Langue étrangère explore les turbulences de l’adolescence à travers l’histoire de Fanny, une lycéenne timide de Strasbourg, et Lena, une jeune Allemande au caractère affirmé et politisé. Ce récit initiatique, inspiré par les difficultés rencontrées par de nombreux jeunes pendant la pandémie, réussit à capturer les paradoxes de notre jeunesse, partagée entre quête d’identité et volonté de changement. Dès son arrivée à Leipzig, Fanny est fascinée par Lena, qui incarne tout ce qu’elle n’est pas : extravertie, engagée, et passionnée par la politique. Pour gagner l’attention de sa correspondante, Fanny s’invente une vie plus radicale qu’elle ne l’est réellement, mentant sur une demi-sœur activiste qui n’existe presque que dans son imagination. Ce jeu de miroir entre les deux jeunes filles, qui s’enrichissent et se transforment au contact l’une de l’autre, est touchant et ancre le film dans une réflexion sur l’adolescence et les enjeux identitaires. Le film déploie un subtil discours sur l’amitié franco-allemande, avec des clins d’œil historiques et culturels, comme les visites de la place historique des émeutes de Leipzig ou du Parlement européen à Strasbourg. Ce rapprochement, cependant, est nuancé par les différences de perspective sur leurs pays respectifs : Fanny perçoit l’Allemagne avec une naïveté qui contraste avec la conscience aiguisée de Lena sur la France. Cette dualité donne au film une richesse symbolique, surtout dans un contexte où les tensions politiques – notamment la montée de l’extrême droite – sont de plus en plus visibles des deux côtés de la frontière. Burger met aussi en avant les divisions générationnelles et les désaccords familiaux. En Allemagne, le grand-père de Lena incarne ce passé pesant et réactionnaire, tandis que Lena, militante de gauche, se heurte aux opinions conservatrices de son entourage. En France, Fanny tente de se frayer un chemin entre les idéaux de son milieu bourgeois et son désir d’engagement, souvent minimisé par ses proches. Malgré sa sincérité, le film souffre de son didactisme. La réalisation, qui se veut naturaliste, joue habilement avec les contrastes entre moments de réalité et de rêverie, bien que certaines séquences symboliques semblent forcer le propos. Les performances actorales apportent néanmoins une véritable authenticité à leurs rôles, rendent les personnages attachants et nuancés. En définitive, on est face à un film juste et introspectif, qui aborde avec sensibilité des sujets d’actualité comme le militantisme, les relations transfrontalières et l’éveil politique des jeunes. Si le rythme n’est pas toujours maîtrisé, il parvient à toucher en posant des questions pertinentes sur la place des jeunes dans une société en mutation et sur les choix qui définissent l’identité.