En voilà un bien beau premier film qui a le mérite de nous toucher en plein cœur avec beaucoup d’émotion et de vérité. En prenant comme thème - que l’on sent en partie autobiographique et vécu - les associations qui prennent en charge les adolescents chassés de leur foyer par leurs parents parce qu’ils sont homosexuel(le)s, bisexuel(le)s ou transgenres, Bryan Marciano nous interpelle sur quelque chose de méconnu du grand public. Il nous cause donc d’un sujet délicat mais terriblement important et utile. Même si, au fil des ans, l’acceptation d’une sexualité autre est de plus en plus répandue, il n’en demeure pas moins que de nombreuses familles rejettent encore leur progéniture à ce sujet que ce soit à cause de la religion, par incompréhension ou tout simplement par homophobie. Mettre en lumière ce type de problème et faire connaître l’existence de ces structures et une bonne chose. Si un documentaire aurait peut-être eu davantage d’impact, Marciano nous livre néanmoins un petit film de fiction plein de cœur et qui se révèle grand dans ses intentions et probant dans son exécution.
Un peu comme bon nombre de films à vertu sociale qui prennent place dans des endroits dédiés, « L’Arche de Noë » compte beaucoup sur sa dynamique de groupe avec un personnage qui va servir de point de repère, en l’occurrence ici celui de Finnegan Oldfield. Les exemples sont nombreux dans le cinéma français : du récent carton « Un p’tit truc en plus » sur le handicap mental (en version comique) ou « Patients » et « Hors normes » sur le handicap physique (en version plus tragi-comique) en passant par le magnifique « Les Invisibles » sur les laissés pour compte ou encore toutes ces œuvres sur les enfants placés en centre par l’aide sociale comme la récente comédie « La Traversée » qui prenait place sur un bateau, les exemples sont légion. Certes, on a un peu ici affaire à un catalogue de personnalités destinées à embrasser le prisme de différentes orientations sexuelles. Tous n’ont pas le temps d’être véritablement approfondi mais c’est l’ensemble de ces personnages reliés par une détresse commune et l’énergie du désespoir qui intéresse Marciano. Quelques clichés, facilités et maladresses persistent mais n’entachent pas la belle sincérité d’une œuvre juste et qui fait penser à (toutes proportions gardées) « 120 battements par minute ».
On est heureux de voir Valérie Lemercier dans un rôle plus sérieux. On ne se rappelait pas de l’avoir vue dans ce registre de récente mémoire. Quant à Oldfield, il est ici impeccable, ce qui n’est pas toujours le cas. Quant à la brochette de seconds rôles qui incarnent les résidents de cette arche pour jeunes abandonnés en raison de leur préférences sexuelles, elle illumine l’écran. Ils nous touchent, nous parlent et nous émeuvent. On pense à Melvin et son destin tragique joué par Victor Mermaz, bouleversant, ou à ce jeune transgenre tentant de faire fi des insultes et faisant tout pour s’acheter une voiture. Mais « L’Arche de Noë » n'oublie pas les sourires et la légèreté, voire même quelques éclats de rire, notamment lors des scènes de groupe où la joie de vivre et quelques répliques bien balancées font leur travail. Enfin, le final aux envolées lyriques sublimes et qui remontent énormément une réalisation sage jusqu’ici, confirme Marciano comme un jeune cinéaste à suivre. Une jolie petite surprise pleine de cœur et qui fait réfléchir sans chantage émotionnel.
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