La réponse est dans le film
Christine Paillard et Chad Chenouga se connaissent depuis de nombreuses années, puisqu’ils se sont rencontrés à la Classe Libre du cours Florent en tant qu’élèves. En 2007, ils co-réalisent un documentaire, consacré à un atelier d’improvisation organisé par Chad avec des sans-abris dans un centre d’hébergement à Nanterre. Le duo nous a déjà proposé deux très bons films dramatiques : De toutes mes forces et Le principal. Cette fois, ces 95 minutes nous sont racontées sur le ton de la comédie. Wisi est en galère. Il débarque à Bordeaux dans l’espoir de trouver un boulot et croise la route de Marina, une humanitaire au grand cœur. Pour se faire héberger chez elle, il prétend être un sans-papier. Un soir, il rencontre Jérôme, lui-même à la rue après le décès de sa mère. Malgré ses propos racistes et son étrange phobie de l’effort, Wisi accepte de le cacher pour une nuit chez Marina. Mais flairant le bon plan, Jérôme est bien décidé à s’incruster. Surtout depuis qu’il a découvert la combine de Wisi pour amadouer Marina… Aussi incroyable que cela puisse paraître, tout se tient et même très bien. Un scénario qui évite de trop déborder en évitant les dangers – souvent incontrôlés de la comédie débridée, en évitant tout pathos parfaitement inutile et sur tout en faisant confiance à un trio de comédiens en état de grâce. Franchement, une belle surprise. Et en plus, on sait pourquoi on sourit…
Le scénario a été inspiré par Les bons chiens de Baudelaire, dans lequel il fait l’éloge des chiens errants, marginaux et abandonnés. A l’image des canidés dont parlent le poète, les trois personnages commencent dans la solitude, créent des liens dans l’adversité et s’épanouissent ensemble. Le thème de la solitude face à l’adversité tout le film auquel s’ajoute celui de la famille de cœur, celle qui transcende les liens du sang. Bref, les cinéastes ont eu la sagesse de ne pas plaque par-dessus tout ça, une histoire d’amour, ou une simple bluette. D’un bout à l’autre l’humour est irrévérencieux, de celui qui grince et dérange. Et puis, je le répète, il y a les comédiennes et les comédiens qui nous régalent.
A commencer par Jean-Pascal Zadi, dont le doux sourire – celui du titre -, illumine le film. Sans doute son meilleur rôle à ce jour. Il trouve avec Emmanuelle Devos et Raphaël Quenard, évidemment, des partenaires à la hauteur. Madame Devos confirme tout son talent et Quenard n’en finit pas de grandir. Mais alors, quel ravissement de retrouver l’incroyable Judith Magre, bientôt 98 ans, dans un numéro de vieille dame indigne dont je me souviendrai longtemps. De l’excellente comédie sociale qui donne envie de vivre et… d’aller au cinéma.