Tokyo de nos jours, Hanako, jeune citadine arrive en retard au réveillon du nouvel an, dans un grand hôtel, où ses sœurs, parents et grand-mère en tenue traditionnelle sont impatients de la voir, elle et son fiancé.
Mais surprise, pas de fiancé, Hanako a rompu dans la journée. Hanako a presque 30 ans.
Dans le monde des Aristocrats, il est déplaisant qu’une femme presque trentenaire n’ait pas trouvé un mari à cet âge. Une femme suit quelques études qui doivent lui permettre de trouver un époux. Un époux qui lui assurera sa tranquillité dans une vie bien établie, avec tout le confort que l’argent sait procurer.
Cet époux, et c’est convenu, ne sera pas forcément l’amant attendu, car lui de son coté, aura le droit de trouver maitresse.
Hanako va trouver l’époux attendu. C’est Koichiro, issu d’une famille aristocratique d’un niveau plus élevé que celui dans lequel elle évolue. Koichiro, et sa famille, condescendent, après enquête de moralité, à accepter Hanako dans la famille. La seule chose demandée, c’est d’assurer la descendance et mâle de préférence.
Koichiro, le mari, il a lui une destinée toute tracée : il est d’une famille de politicien. Donc après avoir été le secrétaire de son oncle député, il deviendra lui aussi député.
Troisième personnage dans aristocrats : Miki, autre jeune femme, a moins de chance que Hanako. Difficile pour elle et sa famille provinciale de financer des études à Tokyo. Il faut qu’elle trouve des boulots de complément et ne pas être trop exigeante sur ce qui lui est proposée.
Pendant deux heures le film suit ces trois personnages qui vont se croiser, se connaitre, et se quitter plusieurs fois.
The aristocrats est un film réalisé par Yukiko Sode. Elle n’a qu’une quarantaine d’années et c’est son troisième long métrage.
Yukiko Sode nous montre les différences de classe qui existent dans le Tokyo contemporain.
Typiquement, des scènes de repas ponctuent le film. Elles mettent en évidence, d’un côté les codes, enfin ce qui est communément appelé « les bonnes manières » de cette aristocratie, et de l’autre l’absence de manières des milieux plus populaires : on parle en appelant une serveuse, on mange directement dans un tupperware. Pour les premiers, les déplacements se font en taxi ; pour les autres, c’est vélo et métro.
A un moment du film Hanako, découvre un quartier de Tokyo qu’elle ne connait pas, alors qu’elle est née à Tokyo et y a passé toute sa vie. Imaginez, qu’un habitant du 16ème de Paris, n’ait jamais franchi la Seine, où qu’il n’ait jamais été à Barbès.
De même pour les restaurants des hôtels de luxe d’un côté, et les bistrots izakayas bon marché de l’autre.
Hanako découvre un monde qui du fait de sa « classe » lui a été caché.
Au final ces oppositions, montrent que bien que ces femmes de l’aristocratie aient un mode de vie supérieur, il apparaît qu’elles obéissent souvent à une mode jugée dépassée ou ringarde. Plus la classe d'une femme est élevée, plus les attentes sont élevées et moins d'options s'offrent à elle.
Outre ces trois principaux personnages très « marqués » par leur classe, Yukiko Sode dépeint des personnages secondaires beaucoup plus nuancés : Itzuko, la violoniste amie d’Hanako, née dans une famille très bourgeoise, vit à l'étranger, et ainsi porte un regard extérieur sur ce milieu.
Kuhata, l'amie de Miki à l'université, est pleine de vitalité, très intelligente, se lançant dans la création d’entreprise ; mais il est difficile pour des femmes comme elle de trouver leur juste place au sein de la société japonaise. « Elle est pourtant représentative de la majorité des femmes au Japon » nous dit la réalisatrice.
Yukiko Sode, nous fait découvrir ce monde séparé où grande bourgeoisie, et milieu plus modeste vivent à coté mais traditionnellement évitent de se côtoyer. Finalement un monde de caste englué dans des traditions étouffantes mais qui permettent de conserver l’entre soi. Sa sensibilité, nous laisse entrevoir que cela peut changer, et que ce sont les femmes, et elle seules qui sauront faire bouger les lignes dans ce Japon, où cohabitent le monde des nouvelles technologies, un monde moderne, avec celui traditionnel attaché à des traditions qu’il ne saurait être de bon gout de ne pas respecter.
Les trois acteurs principaux sont excellents. Les secondaires le sont tout autant.