La construction de "Careless crime" est très particulière, le réalisateur prenant manifestement un plaisir immense à égarer les spectateurs. Il serait vain d’essayer de raconter et, encore moins, d’expliquer tous les tours et détours qu’il utilise pour y parvenir. En essayant de faire au plus simple : dans "Careless crime", 3 récits sont menés en parallèle, le film passant à chaque fois abruptement de l’un à l’autre. Le premier récit, c’est l’histoire de quatre « pieds nickelés » qui se préparent à mettre le feu à un cinéma qui va projeter un film ayant pour titre … « Careless crime ». Le deuxième récit, c’est celui que raconte ce film, une histoire de militaires tombant en panne dans un lieu quasi désertique mais proche toutefois d’une source appelée source aux balais, auprès de laquelle deux jeunes femmes se préparent à projeter un film, ces militaires se montrant par ailleurs fort contrariés par la chute d’un obus tombé dans le voisinage et qui n’a pas explosé. Le troisième récit nous entraine auprès du public qui attend la projection de « Careless crime » et d’une jeune femme qui veut se débarrasser d’un lot d’affiches avant d’aller, elle aussi, voir le film alors que sa mère a un rendez-vous avec un éventuel soupirant.
Le problème c’est que cette façon de parler de "Careless crim"e donne l’impression qu’on a affaire à un film dont la réception est d’une évidente simplicité alors que la vérité est toute autre, avec des moments, par exemple, où l’histoire tourne en boucle, passant et repassant plusieurs fois le même dialogue dans une situation identique et, surtout, une notion de temporalité qui devient de plus en plus floue : c’est ainsi qu’au début, on pense que le premier récit est contemporain avec, en particulier, un des pyromanes qui cherche à s’approvisionner en drogue et qu’on dirige vers le musée du cinéma où la personne qu’il recherche s’avère être une immense marionnette, mais, plus le film avance, plus on se demande s’il ne s’agit pas du récit le plus fidèle possible de ce qui s’est réellement passé le 19 août 1978. Avec" Careless crime", Shahram Mokri montre une fois de plus que, tout réalisateur iranien qu’il est, il est beaucoup plus proche d’un David Lynch que de Asghar Farhadi.