Le talent d'un Artiste, quel qu'il soit, est de nous prendre par la main, de nous entrainer dans un monde, le sien, pour le faire entrer en résonance avec le nôtre. Me concernant, Kechiouche Salim y est redoutablement parvenu, pointant la finesse aiguisée de sa sensibilité dans une plaie à jamais béante. "L'enfant du Paradis" est une double mise en abîme, puisque l'on y trouve des images personnelles de Salim en famille, et un tournage en cours dont Yazid est l'un des protagonistes. Tiroir à double fond, matriochka, je me suis laissé surprendre au début du film, par une dispute conjugale que je croyais réelle, alors qu'elle n'était qu'une répétition. Bravo Salim, tu m'as bien eu ! Et puis, il y a cette Maman, toujours présente, mais bien trop absente, véritable colonne vertébrale familiale, sans laquelle plus rien ne va. Comment ne pas être bouleversé par ce petit garçon rieur, heureux de vivre, aimant, tactile, tout à coup devenu cet homme brisé, à fleur de peau, au bord des larmes, et privé de repères essentiels à sa construction d'adulte ? Son "Mal de Mère" est aussi le mien, incapable, à 62 ans, de me remettre du décès de la mienne, survenu le 29 mars 2020. La grand-mère, sa prise de terre, adorable vielle dame pleine d'humour, à laquelle il s'accroche comme à un roc. Le plus fort n'est pas forcément le plus jeune. Pris dans une tourmente dont il ne sait comment s'extraire, victime de démons en embuscade, Yazid ne devra son salut, sa paix intérieure, qu'au prix de sa vie ! Kechiouche Salim, tu as accouché d'une véritable tragédie grecque qui mérite d'être vue et revue pas le plus grand nombre 👏🙏