Le traveling avant avec le bruit bizarre : check. Le Necromicon avec la formule : check. Le bras coupé et la tronçonneuse : check. Le dernier plan identique et le bruit de mouche au générique : check. Oui, si vous connaissez la saga Evil Dead sur le bout nécrosé de votre lambeau de doigt, vous allez forcément apprécier remplir votre liste de courses avec un sourire satisfait de cinéphile nostalgique. Et si vous faites partie des néophytes, vous aurez au moins un film copieux en litres d'hémoglobines (un abus du jus de grenade qui justifie l'interdiction aux -16 ans français) et qui s'amuse avec les objets dangereux. On a apprécié que Evil Dead Rise s'adresse à tout le monde, en faisant une check-list de la saga bien remplie (ne manquait plus qu'un "Groovy Baby", et une scène de miroir, concrètement, et tout était coché des films de Sam Raimi, mais peut-être aurait-ce été du fan-service ? Comme le Multivers of Madness qui ânonne bêtement les scènes-cultes du réal sans les comprendre ? Vous avez raison : les morceaux choisis ré-interprétés valent mille fois mieux qu'un récital exhaustif) et en proposant des bonnes idées de gore (policé pour du Hollywood moderne, on tempère ce qu'on a pu lire ailleurs : ne vous attendez pas à la révolution du gore), notamment "la râpe à fromage" (qu'on aurait aimé voir davantage) et le [/spoiler] broyeur final qui dégomme le monstre pluri-personnes
(la meilleure idée du film). La mise en scène est bien pensée, mêlant astucieusement l'effet œil de poisson aux moments où les personnages regardent par le Juda, elle s'éclate avec les gros plan penchés psychédéliques (coucou le "plan Sam Raimi") et les travelings accompagnés de la fameuse bande-son au chant de gorge ("aaaaaaah"), et la petite réf' à la virée en cabane entre potes dans les bois ne passe pas inaperçue pour les amateurs... En revanche, si vous possédez une platine-vinyle, soyez prévenus : il y a un disque 33 tours mis en vitesse 45, et tourné plus vite à la main... On évite de penser à la voix de Chipmunks qu'on devrait entendre, pour les besoin du scénario (soyons conciliants). Mais on aime les acteurs qui sont tous assez bons dans leur rôle, l'attachement (un peu forcé, on le sent) qu'on a envers la Tata qui protège ses neveu et nièces comme elle le peut, elle qui rêve d'un petit à elle... La surprise, de notre côté, aura été du côté des victimes, puisqu'à voir les enfants, on ne pensait pas que le film oserait
dézinguer aussi salement les deux aînés [spoiler], cet opus nous a étonné en ayant la maturité de s'attaquer aux victimes intouchables (les enfants), ce qui frappe davantage dans les scènes d'effroi, surtout celle où l'on se dit qu'il y a plus simple pour faire la vaisselle d'un verre sale (Paic citron, une goutte suffit) ou calmer des maux de ventre (Immodium, un cachet suffit). On a beau s'en moquer, on trouve cette scène vraiment bien pensée et jusqu'au-boutiste (le cou...). A l'image de cet opus qui assume sa parenté avec la saga de Sam Raimi tout en étant une histoire détachée (on ne sait pas où le positionner entre les opus, le reboot de 2013 et la série... Surtout qu'on entend la voix de Bruce Campbell dans l'enregistrement du disque... On va dire qu'il fait sa vie de son côté, ou plutôt, sa mort de son côté), qui ne révolutionne rien, mais n'en a pas la prétention, lorgne du côté du premier Rec (les familles de zombies dans un immeuble, dont les enfants ne sont pas épargnés...), de Shining (l'ascenseur qui gicle d'une marée de sang), en n'oubliant pas d'exister par lui-même, ce qui le démarque des suites gratuites. Si les opus suivants ont les reins aussi solides que cet Evil Dead Rise, qui n'invente pas l'eau chaude mais s'amuse à s'ébouillanter avec, on sera présent pour participer au chant de gorge. Aaaaaaah....