Le cynisme est aussi du grand art
Depuis 1996 et son 1er film Encore, le moins qu’on puisse dire de Pascal Bonitzer c’est que son cinéma divise. Que va-t-on penser de ces 90 minutes de comédie dramatique ? André Masson, commissaire-priseur dans la célèbre maison de ventes Scottie’s, reçoit un jour un courrier selon lequel une toile d’Egon Schiele aurait été découverte à Mulhouse chez un jeune ouvrier. Très sceptique, il se rend sur place et doit se rendre à l’évidence : le tableau est authentique, un chef-d'œuvre disparu depuis 1939, spolié par les nazis. André voit dans cet événement le sommet de sa carrière, mais c’est aussi le début d’un combat qui pourrait la mettre en péril… J’ai du écourter le pitch proposé par les distributeurs tant il dit de choses – trop de choses – sur le déroulé de ce film. Superbement écrit, cet éloge du cynisme se perd un peu dans ses multiples personnages qui diluent un peu trop le véritable sujet. Passionnant mais trop désordonné.
Ce film est inspiré d'une histoire vraie : la découverte, au début des années 2000, d’un tableau d’Egon Schiele dans le pavillon d’un jeune ouvrier chimiste de la banlieue de Mulhouse par un spécialiste d’art moderne d’une grande maison de vente internationale... Tableau qui s’est révélé être une œuvre spoliée par les nazis… Jusque là, Bonitzer n’a pas inventé grand-chose. En fin de compte, l’originalité de cette espèce de thriller se situe à la fois dans la psychologie des personnages et le milieu dans lequel ils évoluent, celui des ventes d’œuvres d’art. En vérité, le film parle moins d’art que des intérêts colossaux qui y sont liés. Les dialogues sont d’une extrême finesse et l’humour omniprésent. Mais, je l’ai dit, beaucoup – trop -, de personnages dont on n’a pas le temps de saisir toute la complexité. Personnellement, j’aurais aimé que l’intrigue soit plus resserrée. Un film à l’ambiguïté élégante, à l’humour corrosif et la réalisation très peaufinée. Peut se voir sans crainte.
Mais alors, quel casting ! Alex Lutz, au sommet de son art. Léa Drucker, insaisissable, Nora Hamzawi, toujours très juste, Louise Chevillotte, impeccable en mythomane et les participations d’Alain Chamfort, surprenant et Olivier Rabourdin. Du beau monde à l’écran pour un bon film parfois, je le répète, un peu touffu, mais haletant et d’une écriture diabolique. Une comédie grinçante sur le marché de l’Art, son mépris de classe et sa froideur cynique, mais parasitée par trop de digressions.