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    L'Intendant Sansho
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    VincentV
    VincentV

    3 abonnés 9 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 25 avril 2023
    Chef d'oeuvre absolu. Perfection du découpage. Tout est juste, tout est beau. Vu une trentaine de fois.
    Andy LEDENT
    Andy LEDENT

    1 critique Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 11 janvier 2023
    « II.1. Le maître dit : celui qui fonde son gouvernement sur la vertu peut se comparer à l’étoile Polaire qui demeure immobile, cependant que les autres étoiles tournent autour d’elle. » Confucius – Les entretiens.

    Cette « étoile Polaire » pourrait bien correspondre à l’image du gouverneur de province exilé en préambule de « L’intendant Sansho » pour avoir pris le parti des paysans contre l’autorité du pouvoir institué tant ce bref portrait irriguera l’ensemble du film et marquera les esprits du spectateur à jamais.
    L’ouverture est poignante, le gouverneur sanctionné pour ses excès de bonté est contraint à l’exil, il laisse sur place sa femme Tamaki, son fils Zushio et sa fille Anju. Avant son départ, il prodigue un ultime enseignement à son fils : « sans compassion, un homme n’est plus humain ».
    Sur le chemin de son exil, une masse constitué des opprimés vient rendre un dernier hommage à son héros. Trait de la cruauté Mizoguchienne, cette masse est rapidement domptée par les serviteurs de l’autorité en présence. Trait également de l’adhésion du réalisateur au marxisme, une certaine représentation de la lutte des classes est discrètement perceptible.
    De ce bref portrait émerge la figure du sage confucéen. Un idéal de compassion et de bonté que Mizoguchi confrontera durant tout son film à l’atrocité du réel. Comme parfois au cinéma japonais, la figure paternelle s’éclipse vite, et ne sera plus que parole, puis souvenir pour ceux qui restent au cœur de l’intrigue. C’est par ce postulat que débute cette histoire inspirée des contes populaires. Nous sommes au 11e siècle…

    À leur tour, femme et enfants doivent prendre la route vers le village natal de la mère. En chemin, la mère déclame : « il faudra marcher sur les traces du père ».
    À partir de ce périple initiatique, une question se pose. À l’instar du père, sauront-ils conserver une vie de rectitude ?
    Les premiers éléments de réponse nous parviennent rapidement, car le périple sera écourté. La contrée est infestée d’esclavagistes dont les rafles sont soudaines et brutales. Nos voyageurs accordent leur confiance à une prêtresse qui propose de les héberger. Cette dernière aura sitôt fait de se corrompre en dénonçant ces proies faciles aux esclavagistes. La situation apporte une première déconstruction dans le film. En effet, un représentant de la religion est l’instigateur d’une trahison. En ce monde où l’institution religieuse vacille, la foi véritable ne peut qu’en pâtir. Cela amène à une séquence de désespoir, celle de la séparation. Un plan attire particulièrement mon attention : la mère est emmenée en pirogue par la force de ceux qui ont fait de l’humain un commerce pendant que les enfants accourent vers elle sur le rivage. Avec l’éloignement progressif de la mère, ce plan utilise habilement la profondeur de champ dans le but de renforcer la dramaturgie de la scène. En élément sonore, les notes d’une flûte se font entendre. Par la force des choses, la mère deviendra courtisane sur une île lointaine, et ses enfants seront vendus comme esclaves.

    Après plusieurs transactions infructueuses, les enfants sont placés sous le joug de l’intendant Sansho. Prêtant son nom au titre du film, ce personnage fait office d’antagoniste moral à la figure du père évoquée précédemment. Ce gestionnaire d’un grand domaine, aussi tyrannique soit-il, deviendra un père de substitution pour Anju et particulièrement Zushio. Cependant, l’intendant Sancho a lui aussi un fils nommé Taro dont la sensibilité s’oppose à celle de son père biologique. À l’instant où Sansho confie à Taro la tâche de molester une esclave « indisciplinée », le fils renie cette petite intronisation à la passation de pouvoir. Cet épisode marque la fin de la première partie du film.

