Un beau matin : les secrets du tournage

Après Bergman Island (2021), Un beau matin s’est imposé à Mia Hansen-Løve. Durant l’hiver 2019-2020, la réalisatrice a écrit ce scénario en partie inspiré de la maladie de son père, alors qu’il était encore en vie. Elle se rappelle :

"Je cherchais à donner un sens à ce que je traversais. Et je voulais explorer la façon dont peuvent dialoguer deux sentiments opposés, un deuil et une renaissance, le fait de les éprouver simultanément."

"Même si elle est tourmentée, l’histoire entre Sandra et Clément est surtout une joie. Avec son père, ce n’est que souffrance. Les deux récits cohabitent. Cela m’intéressait de trouver une forme cinématographique pour donner à voir cette coexistence."

La question de la mémoire parcourt le film : elle échappe à Georg (Pascal Greggory) qui lutte pour la recouvrer, et la mère de Sandra (Nicole Garcia) semble avoir besoin de se délester du passé. Mia Hansen-Løve précise :

"Paradoxalement, la mémoire est du côté du père… Cela tient sans doute aux figures masculines et féminines de mon histoire familiale. Dans les histoires que je raconte, les figures maternelles sont plus facilement tournées vers l’avenir, les figures paternelles sont plus foncièrement mélancoliques."

"J’ai l’impression d’avoir hérité des deux. C’est la tension intérieure de mes films : la tentation de la mélancolie autodestructrice qui rencontre une façon d’épouser la vie, le destin."

Mia Hansen-Løve a écrit le rôle de Sandra en pensant à Léa Seydoux. La réalisatrice explique : "Ces dernières années, Léa Seydoux a beaucoup été regardée comme objet de désir. Elle incarne - de façon très puissante - un certain sex appeal, un certain glamour pas conventionnel…"

"On l’a vue souvent très apprêtée dans les films… Très lookée, voire déguisée. Ici, elle est beaucoup plus simple, à la fois dans son apparence et dans sa façon d’être. J’ai voulu la dépouiller de ses attributs de séduction. La filmer avec des cheveux courts, la tête nue, ça va dans ce sens."

Un beau matin a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2022. Mia Hansen-Løve connaît bien la croisette puisque Bergman Island (2021) et Tout est pardonné (2007) y ont été montrés. De plus, la cinéaste a présidé les jurys des prix Découverte du court métrage et de la Révélation France 4 de la semaine de la critique au Festival de Cannes 2013.

Le thème au piano que l'on entend plusieurs fois dans le film s'appelle Liksom en herdinna. Il s'agit d'un morceau de Jan Johansson, un compositeur suédois. Mia Hansen-Løve confie : "Lorsque je prépare un film, je suis toujours accompagnée par un ou plusieurs morceaux."

"Pour Un beau matin, ce fut celui-ci. Sa particularité, c’est que je l’ai découvert dans un Bergman, Le Lien, qui raconte une passion adultère entre deux personnages interprétés par Bibi Anderson et Elliott Gould (...)."

"Ce n’est pas la raison pour laquelle j’ai utilisé le thème de Jan Johansson, mais parce que je me suis identifiée à sa mélodie, où l’on trouve une mélancolie ainsi qu’une vitesse, qui va avec la marche, récurrente dans le film…"