Si vous ne supportez pas Christine Angot car vous la trouvez agressive, pleine de rage, cassante , pas marrante, alors n'allez pas voir ce film car elle y est agressive, pleine de rage, cassant, pas marrante. Forcément. Simplement parce qu'elle ne peut pas faire autrement, la plupart du temps. Mais si vous voulez essayer de comprendre pourquoi, à défaut de lire ses romans, allez quand même voir son film. Ou plutôt allez y juste pour visionner la scène surréaliste construite à partir d'images de l'émission "Tout le monde en parle" tournée à la sortie de son livre l'Inceste. Le montage met en relief des moments de lynchage, la meute se déchaine sur elle juste parce que son sujet dérange alors que sur un plateau TV on est là juste pour rigoler. Sur le plateau, Christine reste digne et garde son calme. Il émane d'elle une grande douceur, une fragilité. A la fin elle se lève et quitte le plateau, toujours calme. "On s'amusait bien pourtant" dit Thierry Ardisson. Comme son père "s'amusait" avec elle. Les invités ne se rendent-ils pas compte à quel point leur attitude est ignoble à ce moment là ? Comment ne pas devenir enragée quand on se heurte à une telle absence d'empathie ? Cinématographiquement, la qualité du film est discutable. Un peu bancal, un peu cabossé, un peu maladroit. Là encore tout s'explique par le traumatisme vécu par la réalisatrice, encore omniprésent. Une vie c'est long pour porter tout celà, c'est très court aussi pour arriver à comprendre "qui c'était ce type", comme le dit sa fille émue aux larmes, à extirper des mots qu'elle attend en vain depuis des années de la part des "complices" que représentent sa belle-mère et sa mère.
Finalement une seule phrase lui suffit pour être apaisée et en quelque sorte sauvée, celle que prononce sa fille :
"je suis désolée qu'il te soit arrivé çà" .
Et quand Christine apprend que sa belle-mère
porte plainte suite à sa méthode d'interrogatoire pour le documentaire jugée trop agressive,
son avocat est remarquable d'humanité, lui expliquant qu' il plaidera que son histoire est bien plus grave que "tout çà", qu'elle n'est plus seulement la sienne propre mais celle de toutes les victimes d'inceste. Une histoire dont tous les acteurs doivent a minima accepter d'entendre ce qu'elle a le courage de leur dire.