Cette adaptation contemporaine de l’œuvre du Marquis de Sade est sans conteste un très bon film.
Si la nature même de ce long-métrage est d'être immonde au plus haut point, aucune scène ne m'a parue véritablement insoutenable. Nombre de films d'aujourd'hui sont bien plus explicites, bien plus traumatisants : on ne voit quasiment pas de sang dans ce qui est sensé être le "Cercle du Sang", il n'y a aucune scène explicitement pornographique, le cinéaste se contente de montrer les acteurs nus, dans l'affreuse froideur des décors et de l'ambiance, et les quelques scènes de sexe ne dévoilent rien. Le "Cercle de la merde" est selon moi le plus dégoûtant et le plus immonde de tous ; un des défauts du film est le fait que, passés l'horreur et le dégoût profond suscités dans les premières minutes de chaque Cercle, la suite des atrocités qui se déroulent sous nos yeux devient presque banale, même si le spectateur reste évidemment profondément dégoûté par ce qu'il voit.
Le défaut majeur que je trouve à ce film est le quatrième Cercle. Je le trouve absolument bâclé, pas assez développé ; je sais bien que des bobines ont été volées, et une partie de ce dernier acte a peut-être été perdue. Seulement, le résultat final est bien là, et le "Cercle du Sang" est pour moi mauvais, je m'explique. Cette dernière partie est sensée être le paroxysme de l'horreur et du dégoût, le moment où les quatre aristocrates font subir leurs ultimes sévices à leurs pauvres victimes, avant de les exécuter. Le choix de montrer lesdits sévices au travers de petites jumelles derrière lesquelles les immondes sadiques contemplent avec jouissance la torture des victimes est intéressant, car il permet au cinéaste de signifier au spectateur que ces gens sont malades, que les barreaux qui séparent les supplices des quatre hommes ne sont que la métaphore de leur enfermement, de leur maladie (le sadisme, c'est à dire le fait de jouir de l'humiliation, de la dégradation et de la souffrance des autres, étant aujourd'hui considéré comme une pathologie psychiatrique, pour rappel), et les rappelle à leur humanité, à cette faiblesse qui les force à n'être que les spectateurs faussement jouissants et non pas les acteurs de cette violence. Cependant, et c'est là le plus gros défaut que je trouve dans ce dernier acte, toutes ces violences, toutes ces horreurs et tous ces supplices sont sensés avoir pour accomplissement, pour paroxysme, pour finalité, l'exécution froide des dix-huit victimes, aboutissant à la jouissance suprême des bourreaux. Mais non, ce ne sera pas le cas : la seule mort sera une jeune fille pendue, vue de loin. Ne croyez pas que je n'attends qu'une chose, c'est de voir le sang couler, que je suis un spectateur en quête de meurtres de sang-froid : simplement, ç'aurait été selon moi la meilleure manière de finir le film. Le meurtre de sang froid de ces adolescents, ignoble, irregardable, insoutenable, provoquant l'ultime satisfaction orgasmique des bourreaux. Car c'est ça, le sadisme !
Ce film demeure très bon, et un passage obligé pour tout cinéphile s'il en est.