Raconter un couple, et plus précisément sa fin, dans le pays le plus romantique du monde. Voilà le paradoxe que Rosselini tente, et échoue, à traduire. Si il est ridicule de nier que "Voyage en Italie" est une œuvre moderne, dans sa structure notamment, il est nécessaire de ne pas considérer cela comme des acquis suffisant.
Si le montage alterné permet ainsi d'offrir une vision double de l'Italie - une terre de tragédies, de mythes et de croyances pour Katherine (Ingrid Bergman fabuleuse), là où Alexander n'y voit qu'un échappatoire intime - il reste que cette séparation, presque constante, n'offre au final aucun relief aux questionnements qui habitent ces personnages, ne faisant qu'expliciter des angoisses qui étaient tangibles dès les premières minutes.
Le problème n'est alors pas que la narration du film se révèle déstructurée et propice à la divagation, mais bien que ces divagations ne mènent à aucune évolution thématique ou formelle.
La mise en scène de Rosselini se construit autour du regard de ses protagonistes, allant même jusqu'à user de caméra subjective, découvrant un quotidien inconnue. Cela résulte en une certaine impression "carte postale", fonctionnelle dans sa volonté de retranscrire une perte de repère culturelle et sentimentale, mais à laquelle le cinéaste n'apporte aucune sensibilité.
Cependant, dès lors que ces deux visions se confrontent - la passivité de Katherine, les envies d'Alexander - "Voyage en Italie" devient poignant, et en l'espace d'un instant, liant le mythologique à l'intime dans une scène d'exhumation déchirante, fait l'état d'un vertige amoureux que l'on pensait disparu.
On ressort frustré de cette tentative audacieuse, par un manque de maitrise formelle qui handicape l'émotion, mais surtout par le traitement tardif d'un axe thématique pourtant saisissant.