Graffeur en rébellion contre les membres de la haute-société londonienne souvent bien éloignés de l'image médiatique positive qu'ils voudraient renvoyer, Toby s'introduit dans leurs demeures en compagnie de son meilleur ami Jay pour apposer son tag fétiche "I Came By" et ainsi mettre à mal leur position d'intouchable.
Quand Jay décide de le quitter pour assumer son rôle de jeune père, Toby décide de continuer seul et prend pour cible un juge réputé pour ses lois en faveur des migrants mais dont la famille a une lourde réputation pro-colonialiste. Dans sa maison, il découvre l'impensable...
Continuant son exploration du cinéma de genre après "Under the Shadow" et "Wounds", ce troisième long-métrage de l'anglo-iranien Babak Anvari reprend un postulat qui a décidément le vent en poupe depuis "Don't Breathe", celui du home invasion inversé où l'intrus se transforme en victime devant une situation bien plus terrible que ses propres agissements. Rien de bien neuf a priori donc et, durant sa première partie, on ne peut pas dire non plus que "I Came By" fasse dans la dentelle en nous présentant son duo de meilleurs amis graffeurs sur le point d'imploser, l'un choisissant la voie de la responsabilité pendant que l'autre, immature au possible, mériterait clairement de passer entre les mains de "Pascal le Grand Frère" (pas aidé par la prestation tout en excès d'un George MacKay d'habitude bien plus inspiré, avoir 30 ans pour un rôle d'ado tardif de 23 ans rend aussi ça très bizarre). Cependant, le film dessine déjà en filigranes des thématiques sociales bien plus prononcées qu'à l'accoutumée pour une telle histoire, où la rupture entre jeunes et parents (pour des questions de traditions et/ou d'incompréhension) va se mêler à celles de notables bien implantés en vue de commettre le pire derrière les murs de leurs belles bâtisses.
Ces deux aspects vont très vite devenir le socle d'un récit qui va en réalité déjouer nos attentes de tension facile et immédiate en inscrivant celle-ci sur un long-terme peu orthodoxe, dans un récit en forme d'action/réaction où la main mise tentaculaire de son prédateur va sembler toujours plus inamovible face à tous ceux qui se mobilisent contre elle. En cherchant évidemment à traduire la difficulté de s'attaquer à une figure considérée comme toute puissante avec tous les plus néfastes et dévastateurs obstacles que cela peut induire, "I Came By" va donc tirer une vraie force dramatique de cette construction en escalier en la poussant à chaque fois vers une marche toujours plus inextricable vis-à-vis de ses multiples personnages développés sur la durée de cette épreuve de plus en plus éprouvante.
Certes, à l'instar de son génie machiavélique superbement campé par Hugh Bonneville, celle-ci commet quelques maladresses en cours de route qui la mettent parfois en danger (notamment sur la manière de signifier ses repères temporels) et en dévoile un peu trop avec insistance pour bien cadenasser ses préoccupations thématiques à sa progression, occasionnant même quelques baisses de régime, mais, dans l'ensemble, "I Came By" tient plutôt bien la route et sait très bien faire monter la sauce dans ses moments de plus vive tension tout en s'attardant sur l'état de désemparement total de ses protagonistes face à un monstre conscient de son pouvoir (de la mère à Jay en passant par l'inspectrice de police, Babak Anvari offre à tous l'opportunité de dévoiler leurs détresses respectives, épaulé par un bon casting).
Même s'ils restent assurément perfectibles, la mécanique plutôt originale choisie par "I Came By" et les rouages sociaux sur laquelle elle s'appuie permettent au film de se hisser sans mal au-dessus de la mêlée de bon nombre de thrillers made in Netflix.