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Olivier Barlet
293 abonnés
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4,5
Publiée le 20 juillet 2022
(...) La révolution, la religion et le feu sont les ingrédients de l’Histoire tunisienne récente comme de ce film fascinant qui s’éloigne de la réalité pour l’interroger par la fiction. Ses références cinéphiles renforcent ses dimensions mystérieuses et mystiques (Hitchcock / Antonioni / Kiyoshi Kurosawa). La reprise des travaux des Jardins de Carthage est un épiphénomène de l’échec révolutionnaire : la reproduction des inégalités. Que sera ce chantier dans quelques années ? Pour l’heure, Ashkal le campe avec brio dans un imaginaire mâtiné de science-fiction où l’étrange fait œuvre d’aiguillon à la réflexion politique. (extrait du compte-rendu du festival de Cannes 2022 sur Africultures)
Ce premier long-métrage de ce réalisateur tunisien tourné dans un quartier de Tunis en reconstruction est un thriller particulier. Nous suivons tout au long de ce film noir l’enquête d’un couple de policier sur plusieurs cas d’immolations à répétition où se greffe l’aspect politique de l’après BEN ALI. Malgré une bonne mise en scène qui reconstitue bien l’atmosphère glauque de ce quartier tunisien, le film reste mystérieux et finalement pas trop bien abouti au niveau du scénario.
Dans "Les Jardins de Carthage" (ça commence comme "Salammbô"), un complexe immobilier laissé à l’abandon en périphérie de Tunis dont la construction avait été interrompue à la chute de Ben Ali, un gardien d’immeuble meurt brûlé vif. S’est-il immolé ? A-t-il été tué ? Bientôt, dans les mêmes circonstances, une jeune employée de maison perd la vie. Deux policiers mènent l’enquête, sur fond de corruption endémique au sein de la police tunisienne et de règlements de comptes : Batal, un père de famille pris dans un conflit de loyauté, et Fatma, une jeune policière dont le père siège à la Commission Vérité et Réconciliation.
Il y a quelques mois, "Harka" faisait le constat amer de l’anomie de la société tunisienne, libérée de la dictature mais incapable de faire une place aux plus démunis de ses membres. Il se terminait par l’immolation de son héros devant les grilles du gouvernorat de Sidi Bouzid, sur les lieux mêmes où Mohamed Bouazizi s’était immolé le 10 décembre 2010, déclenchant la « Révolution de jasmin ». "Ashkal" utilise la même figure traumatisante du brûlé vif. Mais il laisse planer un doute sur les motifs de ces immolations à répétition. S’agit-il de meurtres dont il faut trouver le coupable ? ou d’une vague de suicides ?
La question, posée dès la bande-annonce, est stimulante. Elle promet un film qui oscille entre polar et fantastique, avec l’once d’exotisme que garantit son tournage en Tunisie et la dimension politique que permet en arrière-plan la description de cette société fracturée. Mais hélas, le film ne démarre jamais. La multiplication des immolations et quelques courses poursuites hideusement filmées dans le ventre de ces immeubles en construction ne relancent jamais l’histoire qui fait du surplace. Lentement mais sûrement, on se désintéresse d’"Ashkal". Et la scène finale, que j’ai trouvée particulièrement grotesque, ni ne donne les réponses aux questions que le film avait soulevées, ni ne lui apporte une profondeur qui décidément lui aura manqué.
Une enquête poussive et très très lente sur des immolation par le feu dans une cité en construction. Le tout sous l'influence d'une guerre des polices entre anciens corrompus et nouveau régime. La fin est hallucinante et sans aucun sens
Repéré avec Black Medusa, qu'il a coréalisé, le cinéaste tunisien Youssef Chebbi se lance cette fois en solo avec Ashkal, un faux thriller qui est surtout un constat social sans aménité sur ce que son pays est devenu, plus de 10 ans après la révolution de jasmin, qui avait commencé avec l'immolation de Mohammed Bouazizi. De feu, il en est énormément question dans le film, au-delà de l'enquête de deux policiers sur des corps calcinés, une piste narrative qui est traitée mais qui ne constitue qu'une trame symbolique d'une Tunisie où rien n'a fondamentalement changé depuis la fin du régime de Ben Ali. A ce propos, les décors principaux de Ashkal n'ont pas été choisis au hasard : les Jardins de Carthage, ces résidences pour riches, dont la construction a été interrompues par la révolution et qui devrait reprendre bientôt. Ces lieux bétonnés et déserts sont le théâtre idéal pour que le film, en grande partie nocturne, prenne progressivement des teintes fantastiques. En tous cas, dans cet âge du feu, Youssef Chebbi se montre adepte d'une combustion lente de son intrigue, laquelle aurait pu sans doute gagner en intensité car son rythme est parfois excessivement ralenti par des digressions du récit ou, au contraire, des répétitions inopportunes. Reste tout de même à saluer cette fiction fascinante, audacieuse et riche en atmosphère, et dont le message sera vraisemblablement perçu avec le plus d'acuité par les citoyens tunisiens eux-mêmes.
