Mais où est-ce que Ridley Scott a voulu en venir ?
Non vraiment, j'ai beau chercher je ne vois pas ce qu'il a voulu dire avec "House of Gucci".
Peut-être qu'il a voulu dire qu'il n'avait plus rien à dire, ce qu'on savait déjà depuis une bonne dizaine d'années. Peut-être qu'il a voulu nous rappeler une fois de plus qu'il n'est définitivement plus le réalisateur de génie qu'il était dans ses jeunes années, et si c'est le cas c'est quand même sacrément triste.
Avant, Ridley Scott c'était le mec qui savait rendre exceptionnel un pitch banal, celui qui innovait dans des terrains que l'on croyait déjà bien battus, celui qui réinventait un genre quand il y touchait.
Et je pense qu'il y avait moyen de faire un film à la Ridley Scott avec "House of Gucci".
Par là j'entends un film à la Ridley Scott des bonnes années.
Mettre un bon coup de pied dans la fourmilière d'un genre qui tourne en rond, en l'occurrence le film de gangsters.
Pas comme son "American Gangster" était un film de gangsters. Non, on va plus loin.
Là, on édifie le portrait d'une famille sans scrupule qui se déchirera au vent des trahisons et de l'argent sale.
On crée une histoire épique et tragique dans lequel un homme se verra passer de la droiture morale à la corruption et à l'inhumanité.
Ça ne vous rappelle rien ?
...pas même "Le Parrain" ?
Je ne blague pas : je reste persuadé qu'il y avait moyen de faire une fresque épique digne de la divine trilogie "Le Parrain".
Quitte à être LE film de gangster culte de sa génération.
Et quand on voit à quel point les références à l'œuvre de Mario Puzo et Francis Ford Coppola fusent dans le film de Ridley Scott, on peut voir ça comme un aveux de la part de ce dernier de vouloir marquer les esprits.
Que ce soit au niveau de l'écriture de son protagoniste, Maurizio Gucci, de certains décors quasiment repompés de son modèle ou bien de la présence d'Al Pacino, Michael Corleone en personne mesdames et messieurs (qui cette fois fera plus office de Marlon Brando qu'autre chose).
La volonté y est. Ça peut le faire. J'y crois à mort pour le grand retour de Ridley Scott. J'étais sûrement le seul à autant attendre House of Gucci mais il y avait tant à faire sur un tel projet.
Et puis... pfffffff...
J'ai dû très rapidement me rendre à l'évidence : quel navet.
C'est non seulement mal filmé mais incroyablement immature dans la manière de traiter son sujet.
À la fois le film en raconte trop et il n'en raconte pas assez.
Car les seuls événements intéressants sont balancés lors des panneaux de fin, et si vous voulez mon avis on n'est pas censé piquer du nez pendant 2h30 pour avoir ça.
Les dialogues, eux, sont aux fraises, et sont interprétés par des acteurs extrêmement peu investis (sauf Jared Leto, mais en même temps c'est Jared Leto). Dommage alors que Lady Gaga m'avait bien surpris dans "A Star is Born" et qu'Adam Driver m'avait déjà cette année complètement transporté avec "Annette". Sinon Al Pacino vient prendre son chèque et c'est tout.
Et là où j'étais impatient de voir ce qui allait pouvoir être raconté avec un cadre aussi original, le film se contente d'empiler les banalités, les retournements de situation trop prévisibles et des scènes assommantes d'ennui...
Si au moins la bande-son pouvait apporter du charme à l'ensemble, que nenni ! La musique s'inscrit incroyablement mal dans le contexte et ne vient qu'accentuer un côté tape-à-l'œil vomitif que semble nous rabâcher papy Ridley à chaque instant.
Pendant 2h37.
2h37 interminables. J'aurai pu déclarer forfait mais je suis resté sur le ring, et pourtant le film me mettait des coups de plus en plus fort au fur et à mesure que ça avançait.
Alors je ne le renie pas : de temps en temps il y a un joli plan. Il y a Jared Leto qui cabotine pour mon plus grand plaisir. Il y a... euh... ouais.
Mais quand de l'autre on se tape une avalanche de débilité, ça refile vite un affreux mal de crâne et j'ai vite perdu tout ce à quoi je pouvais me raccrocher pour éviter de sombrer.
Bon, il reste les références au Parrain...
Mais citer un si grand nom du cinéma ne fera pas de ton film un aussi grand nom du cinéma.
Là c'est juste de la prétention.
De la bonne grosse prétention... il ne manquait plus que ça.
J'ai déjà parlé du côté tape-à-l'œil mais je n'ai fais qu'effleurer la surface !
Comme on fait un film sur Gucci on va en profiter pour mettre des gros costumes bien chics bien Deluxe lors de défilés à rallonge.
Mais là où Maurizio a l'air de prendre du plaisir à voir ses sujets se déhancher devant lui, le spectateur s'en retrouve bien vite laissé de côté...
"House of Gucci" semble bien déterminé à prendre son public de haut à coup d'histoire que l'on ne cesse d'artificiellement complexifier et de scènes hot et sexy (qui au moins ont le mérite de ne pas trop être filmées comme des clips de MTV, n'est-ce pas Michael Bay) pour se mettre dans la poche un public facilement impressionnable.
Ah, et des fois on pense quand même à raconter un truc, car pourquoi pas.
J'ai trouvé ce film honnêtement imbuvable. Car déjà avoir refilé le rôle principal à Lady Gaga n'était certainement pas le bon choix (elle est détestable, mais genre passivement détestable, elle est juste inintéressante et gonflante en fait), mais avoir refilé tout le projet à Ridley Scott n'était déjà pas une bonne idée.
Alors que je disais être prêt à retrouver le Ridley Scott des grands jours, on a eu droit au Ridley Scott de "Exodus", de "Robin des Bois", de "Prometheus", on a eu droit au Ridley Scott de l'insipide, de la prétention, de l'immaturité.
Et au vu du potentiel, c'est un énorme gâchis.
Un énorme navet taille XXL.
Peut-être le pire que sir Ridley ait pu nous pondre, et c'est dire venant de celui qui a massacré sa propre franchise avec "Alien : Covenant".
Donc vas-y ! Cite "Le Parrain" autant que tu veux ! Tu l'as déjà égalé avec quelques chefs-d'œuvre passés. Mais t'aurais mieux fais de le citer dans un de tes chefs-d'œuvre que dans un raté remarquable comme "House of Gucci"...
Tu ne veux pas nous laisser entrer dans ta maison Gucci, soit ! Au fond je crois que je préfère rester sur le palier, c'est plus agréable.