Le film trouve son origine dans une lettre que Wim Wenders a reçue au début 2022. Elle contenait ce texte : "Seriez-vous intéressé par le tournage d'une série de courts métrages de fiction à Tokyo, peut- être 4 ou 5, d'une durée de 15 à 20 minutes chacun ? Ces films traiteraient tous d'un projet social public extraordinaire, impliqueraient le travail de grands architectes et nous nous assurerions que vous puissiez développer les scénarios vous-même et obtenir la meilleure distribution possible. Et nous vous garantissons une liberté artistique totale."
Cela faisait des années que le réalisateur voulait retourner au Japon : "J'ai donc poursuivi ma lecture : le sujet porterait sur les toilettes publiques, et l'espoir était de trouver un personnage à travers lequel on pourrait comprendre l'essence d'une culture japonaise accueillante, dans laquelle les toilettes jouent un rôle tout à fait différent de notre propre vision occidentale de l'"assainissement". Pour nous, en effet, les toilettes ne font pas partie de notre culture, elles sont au contraire l'incarnation de son absence. Au Japon, ce sont de petits sanctuaires de paix..."
Perfect Days a obtenu le Prix d'Interprétation Masculine pour Kōji Yakusho au Festival de Cannes 2023. Wim Wenders est familier de la croisette puisqu'il a reçu le Prix de la critique internationale pour Au fil du temps, la Palme d'or, le Prix de la critique internationale et le Prix du jury œcuménique pour Paris, Texas, le Prix de la mise en scène pour Les Ailes du désir, le Grand prix du jury pour Si loin, si proche !, et le Prix spécial du jury Un certain regard, Mention spéciale du jury œcuménique et Mention spéciale du Prix François-Chalais pour Le Sel de la Terre.
Wim Wenders a apprécié les photos de "ces merveilles d'architecture", qui ressemblent selon lui davantage à des temples de l'assainissement qu'à des toilettes classiques : "J'ai aimé l'idée de "l'art" qui leur est attachée. J'ai toujours le sentiment que les "lieux" sont mieux protégés dans les histoires que dans un contexte non fictif. Mais je n'ai pas aimé l'idée d'une série de courts métrages. Ce n'est pas mon langage. Au lieu de tourner 4 fois 4 jours, je me suis dit : pourquoi ne pas tourner un vrai film pendant ces 17 jours ? De toute façon, que peut-on faire avec 4 courts métrages ?"
"Imaginez que vous ayez un long métrage à la place ! La réponse a été : nous adorons votre idée ! Mais est-ce possible ? J'ai répondu : Oui ! Si nous réduisons notre histoire à moins de lieux et à un seul rôle principal. Mais il faudrait d'abord que je vienne voir par moi-même. Je ne peux pas imaginer une histoire sans en connaître les lieux. Et je suis en plein tournage. Je peux vous donner une semaine en mai, puis nous pourrons éventuellement le faire en octobre, lorsque j'aurai une fenêtre de post-production de cet autre film (Il s'agit de ANSELM)", précise le metteur en scène.
Wim Wenders s'est donc rendu à Tokyo en mai 2022 pendant 10 jours. Le cinéaste a pu rencontrer Koji Yakusho, l'acteur dont il rêvait pour le rôle (qui restait à écrire) et qu'il avait vu dans une douzaine de films. Il se remémore : "J'ai découvert ces endroits, tous situés à Shibuya, que j'adore. Ces toilettes étaient trop belles pour être vraies. Mais ce n'était pas le sujet de ce film. Cela ne pouvait devenir un film que si nous parvenions à créer un gardien unique, un personnage vraiment crédible et réel."
"Son histoire seule compterait, et ce n'est que si sa vie valait la peine d'être suivie qu'il pourrait porter le film, et ces lieux, et toutes les idées qui y sont attachées, comme le sens aigu du "bien commun" au Japon, le respect mutuel pour "la ville" et "les autres" qui rendent la vie publique au Japon si différente de celle de notre monde. Il m'était impossible d'écrire cela tout seul. Mais j'ai trouvé en Takuma Takasaki un coscénariste hors pair. Nous avons creusé profondément pour trouver notre homme..."
Wim Wenders a dédié le film à Yasujirō Ozu. Il explique en quoi le célèbre réalisateur japonais l'a influencé dans sa carrière : "Principalement le sentiment qui imprègne ses films que chaque chose et chaque personne est unique, que chaque moment ne se produit qu'une seule fois, que les histoires quotidiennes sont les seules histoires éternelles."
Wim Wenders possède une longue relation avec Tokyo et le Japon. La ville elle-même joue un rôle important dans Perfect Days, et le réalisateur a eu la chance de tourner dans des endroits où il n'est généralement pas permis de le faire : "J'ai aimé Tokyo la première fois que je m'y suis promené et que je m'y suis perdu. C'était déjà à la fin des années soixante-dix. C'était une époque de pur émerveillement. Je marchais pendant des heures, sans savoir où j'étais dans ce1e immense ville, puis je prenais n'importe quel métro et je retrouvais mon hôtel. Chaque jour, je me rendais dans un autre quartier."
"J'étais stupéfait par la structure apparemment chaotique de la ville, où l'on trouvait de vieux blocs avec d'anciennes maisons en bois à côté de gratte-ciel et d'intersections très fréquentées, où l'on passait sous ces autoroutes de science-fiction à deux ou trois étages et où l'on trouvait les zones d'habitation les plus paisibles et des labyrinthes de rues minuscules juste à côté. J'étais fasciné par tout le futur que je voyais se dessiner. J'avais toujours considéré les États-Unis comme l'endroit où l'on pouvait rencontrer l'avenir. Ici, au Japon, j'ai trouvé une autre version de l'avenir, qui me convenait très bien."