‘Mars express’ sort vraiment de nulle part. Son auteur/réalisateur était connu jusqu’ici pour la série animée ‘Lastman’, branchée arts martiaux. Et qu’un film animé, profondément ancré dans la science-fiction, puisse voir le jour en France, est déjà un petit miracle. Bien entendu, Jérémie Perin ne nie à aucun moment les influences dont il s’est nourri, qu’il s’agisse de Philip K.Dick et de l’adaptation de ‘Blade runner’ par Ridley Scott, ou de Mamoru Oshii et de l’incontournable ‘Ghost in the shell’. Il y en effet question d’une enquête, dans les colonies martiennes, sur le meurtre d’une étudiante ayant “déplombé” un robot afin de le libérer des lois d’Asimov, en d’autres termes en ayant transformé un esclave docile en potentielle menace léthale. Egalement nourri aux sources du polar noir, ‘Mars express’ présente sa détective comme une ancienne alcoolique revenue de tout, tandis que son partenaire est réduit à sa conscience, uploadée dans un corps cybernétique. Si, entre cyborgs en pleine crise existentielle, méga-corporations aux objectifs troubles et omniprésence de la réalité virtuelle, l’amateur de science-fiction évolue donc (relativement) en terrain connu, le scénario, la mise en scène, l’atmosphère, les dialogues, concourent à ce que ‘Mars express’ puisse malgré tout faire résonner sa propre voix : S’il ne s’agit pas de l’exploitation la plus brillante ou la plus trépidante qu’on ait vu des obsessions chères à la sphère cyberpunk, on est loin de la simple copie-carbone de l’existant : doté d’une véritable personnalité, tant graphique que thématique, ‘Mars express’ ne disparaît jamais derrière ses modèles à la personnalité écrasante et, de toute évidence, on ressent très clairement que l’ADN du projet n’est ni américaine ni japonaise. Sa caractéristique la plus marquante est peut-être sa volonté de ne pas succomber à l’habituelle approche “globalisante” de ce futur dystopique et de trouver au contraire mille et un moyens de le caractériser en profondeur, de ses composantes les plus essentielles aux plus triviales. En contrepartie, j’estime que le choix d’acteurs confirmés mais habitués à des partitions plus représentatives du cinéma français pour le doublage n’est peut-être pas très heureux, mais rien qui puisse entamer le plaisir qu’on a à découvrir une des premières productions animées françaises ambitieuses dans le domaine de la science-fiction depuis les années 80.