Salomé frappe un grand coup, et transforme l'essai du livre de la journaliste d'investigation Michel-Aguirre, dont on reste sidéré qu'il reste sous les radars de la classe politique, toujours prête à faire les choux gras d'une telle affaire.
Le scénario est a détentes multiples: la pression sur une syndicaliste gênante, l'agression intolérable d'une femme engagée, le jeu de dupes entre des dirigeants d'entreprises et hommes d'Etat pour laisser partir à l'étranger une technologie où la France était en pointe, mais honteuse de l'être.
Si le PDG Ourcel est odieux, Maureen Kearney n'est pas non plus un personnage lisse, elle combat seule, viscéralement, elle ne connait pas ses limites. Elle est aussi séductrice (ses tenues chics, son maquillage voyant, ses remarques sur la tenue négligée de son collègue masculin), et sa proximité féminine, voire féministe, avec la PDG n'est pas sans risque.
D'ailleurs Lauvergeon la lâchera en rase campagne quand le vent mauvais souffle trop fort. Accusée à tort, elle commet les erreurs qui l'enfoncent, un peu comme l'instituteur dans le film La chasse de Vinterberg.
On retrouve la très grande Huppert, qui envahit le personnage, l'écran, et fait vibrer la tension interne de Maureen, ses facettes multiples, ses interrogations familiales et syndicales, et magnifie sa détermination sans limite.
Le contexte de l'affaire est complexe, on n'est juste après Fukushima, défendre les emplois c'est louable, mais défendre l'activité d'AREVA est malvenu.
Salomé nous trace un portrait de femme, qui dit aujourd'hui qu'elle ne referait pas ce qu'elle a fait.
Dans la pénombre, derrière elle, se sont agités de sombres pratiques, sur lequel le voile ne s'est jamais levé. L'écran noir final se termine dans un silence assourdissant.
Voilà un vrai film de cinéclub, qui contient tous les ingrédients d'un riche débat entre spectateurs.
Cinéma 1 - mars 2023