Le film a obtenu le Prix de la Nouvelle Voix dans la section Un Certain Regard au Festival de Cannes 2023.
En Swahili, le nom Baloji signifie "sorcier", et même "sorcier qui peut s’emparer des pouvoirs des autres sorciers". Le réalisateur raconte : "C’est vraiment un nom épouvantable. Cela reviendrait à s’appeler « Diable » ou « Démon » en Europe. Alors à cause de mon nom, et parce que les gens me disaient sorcier, j’ai toujours été fasciné par l’occultisme et les personnes perçues comme différentes. C’est pour cela que Koffi, le personnage principal du film, a une tâche de vin sur le visage : je voulais matérialiser le poids de cette étiquette."
Il a fini par accepter son nom, et a appris qu'à l'origine au Congo, Baloji signifait "homme de science", et avait donc initialement un sens positif. C’est à partir du colonialisme que le mot a pris une connotation négative. Il ajoute : "Donc maintenant je m’en accommode. Et quand j’ai commencé à faire des films, j’ai décidé d’y insuffler du réalisme magique. Ça fait partie de moi, donc ça doit faire partie de mon langage cinématographique".
Né en 1979 à Lubumbashi (République démocratique du Congo) et vivant en Belgique, Baloji est musicien et cinéaste. En tant que musicien, il a sorti deux albums salués par la critique et deux EPs, et a été membre du groupe de hip-hop belge Starflams. Il est également acteur.
C'est après vécu au-dessus d'un vidéo-club de 1998 à 2006 qu'il s'est passionné pour le cinéma et a découvert de nombreuses oeuvres : "Je descendais tous les jours pour récupérer mon courrier et je parlais de films avec les gars qui traînaient dans le magasin. Ils m’ont fait découvrir des films aux rythmes très différents, comme Gerry de Gus Van Sant. Ça a été mon école de cinéma." Lui qui était déjà très intéressé par la musique, la mode et la direction artistique, le cinéma lui est apparu comme "le moyen d’expression idéal, combinant toutes mes passions dans une seule et même forme d’art". Augure est son premier long-métrage.
Synesthète, le réalisateur a accordé un soin particulier aux couleurs de son film : "Pour moi, tout est connecté aux couleurs. Bruits, ambiances... Tout a une couleur dans ma tête. Ainsi, chaque personnage du film a sa propre couleur : rouge foncé pour Koffi, comme sa tâche de vin. Paco est associé au rose, etc. On peut le voir dans les typographies que j’ai choisies pour présenter leurs noms à l’écran, mais aussi dans les filtres de couleurs que nous avons utilisés."
En collaboration avec Elke Hoste, le réalisateur a conçu les costumes du film, qui combinent des éléments issus de différentes cultures. Baloji explique : "Je voulais créer un triangle culturel. Il y a évidemment beaucoup d’éléments d’Afrique centrale, mais aussi des influences américaines : les costumes du défilé sont inspirés de Mardi Gras – nous sommes d’ailleurs allés à La Nouvelle-Orléans pour créer les masques – et des « Gilles », ces célèbres personnages folkloriques qui apparaissent au carnaval de Binche en Belgique. Enfin, des peintres surréalistes belges comme Magritte m’ont influencé, par exemple dans les scènes d’ouverture et de clôture."