Décevant. Pourtant le point de départ est accrocheur : de mystérieuses immolations en série sur des chantiers d'une banlieue de Tunis. La conclusion est politiquement audacieuse. Mais entre le début et la fin, quel ennui abyssal. Le film porte mal son nom : L'enquête de Tunis. Des victimes, on ne sait pratiquement rien. Le réalisateur semble fasciné par la poésie des chantiers, des amoncellements de gravats, des herbes folles qui poussent entre les immondices. Cela vaut au spectateur d'interminables déambulations dans des décors de désolation - mais ce n'est pas avec cela que l'on fait un "thriller"...
« Ashkal, l’enquête de Tunis » est le premier long-métrage du réalisateur tunisien Youssef Chebbi sorti en 2022. Nous sommes en 2010 lors de la révolution et on se souvient que Mohammed Bouazizi, un marchand ambulant s’était immolé car il n’avait pas les autorisations nécessaires. Fatma (Fatma Oussaifi) enquête avec son chef Batal (Mohamed Grayaâ), sur un corps trouvé nu carbonisé dans les « Jardins de Carthage », un quartier chic de Tunis dont la construction a été stoppée lors de la révolution. Plusieurs cas similaires s’enchaînent et à vrai dire on n’avance pas dans l’enquête policière en dehors du fait qu’un collègue de Batal lui met des bâtons dans les roues et qu’une « milice » (?) brûlera le dossier de l’enquête. On reste donc sur sa faim sur ce film flirtant parfois avec le mysticisme et pour ma part je n’y ai vu aucun message politique se référant à la révolution tunisienne. Seul point positif : de magnifiques cadrages géométriques dans ces immeubles modernes inachevés.
Certains se demandent si ce monde est bien sérieux, Youssef Chebbi s’inquiète avant tout de savoir s’il existe réellement. En compagnie de son co-scénariste, François-Michel Allegrini, il écrit une histoire où les protagonistes ( flics et victimes ) se perdent dans une même bulle confusionnelle, où aucune issue ne semble possible. Des hommes enquêtent sur des immolations en série au cœur de Tunis à peine remise de sa révolution. Une commission de réconciliation tente de remettre l’Histoire de ce pays en ordre de marche. Elle vise parfois ces inspecteurs de police qui à l’époque encadraient la dictature de manière très servile… Il faut oublier, effacer, mais l’implication indirecte de la commission dans les investigations, via les immolations, l'ensemble dessine une société qui se terre et devient témoin actif. Si la parole se libère , il faut surtout qu’elle soit entendue nous dit le réalisateur qui paradoxalement commente la situation de façon assez abstraite. De la confusion nait une vérité terrible et très actuelle sur l’état de la société tunisienne. Ce film est incroyable ! Pour en savoir plus : lheuredelasortie.com
Un polar étrange dans le contexte de la Commission Vérité et Réconciliation qui a fait un temps la chasse aux "suppôts" de Ben Ali et aux policiers plus ou moins pourris qui avaient commis des exactions sous son régime.
Youssef Chebbi filme superbement le quartier "Les Jardins de Carthage", décor de béton brut d'un chantier luxueux inachevé, rêve grandiloquent inabouti...
Les personnages-clé sont convaincants et sympa. Belle tension.
La chute, déroutante, justifiera des commentaires qui continueront après le film...
Les festivaliers de Visions d'Afrique 2022 en auront profité en avant-première !
En matière de film de genre, ici le polar, le film est une réussite : vues aériennes surprenantes, bâtiments en construction, en restructuration, en destruction, aux façades géométriques qui nous égarent comme dans une toile de Chirico, flics errant entre visites de chantiers, non-dits, recherche d'indices dévastés par les flemmes, tensions entre les différents services de police, cheffe de police -le rôle principal- hypnotique (l'actrice est remarquable). A cela s'ajoute la dimension mythique du feu. Film des plus recommandables donc. Reste que l'absence, m'a-t-il semblé, de la moindre note d'espoir, de la moindre possibilité aperçue de rédemption de la société tunisienne telle qu'elle est brossée dans la fiction de cet opus, en diminue la portée ?
Ce n'est pas bon, mais ce n'est pas complétement mauvais non plus. Nous étions deux, et nos avis se sont recoupés. C'est d'un mortel ennui, beaucoup de longueurs. On s'endort (littéralement). La fin est un mélange de mysthisime et de gag. Et on reste pantois. Mais pas dans le bon sens du terme . La catégorie thriller est usurpée. Je suis d'accord avec un avis précédent qui évoque qu'un court métrage aurait suffit, à défaut de mieux dans le scénario. Tout n'est pas à jeter néanmoins. Il y a du potentiel chez le réalisateur.
