Il n'est pas simple de rendre compte d'Évolution, peut-être le film le plus ambitieux de Kornel Mundruczo, et encore plus difficile de prétendre l'aimer, tellement il est perclus de douleur, parfois rentrée, dans cette évocation de la judéité, aujourd'hui. Conçu comme un triptyque, le film commence par une évocation indirecte et sidérante de la Shoah, avec un ensemble de scènes difficiles à supporter. Presque muette, cette première partie n'a rien à voir avec la suivante, située bien des années plus tard, marquée par la confrontation verbale entre une femme et sa mère. C'est une troisième génération qui reprend le flambeau, enfin, dans un dernier segment tourné vers l'avenir et qui, sans faire table rase du passé, ne le considère plus comme un traumatisme. Le côté inégal d’Évolution, avec notamment sa partie centrale très bavarde, est un frein à l'attention que l'on souhaiterait accorder au film, lequel ne ressemble guère à ceux, déjà nombreux, qui ont pris pour sujet la Shoah, soit dans sa représentation la plus atroce, soit dans ses conséquences sur le long terme. Pour les non juifs, et malgré un côté exigeant, de par sa noirceur, c'est tout de même l'occasion d'approcher de manière viscérale une tragédie qui s'est muée pour les générations d'après en des sentiments complexes, qui vont de la honte au déni, Et à chacun de s'y investir, ou pas, selon ses propres sensibilité et compréhension.