Les Tontons ! Mais nom de nom, c'est un des grands classiques du cinéma français. Je pensais, en arrivant ici, que je ne trouverai que des commentaires positifs... eh bien je me suis royalement foirée ! J'ai encore eu moyen de trouver d'éternels ronchons, toujours prêts à dénigrer ce chef-d'œuvre. Là, les bras m'en tombent... Comment peut-on ne pas aimer cette comédie culte ? On a d'abord Audiard. Ah, Audiard. Certainement le plus grand dialoguiste français qui existe. "Ton Antoine commence à me les briser menu !" ; "J'dynamite, j'disperse, j'ventile !" ; "Dites, y picole pas un peu, votre British, là ?"... On n'a pas fait mieux. Des dialogues aux petits oignons signés Maître Audiard, qui font tour à tour sourire et hurler de rire.
Et les acteurs. Bon sang, que ferait-on sans eux ? On ne trouve presque que des "gueules" du cinéma français, ce bon Lino Ventura en tête. Lino ! Mais il est tout simplement inoubliable, dans son rôle de brute épaisse au grand cœur. Monsieur Fernand est sans doute le plus sympathique des truands. Cet immense acteur est à mon goût parti trop tôt, car il avait vraiment une allure, une démarche et un style uniques. Francis Blanche est superbe en Maître Folace, ce notaire plus ou moins véreux mais ô combien délirant : "Et c'est pour ça que je me permets d'intimer l'ordre à certains salisseurs de mémoire qui feraient mieux de fermer leur claque-merde..." Je ris aux éclats à chaque fois que j'entends cette réplique culte (parmi tant d'autres...). Que dire alors des frères Volfoni ? Est-ce Raoul, joué par le très grand Bernard Blier, qui a donné à ce grand truand autoritaire et teigneux sa diction unique et sa bonhomie tellement décalée par rapport à son personnage ? Ou bien est-ce Paul, souvent oublié, campé par un sacré comédien (que j'apprécie énormément), Jean Lefebvre, parfaitement à l'aise dans son rôle du jeune frère discret, dans l'ombre de l'aîné, et bêta mais pas tant que ça, auquel il a refilé sa "gueule" éternelle de cocker triste ? Les deux sans doute... On peut aussi citer Antoine, jeune Claude Rich qui semble se complaire en gendre casse-c******* (selon Monsieur Fernand) mais rêveur, ainsi que Jean, un Robert Dalban qui s'illustrait par ses tonitruants "Yes, Sir!", ou encore Pascal, superbe Venantino Venantini qui faisait très bien le porte-flingue, Théo, joué par Horst Frank nickel en mafieux sans scrupules, sans oublier Patricia, très mignonne Sabine Sinjen, pas si candide qu'elle en a l'air.
Une scène que j'aime énormément est celle de l'église, où l'on voit alignés, agenouillés sur des prie-Dieu, Monsieur Fernand (Lino Ventura), Maître Folace (Francis Blanche), Jean (Robert Dalban), et les frères Volfoni (Bernard Blier et Jean Lefebvre). Dans ce cas-là, on ne peut que se dire : "Mâtin ! Quelle belle brochette d'acteurs !"
Mais le pilier central du film est bien sûr la scène de la cuisine. Impossible de ne pas éclater de rire en voyant nos truands préférés boire du tord-boyaux ! Et Bernard Blier de déclarer, visiblement remué : "Faut r'connaître, c'est du brutal !", et son infortuné petit frangin, Paul, d'avoir les larmes aux yeux tellement c'est fort. En effet, le "vitriol" rend aveugle... Un petit truc à savoir à propos de cette scène : aucun ne boit une goutte d'alcool... à une exception près. Jean Lefebvre a été bien secoué quand il a bu le contenu de son verre, car l'équipe technique y avait mis un mélange explosif : cognac et whisky, le tout additionné de poivre ! Sauf que lui n'en savait strictement rien. Imaginez le feu d'artifice quand il a avalé ça ! Le pire, c'est qu'il ne pouvait pas freiner, sans cela, il aurait été en retard sur les autres. Inutile de dire que ses larmes n'étaient pas du chiqué, mais parfaitement justifiées... "Je suis ce pauvre bougre à qui il arrive tous les malheurs du monde. Et en plus, j'ai un physique qui aide." C'est lui qui l'avait dit. Lol !
Lino, Bernard, Francis, Jean, Robert, revenez ! Comme vous nous manquez...