait être un tableau, à chaque séquence qui tient du miracle ? Cette très belle histoire en deux grandes parties où l’immense Takashi Shimura nous entraine dans une profonde réflexion sur le sens de la vie à travers une critique constructive des services administratifs transformant l’homme en « momie » et où il va finalement ouvrir les yeux à l’approche de la mort. Sa composition de ce vieillard rongé par un cancer gastrique fait littéralement mal au cœur tant ses grimaces, sa voix pleine de souffrance et toutes les mouvances de son corps touchent la perfection. Alors quel bonheur de le voir reprendre vie devant le visage joyeux et coquin de la jeune et belle Shinichi Imori ! Mais le plus magistral dans ce chef d’œuvre reste cette immense séquence où ses enfants et toutes ses relations se retrouvent pour son deuil et cherchent à comprendre à grands coups de flashbacks ce qui a bien pu transformer cette « momie » en être acclamé pour son courage et sa ténacité qui aura ponctuellement changé les choses. Malgré le petit décor de cette pièce unique, je ne crois pas me tromper vous affirmant qu’il n’y a pas 2 plans identiques. Kurosawa virevolte avec sa caméra autour de ses personnages sans interruptions de son ni de dialogues avec une telle fluidité que je n’arrive pas à comprendre comment il a procédé. Et j’adore le message final où bien que notre héros ait montré l’exemple et que tous soient près à le suivre, l’enthousiasme retombe devant la difficulté pour retrouver ces taches ennuyeuses à mourir dénuées de but, bloquant la machine, faites de formulaires et de tampons. Le monde entier devrait voir ce bijou de cinéma. Une véritable leçon de vie…
La quintessence d'un Kurosawa, la description de l'administration est un petit bijou d'humour noir et les interrogations du film sont universelles, un très bon travail d'image en particulier les lumières sur le visage de l'excellent Takashi Shimura, très touchant notamment en présence de Minosuke Yamada.
Je n'en reviens pas de ce que je viens de voir. Je ne comprends pas pourquoi c'est culte, le film est d'un ennui mortel du début à la fin, on voit juste un vieux dépressif. Super...
Inspiré par le néoréalisme italien, Kurosawa signe ici une oeuvre profondément humaniste qui témoigne de l'état du Japon d'après-guerre. Il y dépeint une administration extrêmement mal organisée, qui fuit le travail et les responsabilités et abrutit ses employés, les "vissant" sur leur sièges en leur ôtant le goût de la vie. C'est dans ce contexte qu'évolue Kenji Watanabe, employé modèle (30 ans de bons et loyaux services), complètement amorphe (le système a gagné et l'a vaincu), et qui apprend soudainement l'imminence de sa mort. Après une phase douloureuse de constat sur la pauvreté et l'inutilité de sa vie (très bon jeu expressioniste de Shimura Takashi), notre héros décide enfin de vivre pleinement le peu de temps qui lui reste et se met à chercher le but de son existence. Cette histoire est l'occasion pour Kurosawa de nous donner sa vision du sens de la vie: vivre c'est agir, mais agir pour le bien des autres. Magnifique leçon de vie qui puise dans ce qu'il y a de meilleur chez l'homme et qui trouve une résonnance particulière dans nos sociétés modernes, apogées de l'individualisme. "Vivre" est une oeuvre touchante mais qui au-delà de çà nous expose des valeurs morales d'une grande importance. La fin du film est d'une justesse démoralisante: on y voit les employés de la mairie qui, sous l'effet du saké et admiratifs de la grandeur de leur chef décédé, décident d'agir pour le bien de tous et de se mettre au travail. Ces belles intentions sont oubliées dès le lendemain, de retour à leur bureau où la loi du système reprend ses droits. Sur le fond, "Vivre" est sûrement la plus belle réalisation de son auteur. Indispensable.
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4,0
Publiée le 16 septembre 2022
Oeuvre d'inspiration critique selon Akira Kurosawa le magnifique dont le thème principal est bel et bien la dèchèance physique! Un thème que sublime le maître nippon, dèjà au sommet de son art! La construction de l'histoire est admirable et l'utilisation du flashback l'est tout autant! Takashi Shimura est bouleversant en modeste employè atteint d'un cancer incurable qui cherche une raison à sa vie, en tout cas à revivre et à rèespèrer par la construction d'un parc de jeux pour enfants! Un acteur comme lui peut même être considèrè comme une sorte de synthèse vivante de l'oeuvre de Kurosawa! En transposant ce dèsarroi d'une sociètè de tout un pays sur un individu, le cinèaste signe un grand film sur la misère morale et humaine, dans l'optique du nèoralisme, transposè èvidemment au Japon! C'est à la fois beau et dèchirant! Dègainez le portefeuille car "Vivre" (1952) ne coûte que 1,23€ sur Amazon! On croit rêver...
La force du film est qu'il donne des réponses aux questions existentielles: vivre est une philosophie, c'est au-delà de la simple activité du corps, c'est trouver sa voie. Ici c'est "le malheur (qui) révèle à l'homme sa vérité." Cet homme en effet, après s'être jeté dans le tourbillon de la vie, croyant ainsi faire partie du monde et "goûter la vie de toutes ses forces" comme le mythe de Faust, trouve autour de lui mépris et incompréhension avant de choisir un projet comme but ultime de sa vie. Superbe film dont la construction est somptueuse. Mais cruelle destinée pour cet homme simple qui devient le modèle de tous avant l'effondrement final d'un idéalisme trop cher. Superbe
Une oeuvre peu rythmée, ponctuée d'énormes longueurs et qui a assez vieillie. Après certains personnages sont originaux et bien écrits, arrivant bien à retranscrire les caractères du domaine. Et la critique de la bureaucratie, du fonctionnariat et de l'aliénation au travail à travers la perte de temps ou à l'accumulation de taches sans buts s'avère plutôt efficace et est toujours d'actualité.