En Tunisie, s’il est indispensable de se faire entendre par les autorités, il est d’abord essentiel de se faire remarquer. L’immolation est probablement le testament le plus lumineux et le plus tragique que l’on puisse exprimer, dans la cité ténébreuse de Tunis. Youssef Chebbi, fait ainsi renaître Mohamed Bouazizi de ses cendres, à travers un regard vexé et humilié, qui a guidé la marche du Printemps arabe. En ce sens, « Harka » de Lotfy Nathan, amenait déjà le témoignage du deuil collectif qui a encore du mal à passer. Un Certain Regard est loin d’être la seule sélection cannoise à cultiver cette peine, qui hante toujours une nation, qui rêvait de la modernité et d’une autonomie qui profiterait à chacun. La réalité est pourtant dans les rues inhospitalières, une conséquence directe d’une malveillance institutionnelle.
Les colonnes de béton ornent les jardins de Carthage, un quartier stoppé net dans son idée d’améliorer le train de vie des habitants les plus aisés, au détriment de ceux qui doivent arracher un lendemain à leur existence éphémère. Par défaut, ce sera le bûcher qui viendra les délivrer de leur supplice. Si l’objectif de ces lucioles de braises a autrefois trouvé leur écho auprès de leurs semblables, Chebbi choisit de conter la démarche collective et inconsciente d’un peuple à l’agonie, à travers une succession de torches humaines, que les forces de l’ordre cherchent à rationaliser ou à simplement en étouffer la symbolique. La jeune Fatma (Fatma Oussaifi) piste ainsi les signaux lumineux, qui réveillent toute la cité tunisienne, que l’on sent égarée, pour ne pas dire fantomatique. Son obsession rencontre une mise en scène vertigineuse lorsque qu’il s’agira d’investir les lieux des crimes, commis dans le silence, afin que l’on revienne sans cesse sur ses pas.
La quête hallucinée de la police dévoile par ailleurs les limites de cette institution, qui trouve bien plus de temps à étudier les causes des décès que de raisons pour préserver l’intégrité des vivants. Chacun se relance la balle maudite, qui embrasera le possesseur le plus statique et le plus clairvoyant sur l’impasse qu’il a lui-même emprunté. Batal (Mohamed Houcine Grayaa) est de cette nature, avec la dose de corruption qu’on associera facilement au portrait-robot d’un coupable sans visage, car simplement défiguré par la colère et le chagrin qu’il contient. C’est donc tout un arsenal inflammable qui défile devant nous, avec des jeux d’ombre et une ambiance fantastique pour isoler les protagonistes. L’émotion y naît, de même que la fracture sociale qui nous empoigne et qui consume les craintes de chacun.
« Ashkal » est donc un polar halluciné, qui mêle les genres afin de calquer la confusion collective qui frappe les ouvriers, qui s’enflamme sans raison apparente. Le mystère reste entier, symbolique, religieux et le film détourne constamment les codes du thriller pour se plonger dans une peinture en mouvement et qui cherche sa forme ultime. Le souci est que tout cet amas de style est vain dans ses derniers instants. Le retour de bâton que l’on souligne perd toute sa hargne contre une poignée de cendre chaude. Il y a de quoi interpeller, mais jamais assez de matière pour nous laisser de vives cicatrices.
mazette! j'y suis allé à l'heure de la digestion. A éviter! Trop de non-dits, d'allégories, de symboles.... c'est beau, un peu facile, et terriblement ennuyant. J'ai failli m'endormir.
Comment une révolution peut être transformée en tragédie permanente .Avec une intelligence Ce premier long métrage de Youssef Chebbi est tout simplement excellent! Enfin autre chose que ce qui se répète en boucle sur cette belle révolution tunisienne mais pas que! Cette révolution qui avait entrainé des mouvements similaires à l'est comme à l'ouest de la Tunisie qui entonnaient ces deux vers de Abou Kacem Chebbi ajoutées en 1955 seulement à l'hymne national tunisien . "Quand un jour, le peuple décide la vie, le Destin ne peut qu'acquiescer à sa décision l m Merveilleux appel contre cette conception d'un Destin immuable auquel les hommes ne peuvent que se soumettre, tellement ressassée dans ce sud méditerranéen! Les répétitives scènes de prières en mosquée si intelligemment filmées jusqu'à celle des ablutions si "réalistes" viennent à point . Pour nous permettre de nous rappeler ces 2 vers là?
Une révolution commencée et interrompue, dans un quartier où Les Ben Ali et leur monde, avaient fait main basse, avec ces pharaoniques constructions inachevées et interrompues elles aussi; La mani're de filmer toute cette athmosphère est celle du documentaire! Mais un documentaite qui epouse le fantastique! Ce film qui aboutit à cette tragédie des révolutions inachevées , trahies , récupérés par des systèmes est digne des tragedies grecques. Avec ce feu impossible à eteindre qui nous dit inlassablement " ça brûle"..."ça brûle" pour ce peuple qui va décider de brûler aussi . Mais dignement. Sans se soumettre A la fin de ce film on a l'impression d'avoir le même visage ravagée de cette formidable policière Fatma Ousseifi ! Merci Youssef Chebbi et à ce qu'il promet!