Un film comme on en fera plus, tant pour le meilleur que pour le pire ! Pour cela que j’apprécie le cinéma de cette époque, c’est toujours surprenant. En bien ou en mal ! La 10e victime commence sur un synopsis hyper classique (enfin pas pour l’époque, mais depuis c’est pléthorique !), et on s’attend donc à un récit devenu un peu banal avec le temps. Sauf que l’approche est complètement déconcertante ! On est dans une comédie totalement kitsh mais assumée comme telle ! Sincèrement, le métrage a beaucoup de défauts. Ses meurtres pas du tout crédibles (pas de sang, les cadavres respirent ou clignent des yeux !), ses longueurs (l’ouverture dure 3 plombes, il y a des scènes qui trainouillent et des répétitions), sa dimension dystopique qui paraîtra sans doute trop faiblement esquissée et surtout sa fin. Quel dommage d’avoir ajouté ces 5 mn au véritable final. Ok, c’est pour rester dans le ton du film, mais ça gâche beaucoup de sa portée et de son ironie. Dommage.
Si l’on met ça de côté, il reste cependant des qualités aussi. Déjà le duo Andress-Mastroianni fonctionne super bien. Les deux acteurs sont vraiment complices, lui est excellent en héros flegmatique, elle est magnifique (à mon avis le rôle où elle crève le plus l’écran), et leur chassé-croisé est très sympathique. Le film s’appuie quasi-unilatéralement sur leur duo, et il fait bien car faut avouer que sans eux le film aurait sûrement été aussi peu digeste qu’un Jésus Franco ! Ils sont très bons, et ils évoluent aussi dans un décor très réussi. Le film dégage une ambiance pop pleine de référence, c’est totalement vintage, mais ça reste très efficace. Le mélange futuriste-antique, l’esthétique des costumes, la bande son loufoque à souhait sur les fusillades qui se terminent cependant par des meurtres, le métrage dégage une forme d’ironie malsaine, de joyeux bazar morbide, sans complètement l’assumé (il n’y a pas de sang) mais assez pour créer un contraste saisissant. Quant à l’histoire, de mon point de vue elle esquisse plein de pistes hyper intéressantes sur le futur, et elle se montre souvent grinçante, distillant avec intelligence (c'est-à-dire discrétion) ses références troubles à la société décrépite du film. Pour autant, comme je l’ai dit, on ne pourra nier les lenteurs, le côté délirant de la fin qui en fait beaucoup trop et nuit à une intrigue qui, même dans sa dimension « romance », car ce film est surtout une romance, est sincèrement assez plaisante à suivre.
Pour ma part La 10e victime doit être surtout vu comme une comédie romantique vaguement sf et vaguement dystopique. Le film a étonnamment peu vieilli, surtout car déjà à l’époque il mélangeait le passé et le futur, dans une sorte de gloubi boulga difficilement situable chronologiquement. A mon sens, à découvrir, surtout si vous voulez voir Ursula Andress au top de sa forme et Mastroianni en tueur improbable. 3