Watashitachi ha Otona
Sans aller jusqu’à conserver le titre original en japonais, et lui préférer sa traduction, Nous sommes des adultes, pourquoi le distributeur français – Art House, pour ne pas le nommer -, a-t-il affublé le drame de Takuya Katô d’un titre aussi banal ? Cela dit, ça n’a qu’une importance relative vu que ces 84 minutes – qui semblent n’en jamais finir -, ne valent pas tripette. Après la perte brutale de son amant, Watako retourne discrètement à sa vie conjugale, sans parler à personne de cet accident. Lorsque les sentiments qu’elle pensait avoir enfouis refont surface, elle comprend que sa vie ne pourra plus être comme avant et décide de se confronter un à un à tous ses problèmes. Un sommet de l’ennui distingué.
Le résumé du scénario de La mélancolie raconte une histoire plus banale que banale, qui pourrait se dérouler à peu près partout sur la planète et qui revêt donc une universalité indiscutable, à défaut d’originalité : il faut savoir que, jusqu’au bout, et jusqu’aux quelques dernières scènes contenant un tout petit peu de tension, La mélancolie est un film qui fuira comme la peste toute originalité. Une véritable grâce : format de l’image, sûreté du cadre, juste distance par rapport aux personnages, absence totale de musique, durée parfaite des plans, direction d’acteurs précise… tout est ici proche de la perfection, et peut être la source d’un réel plaisir pour les cinéphiles. Mais franchement ça ne suffit pas, car j’ai connu des soirées diapos plus palpitantes. Le problème est ailleurs, et ne réside même pas dans l’aspect convenu de ce qui nous est raconté ici. Non, le problème est dans le choix d’enfermer totalement les péripéties, finalement nombreuses pour une heure et vingt-quatre minutes de film, dans le cadre rigide des convenances strictes de la société japonaise, qui veulent que tout le monde soit poli, respectueux, garde son calme, etc. Ce qui tue dans l’œuf toute émotion, hormis bien sûr l’étonnement que ressent le spectateur occidental – même familier du formidable cinéma nippon – devant plusieurs scènes hallucinantes à force d’être anesthésiées par ces convenances, qui frôlent à de nombreuses reprises l’absurde. Le choix de centrer le film sur un personnage féminin fondamentalement peu engageant de par son apathie permanente, aggrave encore le quasi-ridicule de certains passages du film, en particulier autour du « glamping amoureux » ou, pire encore, de l’accident fatal. A moins d’avoir un amour démesuré pour le néant – même nippon -, voilà un film à éviter de toute urgence.
On n’arrive pas à savoir si Mugi Kadowaki est une formidable actrice qui réussit à ne rien faire et ne rien exprimer du tout, ou au contraire un boulet ! Elle est pourtant a priori très bien entouré par les excellents Kanji Furutachi - Harmonium, Hospitalité -, Shôta Sometani - First Love - et Haru Kuroki - La Maison au toit rouge, Dans un jardin qu’on dirait éternel. Le pire, c’est que parlant de son casting, le cinéaste confie : Le choix s’est fait sur leur jeu et leur capacité à s’épanouir à l’intérieur de mon film. Eh bien tout ce petit monde ne joue jamais et ne s’épanouit à aucun moment ! Quant aux cadrages qui évitent soigneusement les gros plans, Katô nous dit : J’ai fait en sorte de maintenir une certaine distance afin que le spectateur ait la place de se poser des questions… C’est vrai, la question qui m’est venue très vite à l’esprit c’est « qu’est-ce je fous là ? »