La suisse Carmen Jacquer propose son second long-métrage, sept ans après « Wonderland » qui inscrivait le film catastrophe dans un espace résolument auteuriste. Cette fois, changement radical de registre avec « Foudre » mais toujours un traitement très pointu, pas forcément facile d’accès voire même presque rebutant. Le film se déroule en 1900 et pointe du doigt l’impact négatif, sournois et implacable de la religion sur la population d’un petit village perdu dans les montagnes. Une jeune fille est rappelée du couvent suite à la mort de sa sœur, taxée d’amie du Diable à cause de sa sexualité débridée pour l’époque. Cette jeune fille et jeune sœur (dans les deux sens du terme) va se poser des questions sur ce décès et sa rencontre avec trois garçons du village va la confronter à ses propres désirs et premiers émois sexuels. Religion et sexualité n’ont jamais fait bon ménage et le film se propose de montrer l’étau qu’une famille et un contexte pieux pouvaient avoir dans le temps sur les plus jeunes, entre frustration, incompréhension et désobéissance.
Le sujet est passionnant et a déjà été traité par le passé dans mal d’œuvres majeures. Rien que l’an passé, le « Benedetta » de Paul Verhoeven avec Virginie Efira avait fait grand bruit (et surtout scinder son audimat). Il montrait pourtant parfaitement l’emprise et le regard que l’Église catholique, puisqu’ici il est question de la religion catholique, portait sur la sexualité débridée et des velléités hédonistes et épicuriennes, notamment concernant les femmes. Jaquier montre bien la pression de la religion sur chacun, une pression qui s’est transmise de génération en génération. Dès lors qu’une jeune fille devient maitresse de son corps et de ses désirs, elle prenait le risque d’être diabolisée. Cependant, dans « Foudre », une fois ce constat lentement établi, rien de plus ne tourne autour et ne vient enrichir le sujet initial. Le propos est mince et se limite à son résumé, aboutissant à un long-métrage qui tourne en rond et ne peut plus compter que sur ses afféteries visuelles.
Et à ce titre, il faut s’accrocher tant la forme est solennelle et austère. Cela rend le film hermétique et presque déplaisant. Le contemplatif peut avoir du bon et nous cueillir, s’avérer même envoûtant parfois. Sauf qu’ici il ennuie et s’avère redondant, comme l’aveu de faiblesse d’une œuvre qui n’a pas grand-chose à dire et ne peut plus compter que sur des gimmicks visuels empruntés à un cinéma d’auteur, voire de festival, d’un autre temps. Dans « Foudre », l’aspect picaresque propre au récit bat son plein et le côté bucolique n’est pas toujours bien mis en valeur, les images semblant ressasser encore et toujours les mêmes décors. Quant à la fin ouverte et abrupte, on n’en attendait pas moins mais elle nous conforte dans le fait que ce type de cinéma ne trouvera guère beaucoup d’adeptes à moins d’une poésie vaguement présente qui ne nous aurait pas touché. Dommage car le temps de deux ou trois fulgurances de mise en scène et moments éthérés (le sublime moment de caresses en apesanteur entre les quatre adolescents), on y aurait presque cru.
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