Navet XXL
Après l’impressionnant The Witch de 2016 et son étonnant et intimiste The Lighthouse, le moins qu’on puisse dire c’est que Robert Eggers était attendu au tournant. Après le huis clos d’un phare, rendez-vous avec la mer et les espaces du grand Nord. Le jeune prince Amleth vient tout juste de devenir un homme quand son père est brutalement assassiné par son oncle qui s'empare alors de la mère du garçon. Amleth fuit son royaume insulaire en barque, en jurant de se venger. Deux décennies plus tard, Amleth est devenu un berserkr, un guerrier viking capable d'entrer dans une fureur bestiale, qui pille et met à feu, avec ses frères berserkir, des villages slaves jusqu'à ce qu'une devineresse lui rappelle son vœu de venger son père, de secourir sa mère et de tuer son oncle. Il embarque alors sur un bateau pour l'Islande et entre, avec l'aide d'Olga, une jeune Slave prise comme esclave, dans la ferme de son oncle, en se faisant lui aussi passer pour un esclave, avec l'intention d'y perpétrer sa vengeance. Même si je ne nie pas la beauté des images et des paysages, pas plus que le soin apporté à la reconstitution minutieuse du monde de Vikings au 9ème siècle, je me suis copieusement ennuyé durant 137 minutes qui m’ont paru interminables. Ça éructe, ça grogne, ça étripe, à tout va. Vegan s’abstenir.
Le savoir-faire d’Eggers n’est pas en cause. Fort d’un budget inédit pour lui de 90 millions de dollars, il nous en met plein la vue… enfin, quand on y voit quelque chose, car le moins qu’on puisse dire c’est que le chef de la photo n’a pas forcé sur les éclairages. L’image est aussi sombre que la psychologie des personnages. The Northman est le genre de film qui arrive rarement sur grand écran de nos jours. À l’heure actuelle, les cinémas diffusent soit des films indépendants à petit budget, soit des blockbusters formatés jusqu’à l’ennui. Là, on est à mi chemin de ces deux tendances avec du ciné créatif et à gros budget. Non, ce qui choque ici, c’est le vide abyssal du scénario d’un convenu rarement atteint – à part, il faut le dire, un twist un tantinet surprenant aux ¾ du film -. On suit donc péniblement le destin funèbre d’Amleth, figure de la mythologie nordique dont Shakespeare se serait inspiré pour la plus célèbre de ses tragédies. Admettons. Mais tout est ici basique et simpliste d’où le manque d’intérêt et d’empathie que l’on ressent pour ces personnages qui parlent un anglais teinté d’un pseudo accent nordique quand il ne dérivent pas vers un sabir dont je ne garantis pas l’authenticité. Disons que l’Aragorn du Seigneur des Anneaux ou le Luke Skywalker de Star Wars ont une autre allure que cette bête emplie de haine et de violence. Décevant.
Côté casting, c’est du lourd. Alexander Skarsgård, fils de…, tout en muscles et en borborygmes portent le film sur ses épaules nues, totalement insensibles au froid glacial de l’hiver islandais. Face à lui, on retrouve les femmes de l’histoire, Nicole Kidman et Anya Taylor-Joy, qui ont l’avantage d’être reconnaissables contrairement à Ethan Hawke, William Dafoe, tellement sales et hirsutes, qu’ils finissent par passer inaperçus et même Björk, pour apparition plus qu’anecdotique. Tout ce petit monde s’agite au beau milieu des croyances, rites initiatiques, environnement, paysages, affublés de costumes – oripeaux le plus souvent -, d’accessoires, d’armes en rapport avec leurs fonctions sociales… L’ensemble est d’un réalisme sans faille. Le problème, c’est que tout ce fourbi est au service d’une histoire prévisible mettant en scène des personnages sans profondeur ni intensité. Qui frisent parfois la parodie. Mais, voilà, vous l’avez compris, le ton n’est pas du tout à la rigolade… alors son s’emm…