C'est en découvrant en 2013 une vidéo en ligne sur l’anatomie du clitoris que Nina Faure a eu une révélation : "Elle montrait que notre plaisir venait de là et que cette histoire de femme vaginale, c’était un mythe. Ça a été une illumination ! Je me suis mise à en parler à qui voulait l’entendre. Non seulement personne de mon entourage n’était au courant, mais ça déclenchait des discussions avec mes amies, où on remettait en question ce qui se passait dans nos vies sexuelles." En trouvant des archives du cinéma féministe des années 1970, elle et son amie Yéléna Perret se sont rendues compte que les prises de positions de ces militantes étaient encore très actuelles. Elles ont décidé de se lancer dans la réalisation d'un film afin de faire entendre des récits invisibilisés et pourtant vécus par de nombreuses femmes.
Le film montre de nombreux groupes de parole, au sein desquels les femmes peuvent se livrer avec bienveillance. Afin de filmer ces groupes où la confidentialité est essentielle, la réalisatrice a effectué un gros travail de préparation en amont. Durant la phase de repérage, les groupes de parole n’étaient pas filmés ou servaient uniquement pour le processus d’écriture du film. Au début, à l’idée d’être filmées, certaines participantes demandaient si les visages seraient floutés, ou les voix transformées. "Nous voulions arriver à faire un film où l’on parle sans se cacher, où on affirme notre point de vue ! Petit à petit, nous avons bâti la confiance, d’abord dans nos cercles proches, en participant nous-mêmes à la discussion, en nous exposant dans le film et en expliquant l’enjeu d’assumer publiquement nos histoires pour qu’elles sortent du silence et que d’autres puissent s’y reconnaître", explique Nina Faure.
"L’apport théorique des lesbiennes, des bi et des queer est énorme" selon Yéléna Perret. Dans les groupes de parole, elle et Nina Faure ont été frappées par le décalage qu'il y avait entre ceux où il y avait une majorité de femmes hétéros cisgenres et ceux avec une majorité de lesbiennes, de bi. "Avec celles-ci, plein d’autres choses s’ouvraient : même si on a parlé de lesbophobie, de violences... ça a été les premiers groupes de paroles dans lesquels on a vraiment parlé de plaisir. Il y avait aussi plus de joie, de rires. Tout ce monde de relations entre femmes, pas seulement sexuelles ou amoureuses mais aussi affectives, sororales, extraites du regard masculin, de même que les relations queer, ce sont des représentations positives dont on manque beaucoup."