Giorgio Diritti connaissait Antonio Ligabue depuis longtemps comme artiste, et la région où il a vécu lui est familière. En se rendant à Gualtieri, le petit bourg où le peintre italien a passé une grande partie de sa vie, le réalisateur a eu l’occasion de rencontrer des personnes (parfois très âgées) qui l’avaient connu. Il se rappelle :
"J’ai découvert une réalité qui allait au-delà de ce que je savais de lui, notamment par les quelques images documentaires qui ont survécu. Il y avait là une complexité qui m’a fasciné : l’histoire d’une personne qui n’a pas eu de chance, que la vie a même accablée de problèmes, mais qui a lutté pour réussir à trouver sa place dans la société. Pour la plupart, les témoins à qui j’ai parlé étaient enfants ou adolescents quand leur chemin a croisé celui de Ligabue. Mais il y en a aussi un, Sergio Negri, qui est devenu le plus grand connaisseur et l’expert reconnu de la peinture de Ligabue. Son apport et ses récits ont été précieux. C’est au contact du peintre, alors qu’il était très jeune, qu’il a décidé de faire des études d’histoire de l’art."
"C’est un titre en mouvement, parce qu’en pensant à Ligabue, je pense immédiatement à un être en mouvement. Je voulais me cacher, parce que j’étais un enfant laid, rejeté, apeuré, parce que personne ne voulait s’approcher. Ce qui compte c’est la suspension de la phrase : Je voulais me cacher... mais finalement je me suis montré."
Pour recréer la gestuelle d'Antonio Ligabue, Elio Germano s’est inspiré des quelques images documentaires qui lui sont parvenues et des récits de ceux qui ont connu le peintre. Ce dernier possédait ainsi ces drôles de rituels comme la nécessité de trouver l’énergie de l'animal pour mieux le dessiner... Le metteur en scène Giorgio Diritti confie :
"Dans les années 50 et 60, plusieurs documentaristes comme Raffaelle Andreassi ou Pier Paolo Ruggerini, se sont intéressés à Ligabue. De façon empathique, enthousiaste. On peut trouver quelques-uns de leurs films sur YouTube. En Italie, à l’époque, et notamment avant que la télévision ne se popularise, on projetait des courts-métrages documentaires avant chaque séance de cinéma. Il y avait une forte production, soutenue par l’Etat. C’était une façon de valoriser la connaissance du pays."
Je voulais me cacher a été présenté au Festival de Berlin 2020 où Elio Germano a été récompensé de l’Ours d’argent du meilleur acteur.
Je voulais me cacher n’est pas un biopic au sens classique puisque son récit est volontairement morcelé. Tout en respectant ce que l’on sait de la vie d'Antonio Ligabue, Giorgio Diritti a cherché à faire un film qui ne soit pas purement biographique, mais qui soit aussi émotionnel. Il précise :
"J'ai cherché à raconter ses émotions, comment il a vécu, son isolement, des difficultés, ses rêves, et même ses amours fantasmés. Cela me semblait plus intéressant. Nous tous dans la vie avons éprouvé le sentiment d’être rejetés ou jugés, en tout cas d’être inadéquats au monde, au sens le plus ample. Voilà le projet du film : dire l’histoire de Ligabue mais tendre un miroir à nous tous. Bien sûr, c’est un miroir déformé, amplifié par son parcours si singulier mais, en même temps, ce qu’il traverse et surmonte a beaucoup de points communs avec ce que nous vivons tous."