Rares sont les réalisateurs à proposer une oeuvre aussi forte et aussi magistrale dès leur premier film. En 1960, année durant laquel Pier Paolo Pasolini a rédigé le script d'"Accattone", ce dernier avait déjà acquis une certaine notoriété dans le monde cinématographique notamment pour sa collaboration avec Federico Fellini sur le film "Les Nuits de Cabiria". Pour des problèmes de production, "Accattone" ne sera tourné que l'année suivante, en 1961, pour des problèmes de production, avant de sortir finalement en 1962 provoquant une certaine polémique auprès de la critique italienne.
Dès les premières minutes, on reconnaît aisément le style de Pasolini, cette fabuleuse mise en scène, ces personnage authentiques, ce zeste d'esprit rebelle avec toutefois une grande humanité. Car "Accattone" est avant tout une histoire de rédemption, celle d'un petit proxénète de la banlieue de Rome, le bien nommé Accattone (mandiant en italien) qui envoye sa compagne, Magdalena, sur le trotoir afin de subvenir à aux besoins de la maison. Il y a une certaine cruauté dans cette histoire, une forme d'égoisme. Accattone ne ressent aucun remords, aucune honte quant à envoyer sa femme se prostituer. Par cette image, Pasolini plonge dans le vif du néo-réalisme italien en présentant une déshumanisation liée à la pauvreté et ou la survie est la seule chose qui occupe l'esprit de ces "banlieusards", tout en plongeant dans la petite criminalité. C'est dans les rues de la banlieue de Rome qu'on été tournées les scènes d'"Accattone", lieu que fréquentait beaucoup Pasolini durant les années 50. Ainsi, c'est le regard d'un spectateur qui est mis en scène, le réalisateur italien étant témoin de ces évenements tragiques qui représentent le thème principal du film. On ressent la tourmentation du réalisateur, son esprit rebelle mais aussi sa volonté de rédemption. Car dans tout ce décor emprunt de malsainité, une lumière apparaîtra lorsque le personnage principal rencontrera une femme, Stella. Premièrement, il lui fera la cour dans l'espoir de l'envoyer elle aussi se prostituer, suite à l'arrestation de sa femme Magdalena, mais petit à petit, il tombera réellement amoureux de la personne et cette affection sera plus forte. Amour qui sauvera Accattone de son égoisme et de sa fainéantise. Pour le bien de sa femme, il se décidera à changer et à souffrir lui même, en échange de tout ce qu'il a fait endurer à ses compagnes, l'ensemble reliant à la rédemption donc.
Sans langue de bois, Pasolini filme la délinquance avec une sincérité rare, et les tournants que prend le scénario renvoie à la même volonté de Pasolini de se pardonner de quelque chose.
Cette sincérité, omniprésente, fait de "Accattone" un film fort, pessimiste et beau en tout point de vue, que de soit dans ses images, dans son traitement de l'histoire, dans sa mise en scène, etc... Pour un premier film, Pier Paolo Pasolini envoie un uppercut au spectateur, coups qui s'enchaineront avec ses films suivants, "Théorème" ou encore le chef d'oeuvre "L'Evangile selon Saint Matthieu".