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    Moi capitaine
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Moi capitaine" et de son tournage !

    Naissance du projet

    Selon Matteo Garrone, Moi capitaine possède, comme Pinocchio (le précédent film du réalisateur), la composante d'une fable homérique et d'un conte initiatique. Le cinéaste précise : "Il y a beaucoup de points communs avec Pinocchio. Je me suis rendu compte de cette proximité en tournant le film. Le personnage est incité par le grillon à partir de son foyer, il quitte sa maison et sa famille en cachette et va rencontrer la violence du monde."

    "Il y a aussi l'approche très réaliste, presque documentaire, qu'on avait dans Gomorra. Ce qui m'a poussé à faire ce film, c'est mettre en images une partie du voyage que l'on ne voit pas habituellement. Généralement, on voit le bateau qui arrive sur les côtes italiennes. Avant, on ne sait pas tout ce qui se passe. Je voulais partir de leur point de vue pour que le spectateur puisse vivre cette histoire avec eux."

    Plusieurs récits à l'origine

    Moi capitaine n'est pas tiré d'une histoire vraie précise mais est né du tissage de plusieurs récits de jeunes qui ont éprouvé la traversée de l’Afrique vers l’Europe. En les écoutant, Matteo Garrone a pris conscience que leurs histoires constituaient sans doute le seul récit épique contemporain possible : "Avant de réaliser ce film, je connaissais, par le prisme des médias, les péripéties et atrocités subies par les migrants au cours de leurs longs voyages."

    "Cependant, ces images concernaient quasi exclusivement la dernière partie du périple : des embarcations retournées en pleine mer, des cadavres flottants, des migrants désespérés implorant de l’aide, l’habituel décompte des morts et des vivants. Je m’étais malheureusement habitué à n’y voir que des chiffres, et non plus des êtres humains", se rappelle le réalisateur de Gomorra.

    Mostra de Venise 2023

    Moi capitaine a obtenu le Lion d'argent du meilleur réalisateur à la Mostra de Venise 2023, ainsi que le Prix Marcello Mastroianni du meilleur espoir pour Seydou Sarr à cette même cérémonie.

    Authenticité maximale

    Lors d’une visite d’un centre d’accueil de mineurs à Catane (Italie), Matteo Garrone a entendu le récit d’un jeune Africain qui, du haut de ses quinze ans, avait conduit un bateau jusqu’aux côtes italiennes, sauvant ainsi la vie de tous ses passagers. Le cinéaste précise : "J'ai voulu filmer dans la direction radicalement opposée de celles des médias. Embrasser la perspective et le point de vue de ces personnes pour narrer ce voyage épique, fait de vie et de mort. Pour pouvoir raconter de l’intérieur cette aventure pleine de dangers, il était nécessaire que je me plonge dans leur monde, si éloigné du mien."

    "Il m’a fallu pour cela construire une relation de collaboration constante avec tous ces jeunes, filles et garçons, qui ont vécu l’horreur et qui m'ont accompagné dans la construction du film. J’ai longtemps questionné ma légitimité à porter cette histoire, mais celle-ci est la leur. La clé était de pouvoir compter sur eux tant devant que derrière la caméra, afin d’être dans la démarche la plus authentique possible, loin de tout didactisme, en tant que messager discret."

    Une révélation

    Pour trouver l'interprète de Seydou, Matteo Garrone a effectué un long casting d'acteurs non-professionnels. C'est de cette manière qu'il a fait la rencontre de Seydou Sarr. Le metteur en scène a adoré sa spontanéité, son naturel et sa douceur : "J'ai vu qu'il pouvait donner au personnage une grande intensité, quelque chose de très humain, profond et spirituel."

    "J'insiste sur ce mot car il a interprété Seydou en lui donnant une dimension qui a trait à la Foi et à l'innocence et c'est la grande force du film. Il permet aux spectateurs d'entrer en empathie avec le personnage et de vivre avec lui. C'est la force du cinéma de pouvoir transmettre des émotions afin que le public puisse s'identifier au héros", se rappelle le metteur en scène.

