C'est l'histoire d'un documentaire que personne n'a vu car la France, en mangeant des chips, regardait son équipe jouer son premier match de CDM au Qatar sur TF1.
Cette critique contient des spoilers
Une gêne diffuse m'a accompagné pendant les premières minutes. Rien à voir avec les corps difformes et pachydermiques qui se trainaient devant moi. Non c'est autre chose. Il m'a fallu quelques minutes pour m'en rendre compte mais ce documentaire est largement pompé sur Fed Up, documentaire américain sorti en 2014 ! On retrouve le même sujet, les mêmes interlocuteurs, les mêmes explications. Néanmoins un rappel n'est jamais inutile :
En 2030, la moitié de la planète sera en surpoids ou obèse
L'origine de l'obésité est multifactoriel :
- Génétique
- Volonté personnelle
- Environnement
Le début de l'épidémie se situe à la fin des années 1970. Le combat contre le gras, désigné comme responsable des maladies cardio-vasculaires, fait des céréales, riches en glucides et massivement subventionnées, la nouvelle base de notre alimentation.
Des mesures de bon sens sont "proposées" (elles sont posées depuis des années dans le débat public) telle qu'une taxe soda, l'interdiction de publicité pour les produits trop riches en gras, sel, sucre ou calories ou la systématisation du nutriscore. Idéalement un nutriscore maj qui prendrait en compte la valeur nutritionnelle du produit (pour 100g) mais aussi son taux de transformation.
"Plus l'index glycémique d'un aliment est élevé plus l'aborption de sucre par le corps sera brutal. Hors le stockage du sucre dans les cellules dédiées est possible en quantité limitée. Et comme le sucre est toxique pour l'organisme, le corps a développé une autre technique pour abaisser le taux de glucose (sucre) dans le sang : la sécrétion d'insuline par le pancréas. C'est elle qui va stocker le sucre restant dans les cellules graisseuses, le sucre est donc transformé en graisse ce qui entraine la prise de poids.
Deux mécanismes s'ajoutent à ce phénomène.
D'abord les cellules graisseuses sont comme des batteries rechargeables. Elles stockent du gras lorsque vous mangez et le restituent lors d'un exercice physique pour fournir de l’énergie à vos muscles et organes. Malheureusement nous ne sommes pas égaux et pour certains les batteries fonctionnent mal, elles ne libèrent pas leur carburant, l'énergie accumulée. Le gras ne ressort pas des cellules, les muscles ne sont pas alimentés, on est faible et les cellules réclament de l'énergie : vous avez faim à nouveau.
Le deuxième mécanisme est progressif. Nous avons vu que si vous mangez un repas trop riche vous allez secréter de l'insuline qui va favoriser la transformation du sucre en gras. Le problème c'est qu'en mangeant régulièrement des repas trop riches, votre corps va s'habituer à l'action de l'insuline et en secréter davantage. Hors quand le niveau d’insuline est élevé, nous stockons les calories sous forme de graisse alors que lorsqu'il est bas le niveau d'insuline permet de libérer la graisse de notre tissu adipeux et de la brûler comme combustible. Ainsi plus vous mangez, plus vous secretez d'insuline, plus le sucre ingéré va être stocké dans les cellules graisseuses et plus vos cellules vont être paresseuses dans leur restitution de carburant lors d'un effort. Résultat : vous grossissez de plus en plus. Ce mécanisme permet de comprendre pourquoi l'exercice physique peut paradoxalement être néfaste. Chez les personnes avec un haut taux d'insuline, le sucre des cellules des muscles sera rapidement épuisé et comme l'énergie stockée dans les cellules graisseuses ne sera pas libérée, vous serez affamé au niveau cellulaire et aurez envie de manger à nouveau.
Le documentaire continue en détruisant l'idée selon laquelle la théorie selon laquelle il faudrait équilibrer les calories consommées et les calories dépensées. Et en effet les chiffres sont assez saisissants : il faudrait près de 30minutes de nage pour éliminer une portion de frite. On se rend compte de la tâche immense nécessaire pour purger un Maxi Best Of.
Fed Up fait ensuite un retour dans le passé pour comprendre comment notre alimentation s'est progressivement désiquilibrée. Suite à la prise de conscience des consommateurs que les lipides leur donnaient des joues de Hamster et des ventres de Moby Dick, l'industrie alimentaire a fait du reengineering avec un principe simple : remplacer le gras par le sucre. Ainsi on ne mange pas moins, les produits conservent un goût acceptable et il est possible d'apposer le précieux label "low fat" sur des produits tout aussi pauvre nutritionnellement. Fed up s'attarde aussi sur les conséquence physique de l'absorption de repas aussi riche en calories. Et ce faisant, il renverse l'idée pré-concue que les gens sont gras parce qu'ils ne font rien. Ces symptômes : inactivité, paresse, ennui et manque de volonté sont la cause de l'obésité mais aussi la résultante d'un processus physiologique que provoque la consommation d'un repas trop riche. On ne fait rien parce qu'après avoir mangé excessivement on a envie de ne rien faire. Le lien entre inactivité et obésité est donc plus pernicieux et s'entretient dans un sorte d'auto-alimentation infernale. Le documentaire fait aussi mention (mais de façon trop superficielle) des alternatives au sucre. Le problème des Diet-coke est qu'il envoie un signal au cerveau lui disant : le sucre va arriver. Malheureusement rien n'arrive ce qui va pousser le cerveau à réclamer son sucre sous une autre forme et accompagner le coca par une barre chocoloatée.
Fed Up analyse aussi la technique des lobbys industriels qui, lors d'un risque d'adoption de loi protectrice pour les consommateurs, consiste à élargir le débat et le présenter sous un angle plus favorable : l'attaque des libertés individuelles. le choix du petit déjeuner doit il être décidé par le gouvernement ou les parents ? Le documentaire nous fourni une première réponse : les familles présentées dans le documentaire ont besoin d'aide. Les témoignages sont saisissants (le père hispanique complètement dépassé par l'obésité de son fils ou les pleurs de cette mère qui doit renoncer aux tablettes de chocolat dans son placard). C'est pour "les plus fragiles, les plus modestes, les plus humbles, les plus pauvres" qu'ils faut légiférer. En effet si je suis pour le libre arbitre et la responsabilisation de chacun, que je déteste les lois débilitantes ou qui restreignent nos choix, les faits sont trop sérieux pour ne rien faire. Un américain sur trois est obèse et ce sont les membres les plus pauvres de notre société, ceux ayant eu l'accès la plus limité à l'éducation, ceux là même qui regardent le Bigdil ou TPMP plutôt que Fed Up qui sont les plus touchés. Pire beaucoup de nos réactions sont inconscientes et c'est encore plus marqué pour les enfants : mettez deux groupes d'enfants devant des dessins animés avec deux saladiers remplis pareillement de gateaux apéritifs. Insérez des pubs alimentaires entre les cartoons de l'un des groupe : il va manger moitié plus que l'autre."