Jonathan Nossiter travaille sur Last Words depuis 2014. Le point de départ du film, adapté du roman "Mes derniers mots" de Santiago Amigorena, se situe dans les prévisions inquiétantes des scientifiques sur le réchauffement climatique et la disparition volontaire de la culture dans notre quotidien. Le réalisateur précise : "Je vis aujourd’hui en Italie, ayant des liens profonds avec la France, le Brésil, les États-Unis et l’Angleterre. Et, partout, je vois la même maladie à l’œuvre : une nouvelle barbarie qui méprise la culture, mais aussi l’éducation et la santé. Nous sommes en train d’en payer le prix."
Le film montre une poignée de survivants refermés sur eux-mêmes qui retrouvent le plaisir d'être ensemble autour de projections de films du passé. Jonathan Nossiter explique pourquoi il a choisi ce dispositif :
"Déjà, avant cette crise du coronavirus, quand j’entrais dans le métro à Rome, je remarquais tous ces regards qui s’évitaient. Et j’ai très peur que le peu de contact physique qui subsistait disparaisse après cette crise. Je pense avoir réalisé un film apocalyptique plein de tendresse, d’amour et d’espoir véritable. Parce que je crois toujours dans la force de la culture, de la culture sauvage, vraie, nécessaire, pas dans les produits d’une culture vouée à l’argent. Je suis convaincu que le cinéma, comme les livres, la musique ou la peinture, joue un rôle aussi essentiel que la santé publique. Peut-être, après cette crise, assisterons-nous à un réveil général et les gens repenseront-ils leurs priorités."
Avec Last Words, Jonathan Nossiter retrouve Charlotte Rampling après Rio Sex Comedy et Signs & Wonders, ainsi que Stellan Skarsgård après Signs & Wonders. Ces deux comédiens se connaissent bien puisqu'ils ont également partagé les affiches de Melancholia, Boogie Woogie, Aberdeen et Dune version 2020.
Les scènes dans les ruines grecques ont été tournées à Paestrum, au sud de Naples, dans le Cilento. Le site archéologique est dirigé par un jeune Allemand, Gabriel Zuchtriegel, investi dans la vitalité présente du passé et dans la culture régionale. Jonathan Nossiter explique :
"Il a ouvert le parc pour qu’on puisse filmer au milieu des temples de façon extraordinairement libre. Le film est nourri de cet ancrage culturel. Nick Nolte est arrivé de Californie au milieu de ce parc archéologique, entouré de tous ces paysans et de cette culture du bienmanger, un monde du passé tourné vers le vivant. Lui-même cultivait dans son ancienne maison un potager bio, il était sensible à l’aspect écolo du film, sinon il n’aurait pas adhéré au projet : quatre mois de tournage dans des conditions franciscaines !"
Last Words fait partie des dix films ayant obtenu le label "Cannes 2020" à être présentés au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2020.
Le metteur en scène Jonathan Nossiter possède pour particularité d'être également agriculteur. Il confie : "Quand je suis arrivé en Italie, en 2010, j’ai rencontré Stefano Bellotti, un des plus grands vignerons italiens, pionnier du vin naturel, que j’ai filmé dans Résistance naturelle. Il cultivait sur les collines de Gavi, dans le Piémont, et nous a quittés en pleines vendanges en septembre 2018, à l’âge de 59 ans. Stefano passait beaucoup de temps à transmettre son savoir à de jeunes vignerons et à tant d’acteurs culturels. Nous sommes des milliers à avoir vu nos vies changer grâce à lui. Et c’est certain qu’il a changé la mienne. C’est lui qui m’a fait comprendre que la question agricole était la grande question de notre époque."
En 2014, après la sortie de Résistance naturelle, son avant-dernier film, Jonathan Nossiter a dit qu'il voulait réaliser un dernier long métrage de fiction avant de se consacrer complètement à l’agriculture. Il précise toutefois :
"Je ne sais pas si Last Words sera mon dernier film, mais je suis certain que ma vie sera maintenant dévolue à l’agriculture, à la joie très cinématographique de travailler cette terre et de constituer ce réservoir de semences anciennes. J’ai beaucoup d’échanges avec des jeunes grâce à cette activité agricole, que peut-être je n’aurais pas avec le cinéma. Même devant la catastrophe, je cherche la vitalité. Or il y a énormément d’espoir de renouveau agricole grâce aux jeunes, j’essaie de voler leur vitalité, au moins de la vivre…"