Harper, jeune femme traumatisée par la mort brutale de son mari violent et malade, part se ressourcer au fin fond de la campagne britannique. Elle fait alors la rencontre de plusieurs hommes étranges. Son séjour vire, lentement mais sûrement, dans le registre de l’inquiétant et du délire.
Amis du cinéma métaphorique capillotracté, bonsoir! Ce « Men », thriller psychologique signé Alex Garland, esprit à l’origine du sensationnel « Ex-Machina », saura vous abreuver de symboles jusqu’à plus soif.
Dans une mise en scène très « naïve », le réalisateur britannique démontre une nouvelle fois son talent dans le maniement de l’image. L’isolement, la solitude sont grandioses. L’horreur, dans un écrin de verdure et de lumières bibliques, est puissante. La photographie, aux symétries épurées et kubrickesque est léchée. La bande son, toute de voix dissonantes, est glaciale. Le jeu entre montage et effet sonore est soigné, à la limite de l’obsessionnel. On retrouve un peu de Hitchcock dans ses thématiques de la femme névrosée, malmenée, esseulée.
Vous l’aurez compris, « Men » est un très bel objet cinématographique.
Mais voilà que le fond nous laisse un peu plus pantois. Dans une ambiance dérangeante, parfois bien barrée (un peu trop vous dites?), Garland traite des longues étapes qui s’imposent à la guérison d’un psychisme éclaté par le trauma. Dans des basculements inattendus et audacieux (un peu trop aussi, hein?), il figure l’auto-engendrement d’une masculinité toxique et meurtrière. Pour enfoncer le clou, il dépose le message, à coup de grosses godasses boueuses, du sacrifice des femmes sur l’hôtel de l’hétérosexualité et de leur soumission psychologique au patriarcat (y en a un peu plus, je vous le mets quand même?).
Vous l’aurez compris, « Men » traite de thématiques essentielles et vivifiantes, mais malheureusement sans la retenue, la finesse et les détours qui auraient été ici les bienvenus.
Dans le registre de l’allégorie du trauma et de la dépression au féminin on lui préférera un bon « Midsommar », « Barbarian », « Watcher » ou « Mother ».