C'est l'histoire d'un paumé solitaire qui n'arrive pas à dormir la nuit, alors il devient chauffeur de taxi de nuit, se nourrit exclusivement de café, de coca et de sucre. Ses insomnies s'arrangent pas.
Il décide ensuite de trouver femme et pour la draguer, l'invite dans un cinéma porno. La romance tourne court.
Alors il décide de tuer un homme politique et, après s'être fait une coupe de cheveux punk à l'iroquoise, s'infiltre incognito à un meeting. Il est repéré direct.
- Cette critique contient des spoilers -
Je découvre Taxi Driver en 2023 auréolé de son statut de film culte, parcouru de séquences cultissimes telle que "You talking to me ?" dont je découvre qu'elle était complètement improvisée par De Niro, le script se contentant de lui demander de faire face au miroir en silence: "His eyes are glazed with introspection. He sees nothing but himself"
Taxi Driver a 47 ans et le rythme est très éloigné des standards contemporains. J'ai parfois trouvé le temps long mais suis toujours resté dans le film, absorbé par l'atmosphère glauque, la musique appuyant les mouvements de caméra et le trouble que m'inspirait Travis Buckle. De Niro signe une performance exceptionnelle et il fallait au moins cela vu le rôle unique qui lui est proposé. Rendez vous compte que notre héro est un psychopathe ? Et pourtant on s'attache car la solitude de Travis dans cette ville crasseuse nous parle à tous. On compatit avec son job infect "Each night, when I return the cab to the garage, I have to clean the cum off the back seat. Some nights, I clean off the blood" où il côtoie le pire de l'espèce humaine (le vieux bourge avec sa tapineuse, le client caméo de Scorcese). On s'identifie quand il est rejeté par Betsy et quand ses amis cabbie ne parviennent pas à l'aider, à trouver les mots. Même s'il est continuellement au contact d'autres : il est seul. Le thème de Taxi Driver : la solitude au milieu de la foule est encore d'actualité aujourd'hui. C'est un homme esseulé qui souffre de voir la perversion d'un New York puant et crasseux "All the animals come out at night – whores, skunk pussies, buggers, queens, fairies, dopers, junkies, sick, venal. Someday a real rain will come and wash all this scum off the streets."
Et on sent bien via les discours creux de Palantine que la politique ne suffira pas à Travis. Pas plus que la justice car "Sport" le proxénète connait les failles dans la loi “Well, if you are [un flic], then it’s entrapment already”. On en arrive à un point où comme lui on ne voit pas d'autre solution que de prendre les choses en main. "Here is a man who would not take it anymore." Car Travis est un malade mental qui se voit comme un héro, sauf que quand il revêt son costume de chevalier blanc pour sauver Iris, la réalité n'est pas si simple.
La réalisation est traversée de fulgurances comme lorsque De Niro appelle Betsy pour la convaincre de le reprendre. Je n'avais pas compris à ce moment pourquoi la caméra se déporte vers la droite. C'est parce comme nous, elle aussi ressent le malaise de la situation et est gênée devant son héro qui s'humilie.
La fin est plus ouverte qu'il n'y parait car si on peut croire qu'il a survécu à ses blessures, la réalité peut paraitre trop belle pour être vrai. Depuis la réaction des parents d'Iris dont on nous avait pourtant dit qu'il ne voulait plus voir leur fille, jusqu'à celle de Betsy qui le drague assez ouvertement. Cette nouvelle réalité idyllique est nuancée par le dernier plan dans lequel Travis fronce les sourcils en apercevant quelque chose dans son rétroviseur. La paranoïa et la folie ne l'ont pas abandonné