    A l'origine, ce Sénégalais de 18 ans rêvant de devenir footballeur n'envisageait pas une carrière sur les planches ou devant une caméra. Sa mère, qui est professeure d'arts dramatiques, lui a toutefois transmis son intérêt pour le jeu. Lorsque Seydou a entendu qu'un réalisateur italien recherchait des comédiens pour son nouveau film, Moi Capitaine, il s'est présenté à l'audition.

    Mamadou Kouassi, consultant

    Mamadou Kouassi officie en tant que consultant sur le scénario de Moi capitaine. Il a rencontré Matteo Garrone en 2019 par le biais d’une journaliste qui l'a invité à une table ronde concernant les conditions de travail des immigrés dans le sud de l’Italie, au sein des exploitations agricoles. Il se rappelle : "J’ai moi-même travaillé dans le sud du pays, à Caserte, où je suis resté vivre. Lors de cette rencontre avec la journaliste, je lui ai parlé de mon voyage migratoire vers l’Italie. C’est à ce moment qu’elle m’a mis en contact avec Matteo, qui avait pour projet de réaliser un film au plus proche de la réalité."

    "À partir de mon récit, Matteo et deux autres scénaristes ont commencé à retranscrire la préparation de notre voyage avec mon cousin. J’étais passionné de football, lui voulait aller au Canada pour continuer ses études. C’est cet 'avant' qui manque à tant de films que Matteo voulait capter. Ils m’ont écouté tout au long de l’écriture et énormément questionné pendant le tournage pour comprendre ce voyage infernal. Notre exigence commune était d’avoir un vrai sens du détail jusqu’à expliquer les codes de langage que nous pouvions avoir durant la traversée afin que le film soit le plus réaliste possible."

    "Toucher les consciences"

    Mamadou Kouassi ajoute : "Le cinéma m’a ainsi permis de raconter notre histoire, notre souffrance, notre vie, nos traditions, nos cultures. Il permet de les partager aux générations actuelles et futures, de raconter ce rêve d’une Europe que nous imaginons comme une terre de liberté absolue. Le cinéma devient ainsi la voix des sans-voix. Ce périple m’a laissé de véritables cicatrices : la traversée du désert, les prisons libyennes, mais surtout la déshumanisation des hommes, capables du pire."

    "Aujourd’hui, le film me permet de raconter ma souffrance mais aussi celle d’autres personnes qui sont mortes dans le désert libyen et lors de la traversée de la mer Méditerranée. C’est aussi et surtout un moyen de toucher les consciences à l’international et engendrer, peut-être, une forme de changement."

    Chiffres-clés

    • 159 410 migrants sont arrivés par la Méditerranée par leurs propres moyens en 2022, ce qui représenterait 5% des migrants arrivés en Europe cette année-là.
    • Plus de 2 500 migrants sont morts ou disparus en mer Méditerranée entre Janvier et Septembre 2023, une augmentation de 50% par rapport à la même période en 2022. Plus de 26 000 personnes sont mortes ou disparues en mer Méditerranée depuis 2015.
    • 700 000 migrants de 71 nationalités différentes seraient actuellement en Libye. 65% sont originaires d’Afrique Subsaharienne, 30% d’Afrique du Nord et du Soudan, 5% d’Asie et Moyen-Orient.
    • 25% des personnes secourues par SOS MÉDITERRANÉE depuis 2016 ont moins de 18 ans, et 79% d’entre elles voyageaient sans parents.

    Tournage en Afrique

    Matteo Garrone n'a subi aucune pression lors du tournage en Afrique, et la difficulté principale a été de faire un film sur une culture qui n'est pas la sienne : "La seule solution pour le faire, c'était de le faire avec eux, avec des personnes qui venaient de ce monde. Il fallait les voir, les écouter, dialoguer avec eux et surtout de bâtir un rapport de confiance mutuelle."

    "L'autre difficulté était de diriger des acteurs avec lesquels on ne parle pas la même langue. Il a fallu que j'apprenne à bien comprendre si leur interprétation était vraiment juste. Il y a aussi des séquences d'action très compliquées, dangereuses, c'est une difficulté supplémentaire qui est aussi très enrichissante au moment du tournage", se rappelle le réalisateur.

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