Film épique. Film d’époque. Film sur le passé, le présent, peut-être même l’avenir. Il y a un souffle qu’il est difficile d’expliquer, un souffle qui se compare à un voyage dans le temps, voyage accentué par le coté impersonnel du noir et blanc, et une vision magnifiée par le style très sûr de Kurosawa. Ces acteurs au jeu soit théâtral, ou lyrique ou très sobre, comme on passe du rire aux larmes. J’ai rarement vu quelqu’un maîtriser à ce point le premier plan, l’arrière plan, et tout ce qui se passe entre l’un et l’autre, sans encombrer l’espace avec des effets inutiles. Une science du découpage qui devrait en inspirer beaucoup, ça grouille, ça vit, c’est tout le temps en mouvement, et le tout est fait avec la précision du compas dans l’œil droit et gauche. Certains samouraïs sont dans la lumière, d’autres dans l’ombre, et je ne suis même pas sûr que le vrai sujet soit ces samouraïs dont on parle tout le temps. Et Kurosawa ose même une digression : quel est le rôle de la femme dans tout ça ? Une bonne partie du film nous montre les rapports entre samouraïs, et entre paysans et samouraïs, et la préparation à la guerre, ou comment transformer de paisibles agriculteurs en soldats. Une autre façon de dire que l’union et la discipline font la force, pitch universel s’il en est. Et nous voyons devant nous les paysans et mercenaires se transformer en abstractions symboliques. Une musique timide qui surgit par à-coups, comme pour mieux rythmer les mouvements de la symphonie pastorale qu’on a sous les yeux. Le remake est un western original, l’original est un film sans âge, qui parle d’un conte et d’une légende, raconté avec ambition, en mettant l’accent sur comment ce qui est dit doit être montré. Superbe. Et jamais trois heures treize ne m’ont parues aussi courtes. A bon entendeur, salut !