Je vois pas mal de gens s'enflammer sur The Killer de Fincher, franchement, je suis dubitatif. Ok, c'est pas mal, mais sûrement car on a beaucoup de trucs pourris en ce moment, et je crois que si ce film était sorti il y a 30 ans, il aurait passé aussi inaperçu que The American avec Clooney en son temps (qui était au demeurant un film plutôt bien).
The Killer c'est tout d'abord un scénario minimaliste et déjà vu. Ok, je pardonne un scénario minimaliste, mais il faut de l'originalité. Là, c'est minimaliste (un tueur qui tue), déjà vu (vraiment la rengaine !), d'une lenteur incroyable (le délayage pour atteindre les 2 heures est colossal), et en plus bourrelé d'incohérences (le tueur froid qui bavarde 3 plombes avec sa victime, qui répète "0 empathie" tout le temps mais se trimballe une sorte d'amante-petite copine-fille adoptive on sait pas trop...) et dénué de suspense puisque le héros (ou anti héros) est un monolithe. Il n'a en effet qu'une personnalité extrêmement limitée, et malheureusement quasiment tout dans le film est prévisible pour cette raison une fois qu'on l'a cerné. Sans compter la fin. Perso je m'attendais à un rebondissement à la fin impliquant l'un des personnages de l'introduction, mais non, ce rebondissement n'arrive pas et donc le film se clos bêtement. Côté casting, si Fassbender est bon, froid comme il faut (mais bon, c'est pas un rôle de compo non plus car il a 0 expression tout du long), les autres acteurs sont bien meilleurs mais malheureusement sous exploités (Tilda Swinton, on sent qu'on a délayé sa scène pour la garder un peu à l'écran mais quel dommage que son perso passe si vite!). Les personnages secondaires sont aussi bien plus intéressants et dégrossis je trouve que le principal, mais ils se succèdent et passent en quelques scènes. Dommage.
En fait, The Killer se veut un exercice de style formel, et de ce point de vue, tout n'est pas à jeter, mais tout n'est pas non plus suffisamment parfait pour faire passer la pillule d'un scénar osef. Par exemple la grosse séquence d'action du film (la seule) au milieu, elle est intense, mais parbleu, que la photographie est sombre ! On voit à peine qui tape sur qui, qui se blesse, qui valdingue, c'est incroyable! De manière générale le film dégage un côté assez maniéré qui en fait un produit un peu trop fabriqué, et le manque de budget probable le dessert. Par exemple, dans les décors. On voyage beaucoup, mais à chaque fois on passe 90 pct du temps dans un immeuble desaffecté (Paris), dans un bureau d'avocat, dans une impasse d'un quartier pauvre (Nouvelle-Orléans), dans un appart grand luxe (New York), et on ne voit rien de ces villes ni guère de leur ambiance. On se demande même si ça a été tourné vraiment sur place. Quant à la bande son, il n'y en a pas, mais le film a apporté un certain soin aux trucages sonores.
Mon point de vue sur The Killer ? Eh bien Fincher a utilisé le scénario le plus éthique que le cinéma nous ait proposé ces 20 dernières années pour en faire un exercice formel à sa sauce. C'est pas dégueux, la mise en scène est affutée, il y a de bonnes fulgurances, mais globalement ça reste en-deça, par exemple, sur un sujet similaire et dans une ambiance approchante, d'un Collatéral ou même, par certains aspects, de The American. C'est propre, mais ça fait film de plateforme indubitablement, et il fallait vraiment un travail visuel d'exception pour faire oublier la vacuité du fond. Fincher, à mon sens, n'y arrive qu'à moitié. 3.