Suite au succès critique de ‘Easy rider’, Dennis Hopper était devenu une force qui compte au sein du Nouvel Hollywood naîssant et pouvait donc se permettre de se lancer dans des projets plus ambitieux, dont ce ‘Last movie’ fut à la fois le galop d’essai et le chant du cygne. Pourtant, l’idée de départ, celle d’un meta-film consacré au tournage d’un western dans une communauté andine, n’était pas dépourvu de qualités. Dans une démarche proche de celle qu’allait emprunter un Jodorowski quelques années plus tard, Hopper va imaginer que, ’inspirés par ce à quoi ils ont participé en tant que figurants, les indigènes se mettent en tête de tourner leur propre film, , sans vraiment comprendre ce que cela implique car si les caméras sont fausses, la violence est subitement devenue réelle. Cette idée fait étrangement écho aux réelles conditions de tournage du film, ce qui ajoute un degré de réalité supplémentaire, puisque les communautés locales des lieux où fut tourné ‘The last movie’ furent rapidement irritées par ces Américains bruyants et destructeurs venus planter leurs caméras chez eux. Tout cela est plutôt intéressant mais ne dure guère, tant le tournage fut considéré, hier comme aujourd’hui, comme une catastrophe d’ampleur mythologique. Le script, confié à un scénariste de renom, fut ensuite totalement négligé par Hopper qui, tout à sa quête de vérité, préféra s’entourer de ses amis proches, acteurs et artistes, pour tourner des dizaines d’heures de rush sans réfléchir la manière dont il comptait s’en servir...et, accessoirement, pour pouvoir se défoncer entre gens de bonne compagnie. Fidèle à une logique d’expérimentation totale propre à ces années là, il monta les scènes sans logique ni chronologie apparente, n’obéissant qu’à son flux de conscience, si bien qu’entre la relation orageuse des personnages joués par Hopper et Stella Garcia, et l’obscure histoire de projet de mine d’or qui traverse le scénario, on cesse rapidement de comprendre de quoi parle réellement ‘The last movie’. Fait assez rare, même à l’époque, Universal, qui avait financé le projet pour permettre à des talents montants d’émerger, refusa de distribuer le résultat final tout en abandonnant l’intégralité des droits à Hopper, qui se débrouilla malgré tout pour organiser quelques projections dans des festivals prestigieux, avant que ce qui devait constituer le décollage définitif de la carrière de sa carrière ne sombre dans l’oubli et n’entraîne l’homme dans une débâcle personnelle et professionnelle dont il ne se remit jamais tout à fait.