Ma nuit : les secrets du tournage

Ma nuit est le premier long métrage de Antoinette Boulat, qui possède une longue expérience en tant que directrice de casting. Elle explique : "J'ai toujours vécu cette activité de directrice de casting comme une étape. J’ai commencé avec Ponette et les choses se sont enchaînées. J’ai eu la chance de travailler avec des réalisateurs dont j’admirais le travail et qui savent prendre des risques. Le choix d’un acteur est déjà un choix de mise en scène. En partageant avec eux ce processus de casting, cela m’a permis d’acquérir une confiance qui m’a conforté dans la direction d’acteurs, mais aussi dans le fait de préserver son instinct tout au long de la réalisation d’un film."

Avec Ma nuit, Antoinette Boulat a voulu filmer la jeunesse d’aujourd’hui qui est, selon elle, en deuil de son innocence : "Elle est adulte, très consciente du monde et porte un regard presque philosophique sur son environnement. Elle est obligée de se poser des questions et de s’engager. Comme Marion, elle n’évolue pas dans un monde qui lui ressemble. Elle cherche à le changer ou à s’en affranchir. Mais le chemin pour y arriver est violent parce que le monde est violent. Cela faisait écho à mon souhait de parler du deuil d’une sœur qui est aussi une perte d’innocence."

Antoinette Boulat explique pourquoi elle a choisi Lou Lampros pour se glisser dans la peau de Marion : "Je voulais filmer un visage qui soit fascinant. À priori, la personnalité de Lou Lampros était loin du rôle. Finalement, c’est exactement pour cette raison que je l’ai choisie. Suite aux essais, je me suis rendue compte que je devais aller vers quelqu’un de très vivant. Marion souffre, est mélancolique, mais n’est pas déprimée. Lou bouillonne, elle est un peu une force tranquille à la Monica Vitti. Elle n’a peur de rien et ne se détermine pas par rapport aux autres. Elle a quelque chose de sauvage, de toujours sincère."

Antoinette Boulat a remarqué Tom Mercier dans Synonymes de Nadav Lapid. Elle recherchait pour le rôle quelqu’un qui soit très différent du monde de Marion. Alex, c’est l’étranger, l’inconnu et l’altérité : quelqu’un qui la connecte au reste du monde. La réalisatrice précise :

"C’était important d’ouvrir le film sur quelque chose de plus universel. Aujourd’hui nous ne pouvons plus faire abstraction des autres à cause des crises que nous traversons. Quand Tom a lu le scénario, il m’a dit une chose dont je ne m’étais pas rendue compte : 'Marion est dans la mort, fascinée par la vie, et Alex dans la vie, fasciné par la mort'."

Antoinette Boulat a voulu représenter un Paris désert et silencieux qui va à l’encontre de la ville qu’on connaît, bruyante et habitée. La cinéaste confie : "J’ai fait entrer la nature par des sons, loin de l’environnement urbain habituel. J’aime la nuit, c’est un paysage cinématographique, et il a fait partie très naturellement de l’écriture du film. Mais la nuit à Paris est orange à cause de l’éclairage public."