“Jusqu’ici tout va bien !”
En titre de ma critique, je paraphrase la tagline du film “Assassin(s)” de Mathieu Kassovitz à savoir : “Jusqu’ici tout va bien”. Effectivement, tout va pour le mieux dans la vie de celui que l’on surnomme “The Killer”. Durant un prologue parisien et nocturne du plus bel effet, en attendant l’arrivé de son contrat, ce tueur à gages campé par le formidable Michael Fassbender, nous fait partager - à l’aide d’une voix off (la sienne) - avec un mélange de philosophie et de pragmatisme, les rouages du monde de ce que j’appelerai “l’assassinat tarifé”. En bon monomaniaque, il nous fait aussi partager sa playlist musicale consacrée intégralement au groupe “The Smiths” et son iconique chanteur Morrissey. En quelques minutes - qui pourront paraître une éternité pour celui qui s’attend à du défouraillage tous azimuts - David Fincher - par l’entremise de son anti(héros) principal - nous assène un cours magistral sur la longévité (voire plutôt la survie), dans un milieu professionnel hostile, parce que versatile. Et puis, sans crier gare, l’impensable vient de se produire sous nos yeux. Pour la première fois, le tueur rate sa cible. La mécanique bien huilée - tant vantée - dans cette malicieuse entrée en matière, vient de subir les assauts de l’infortune.
Les représailles ne tarderont pas à arriver, à commencer par la compagne du tueur.
Dès lors, devenu lui-même la cible, le tueur remonte pas à pas la voie hiérarchique jusqu’au commanditaire de son contrat en semant la mort sur son passage.
Durant 1h45 (le prologue en moins), David Fincher filme l’expédition punitive d’une impitoyable machine à tuer. Rien ne l’arrêtera dans sa quête de vengeance, pas même certaines personnes innocentes, au mauvais moment, au mauvais endroit. De Paris, à la Nouvelle Orléan, de la Floride à Chicago en passant par la République Dominicaine, “The Killer” puise toute sa puissance narrative, pas forcément dans ses scènes d’exécutions, tant le cinéma nous en a abreuvé au fil du temps - mais plutôt dans ses instants de traques, quand le tueur et nous spectateurs, savons que la proie n’est pas loin. Il n’en reste pas moins que certaines scènes de confrontation sont impressionnantes (voir la baston nocturne dans une villa de Floride). Parfois dans une posture James-Bondesque, “Skyfallienne”, on en viendrait presque à fantasmer que Fassbinder endosse le costume d’un 007 à l’aura aussi dangereuse et mystérieuse que ce tueur façon Fincher.
Comme si le côté thriller brut ne suffisait pas, le récit - comme en prolongement des dénonciations du prophétique “Fight Club”, dresse un cinglant portrait d’un monde violent, ultra-connecté et soi-disant ultra-sécurisé, que le réalisateur et Andrew Kevin Walker, son scénariste - au travers du parcours du tueur - ne cesseront d’en démontrer les failles et les faiblesses !