Le fond.
Film en trois parties :
fête d'anniversaire de la mère de Brahim (présentation de Brahim, contexte de son existence), scène de violence (lynchage de Brahim), fête de mariage du père de Loïc (présentation de Loïc, tentative d'explication de sa participation)
(cf. la recension de "Yves G." à laquelle j'ajouterai que si Thomas manque à l'appel c'est parce que le frère de Brahim l'a débouté de façon assez radicale, comprend-on).
La genèse du film part d'un bon sentiment : rendre hommage à la mémoire d'un jeune homme lynché par des décérébrés alcoolisés parce qu'homosexuel, tout en dénonçant la sauvagerie, la violence, et l'homophobie. Ce faisant le film aborde plusieurs autres thèmes en filigrane : religion et homosexualité, communautarisme, rejet familial et homophobie ordinaire (celle qui consiste à être indifférent à l'homosexualité dans le showbiz – par ex. -, mais nie la présence d'homos dans le monde ouvrier ; celle qui se fout de l'orientation du voisin, mais trouve insoutenable, inacceptable, la gaytitude d'un fils, d'un frère, d'un père, etc.), dénonciation de la violence domestique et ses conséquences sur le développement des enfants, reproduction des comportements familiaux, poids sociétal, ravages de l'alcool, etc.
Que de bonnes intentions, mais voilà …
La forme.
Malgré le nombre et la qualité des thèmes, le scénario est très faible, condensé, concentré sur ces thèmes, alors il faut remplir. Le réalisateur aboutit à un court-métrage de 1h32, sorte de docu-fiction reconstitution d'un crime. Le parti-pris du temps réel, caméra à l'épaule suivant les protagonistes, ajoute à ce sentiment de longueurs ennuyeuses. La première partie se perd ainsi dans les méandres des préparatifs d'une fête de famille. Une meilleure maîtrise cinématographique et scénaristique aurait permis de présenter personnages et contexte beaucoup plus synthétiquement et tout aussi efficacement.
La deuxième partie (scène de violence sauvage, sans laquelle le film aurait fait un grand ploc) traine également en longueur et tourne très tôt en rond ! Malgré une certaine autocensure (ce qui est montré est probablement en deçà de ce qui s'est à maintes fois déroulé dans de tels cas – et c'est heureux, car finalement on ne peut pas montrer l'indicible -), le réalisme et le caractère plus que plausible (hélas !) font la force de cette séquence. Car, dans le cas présent, le spectateur se dit qu'ici, on n'est pas dans la fiction et c'est sans doute la grande force de cette séquence ! Mais la question que cela pose est : "à qui cette partie s'adresse-t-elle ?" Cela ne risque-t-il pas d'attirer des illuminés qui pourraient en jouir, voire s'en inspirer ?!
La troisième partie, reposant sur une idée originale (inspirée du fait réel ?) que je ne dévoilerai pas plus que "Yves G.", souffre du même défaut que les deux premières. Temps réel, style reportage, longueurs inutiles, caméra à l'épaule, dialogues faibles.
Vraiment dommage, car il y avait beaucoup de matière, mais peut-être peu de moyens ? On pourrait également s'étonner qu'un film belge francophone soit affublé d'un titre en Anglais !? Pour finir, je soulignerai la présence d'une pléiade d'étonnants jeunes acteurs plus vrais que nature dans des rôles difficiles : rejouer "Orange Mécanique" ne doit pas être simple. Bravo à eux, notamment à Vincent Overath.