Le genre de petit film d'épouvante qui sort de nulle part -en l'occurrence aujourd'hui sur Netflix sans grande promotion- et qui surprend agréablement en s'attaquant à une problématique sociétale majeure dans un contexte chargé de surnaturel.
À travers ce couple de Soudanais fraîchement arrivé en Angleterre et aux prises avec une mystérieuse entité dans leur logement social, c'est évidemment la difficile condition des réfugiés dans son ensemble qui est abordée. Entre un passé, toute une culture, qu'on leur demande de renier et un futur où le processus d'intégration à une nouvelle vie se résume à un parcours quasi-carcéral accompagné de regards sans cesse suspicieux, le sort de Bol (Sope Dirisu) et Rial (Wunmi Mosaku, vue dans "Lovecraft Country") permet une charge critique féroce contre le système d'accueil anglais des réfugiés qui s'incarne plus particulièrement dans cette maison carrément hostile envers ses locataires étrangers.
Si l'on s'en tient seulement au registre de l'épouvante, on pourrait rapprocher "His House" du récent "The Vigil" par l'utilisation d'un folklore fantastique spécifique, rattaché à ses victimes et qui cherche avant tout à jouer avec les traumatismes encore très vifs de leur passé. D'abord très classique dans sa montée en puissance d'apparitions malgré tout efficaces, "His House" se montre bien plus impressionnant une fois révélée la nature de la malédiction qui pèse sur le couple et lorsque la menace joue de manière pernicieuse avec des remords qui ne peuvent rester éternellement enfouis. Ainsi, la construction ambitieuse de véritables tableaux fantastiques nous emmenant par-delà la réalité se conjuguera à des scènes en apparence plus anodines mais où le fantastique s'immisce en toile de fond pour trahir la perte de repères de ses protagonistes (la première sortie de Rial à l'extérieur est en ce sens très bien pensée avec ce paysage urbain si commun prenant des allures de dédales infernaux). Enfin, la dernière partie, celle par laquelle nous sera révélé la pire attache qui retient ce couple à son passé et la manière d'en envisager une possible rédemption, achèvera de rappeler de manière bouleversante que les réfugiés sont avant tout des êtres humains avec leur passé et leurs propres défaillances que tout un système oublie sciemment, par facilité, de prendre en compte.
"His House" divisera forcément les spectateurs entre ceux qui viennent y chercher un frisson facile, d'autres plus sensibles à son discours, etc. Personnellement, j'adore ce genre de proposition qui nous rappelle que l'épouvante peut sortir avec intelligence de son terrain de confort pour aller pointer du doigt les travers de nos sociétés modernes. Certes, il manque un petit quelque chose pour que "His House" soit un très grand film mais j'ai vraiment apprécié sa découverte, surtout sur Netflix où il est désormais susceptible d'être vu par le plus grand monde.