Pour quelle raison Ishak a-t-il quitté son village il y a 7 ans ? En tout cas, depuis, ce joueur de Bağlama parcourt l’Anatolie à moto pour gagner sa vie, jouant pour des mariages ou dans des boites de nuit. Une nuit, alors qu’il accompagne une chanteuse dans une boite de nuit, un appel téléphonique de l’oncle Nazmi lui apprend que sa mère est très malade, que, cette fois ci, c’est très grave et qu’elle souhaite le voir une dernière fois. Suite à cet appel, Ishak va arriver à temps. Arriver à temps pour entendre sa mère regretter de ne pas avoir contredit son mari qui, avant le départ d’Ishak, n’avait pas voulu qu’il épouse Sultan « l’orpheline » qui, pour lui, n’était pas convenable, pour l’entendre dire, aussi, qu’elle ne voulait plus entendre parler d’une certaine nuit. Dans ce film tourné en Scope et qui, par maints côtés, s’apparente à un western, les mouvements de caméra sont très discrets, comme est très discrète la musique d’accompagnement. Le réalisateur a l’intelligence de ne rien surligner, au point de nous laisser dans le doute quant à l’implication d’Ishak dans ce qui s’est passé lors de cette fameuse nuit entraperçue au début du film et retrouvée plus tard. On se sent pris dans l’atmosphère souvent poisseuse de ces montagnes d’Anatolie, une région reculée dont Özcan Alper décrit sans fausse pudeur la rudesse des relations, avec un racisme assumé qui fait rejeter tout ce qui vient d’ailleurs, avec une phallocratie sans complexe qui arrive à contraindre une jeune femme à épouser un homme pour lequel elle n’a aucune estime et encore moins d’amour. Voilà un film qui permet à Özcan Alper, son réalisateur, de prendre place parmi les grands réalisateurs turcs du 21ème siècle, aux côtés de Nuri Bilge Ceylan et de Semih Kaplanoğlu. critique complète sur https://www.critique-film.fr/critique-express-nuit-noire-en-anatolie/