Ce qui est notable avec ce film, c'est le déploiement de techniques pour créer l'illusion de réalité. Indéniablement, ces techniques sont bluffantes et comme il s'agit d'autre chose qu'un film de super-héros à la noix, on est surpris et l'on aime. Les acteurs aussi, en tête desquels Mark Ruffalo et Toni Collette.
Entre synopsis et bande-annonce, on connaît la base de travail du film (le clonage), et même un des grains de sable (la possibilité de "multiples"). Ça mènera souvent à une réflexion, qui vaut ce qu'elle vaut, sur la mort. Mais il y a d'autres grains de sable dans cette machinerie du futur, et pas des moindres (on ne peut pas les dévoiler à ceux qui n'ont pas vu le film).
L'auteur ne va pas chercher midi à quatorze heures pour introduire ces grains de sable : ce sont les tares que notre société connaît bien, d'hier et d'aujourd'hui. Elles s'expriment spontanément sur une planète fort fort lointaine, car l'espèce humaine ne date pas d'hier et ses tares sont aussi puissantes que son génie (se croire d'une race supérieure en est une).
Ce qui est amusant, c'est que les personnages du film nous rappellent indubitablement des personnes puissantes d'aujourd'hui, y compris l'invocation de Dieu à tout bout de champ, pour créer du liant avec les suiveurs. C'est une bonne part de ce qu'il y a d'amusant (c'est pourquoi ce film est qualifié de comédie). -Une autre part amusante tient dans le seul personnage joué par Toni Collette, du film Muriel (1994). Il y a quelques blagues comme cette amoureuse pas mécontente d'avoir deux Mickey, mais elles sont rares.
Le film est aussi qualifié de science fiction, parce que ça se passe loin dans l'espace. Mais il pourrait tout autant être qualifié de film d'horreur, tellement ces tares s'expriment de façon naturellement moche (il est vrai que ça ne se passe pas si loin dans le temps et que l'humain n'a pas eu le temps de se corriger). C'est là d'ailleurs qu'on reconnaît la patte de ce réalisateur (pour qui a vu Parasite par exemple).
Directeur qui aime les absurdités aussi (ou le romancier à l'origine de l'histoire?). Dès le début, la voix off nous dit qu'il a "postulé pour être 'remplaçable' parce que les macarons se vendent mieux que les burgers"... On n'en saura guère plus sur la gravité de la chose, mais il s'en fout, ce directeur qui joue avec nous. Il jouera jusqu'à la fin, en imaginant un être vivant de cette planète (qu'on a vite fait de qualifier d'affreux cafard) dont la puissance dépasse notre entendement (notre sens de la puissance).
Et c'est un film qui ne fait naître aucune émotion. C'est reposant, après les dernières sorties ciné !
A.G.