«Je vous aime» (France, 1980) de Claude Berri est un film à l'envergure bien plus grande que ne le suggère l'ingénuité du titre. Catherine Deneuve (Alice), en amoureuse instable, est le personnage central de cette histoire sur les amours de nos vies.. Tandis qu'elle vient de rompre avec Claude (Alain Souchon), Alice repense à ce soir de Noël où se sont réunis ces trois anciens amants : Simon (Gainsbourg), Patrick (Depardieu) et Julien (Jean-Louis Trintignant). Lors même de cette soirée, elle ressasse dans son esprit la rencontre avec ces uns, la rupture, la rencontre avec le suivant, tout ceci mis en récit par Berri de façon disloqué, de la même façon que les souvenir viennent à l'esprit, non pas dans une chronologie parfaite mais dans une affluence inconsciente. Disposant d'une prestigieuse distribution, «Je vous aime» donne alors droit à des scènes mémorables, où, comme toujours chez Berri, le cinéma français, dans son simple sens, possède une audacieuse ardeur qui donne à l'oeuve son charme. Ici, Berri filmant Deneuve fluctuante et amoureuse peint un amour velléitaire mais toujours passionné. Les acteurs masculins qui l'accompagnent, ici en second plan, contrairement à d'accoutumé, sont les paysages du vaste monde d'Alice, des pans de sa vie, l'incarnation de son existence tant amoureuse qu'humaine. Bref, «Je vous aime» possède la pudeur du cinéma berrien, une pudeur traînant une véhémente véracité, ici sourdi par un récit sui generis, et des acteurs sensationnels. Destruction de la bête croyance qu'il n'existe qu'un seul amour véritable, ici Berri défend l'idée tout à fait juste qu'en amour il y a le début, il y la fin et entre les deux «on pense au début et on attend que ça finisse». «Je vous aime» c'est la conviction que l'amour est passionnel, éphémère et donc mutliple.