Premier long métrage de la réalisatrice suisse Carmen Jacquier…un film esthétiquement très beau, au sujet pas vraiment facile à traiter…En 1900, à la mort de sa sœur ainée, Elisabeth doit quitter le couvent où elle est novice depuis cinq , à l’aube de prononcer ses vœux, pour remplacer sa sœur Innocente qui est décédée dans des circonstances floues, qualifiée d’enfant du diable par tout le village …Rentrée à la ferme, Elisabeth découvre le journal intime de la disparue, et la sensualité qui l’irradie, réprouvée pas sa famille et par le village. Son regard sur la vie et sur Dieu se métamorphose…, Elisabeth se lie d'amitié avec trois jeunes hommes et une ferveur sexuelle prend alors contrôle de son corps. Et quoi de plus bruyant que le désir féminin qui s’éveille ? Malgré les regards inquisiteurs, une bouleversante amitié se met en place au sein du quatuor. En découlent des scènes d'une extrême sensualité où les corps assouvissent leur curiosité et s’apprivoisent avec tendresse. Sans jamais tomber dans une banale représentation des premiers émois, « Foudre » aborde de manière sensorielle et pudique la jouissance autant émotionnelle que sexuelle d’une jeune femme en construction…. Carmen Jaquier s’attache à filmer la nature et la chair tels des instruments aptes à accéder à une transcendance — que celle-ci s’appelle Dieu ou n’importe quoi d’autre. Et si Dieu était l’autre nom du désir ? Le décor et les corps s’emboîtent, s’offrent une danse charnelle, aiguisent les sens. L’image vibre et palpite pour raconter l’épreuve de la chair, la découverte du plaisir et des corps jouissants en pleine nature loin de la morale des hommes.
Carmen Jaquier a tourné dans de somptueux paysages de montagne pour conter cette histoire de désir, de sa répression, sociale et religieuse, à sa libération dont le prix est élevé… La grande réussite de ce « Foudre » tient dans sa mise en scène épurée, parfois allégorique, ses partis pris marqués, sa photographie, ses cadres et son montage où la nature devient un temple qui vibre à l’unisson des corps libérés et des chœurs chantants. Un premier film d’une beauté incandescente.