    Après un bond de dix années dans le temps, l’intrigue reprend sur un plan similaire. Sous les ordres de l’intendant, un fils moleste un esclave fuyard. Cependant, ce fils n’est pas Taro. Il s’agit de Zushio. À ce moment, un basculement a lieu. Les deux fils évoqués se détournent de la voie des pères biologiques. Les années de labeur et de souffrance ont rendu Zushio opportuniste auprès de l’intendant Sansho. À l’inverse, le quotidien de Taro s’est, par l’intermédiaire des restitutions de Zushio et Anju, imprégné de la philosophie du gouverneur exilé. Écœuré par un monde désœuvré, Taro s’est retiré au sein d’un sanctuaire bouddhiste, nous l’apprendrons plus tard. Cette conversion renforce le pouvoir de l’éloquence d’un discours juste sur un être prédisposé. Toutefois, il demeure d’autres pouvoirs, la tyrannie en est un exemple. Elle est soulignée par les actes de l’intendant Sansho et de ses sbires. Une seconde déconstruction s’opère, la gestion tyrannique est célébrée par les plus hautes instances du pouvoir féodal. Lors d’une fastueuse réception, un dignitaire vante les mérites d’un intendant craint et respecté de tous. Au cœur de ce pouvoir vertical, Zushio tient son rang. Le petit garçon pétri d’illusions est désormais un adulte inspirant la peur et le mépris de ses homologues esclaves. Anju semble quant à elle avoir conservé les préceptes de son père.
    Mais quelques temps après, une nouvelle bascule a lieu. Anju en est l’instigatrice.

    Lors d’un enterrement prématuré auquel Anju et Zushio doivent apporter une malheureuse contribution, ces derniers se retrouvent seuls dans les bois avoisinant le domaine. Au cours d’un instant fugace a lieu une réminiscence que seul le 7e art peut offrir : la parfaite union de l’image et du son. En saisissant quelques branchages, Anju et Zushio se remémorent les mots de la mère. Au loin, le chant triste de la mère se fait entendre.
    Il aura suffit de cet instant pour que le cruel jeune homme redevienne l’enfant idéaliste. À partir de ce moment, rien ne sera plus comme avant. Anju aidera son frère à fuir sa condition, elle acceptera un sort funèbre avec stoïcisme, car son nom d’esclave désigne celle qui endure tout. En silence, elle disparaîtra dans l’abîme…
    Cinéaste de la beauté, Mizoguchi atteint la plénitude avec le plan de la mort d’Anju.

    Au cours de sa fuite, Zushio rencontre Taro. Ce dernier contribue à son hébergement et à sa protection chez les moines bouddhistes. Cette aide bienvenue répond directement à la trahison de la prêtresse. Chez Mizoguchi, le mal ne réside pas en le pouvoir ou en la religion, mais en ceux qui en font l’apanage. La destruction par une arme dépend avant du choix de celui qui l’utilise. Le film nous donne à voir deux oppositions caractéristiques : le père contre l’intendant Sansho pour le pouvoir ; la prêtresse contre les moines bouddhistes pour la religion.

    Souhaitant racheter ses fautes, Zushio se rend à Kyoto dans le but de rencontrer les plus hauts représentants du pouvoir. Grâce à son héritage physique (une statue de la déesse de la miséricorde) et moral, Zushio prendra le poste vacant de son père décédé. Un hommage est rendu sur la tombe du père, et la transmission qui a avorté entre Sansho et Taro a bien lieu entre l’ancien gouverneur exilé et son, fils Zushio nommé gouverneur à son tour.

    Par la suite, Zushio se dévoile comme le digne héritier de son père. Il affranchit les esclaves, puis contraint Sansho à l’exil. Mais outrepassant ses droits, il rejette son pouvoir avant que le couperet d’une législation punitive ne s’abatte sur lui.

    L’épilogue du film est le point culminant émotionnel. Zushio part à la recherche de sa mère d’après quelques indications hasardeuses. Sur place, la mère est bien présente. Elle n’a pas encore atteint l’âge de 50 ans, mais elle est déjà une vieillarde rendue aveugle par la compilation des années d’humiliation et les larmes incessante qui inondent chacune de ses complaintes pour ses enfants disparus. La même statue qui permit à Zushio de se faire reconnaître comme le fils de son illustre père permet ici à la mère de reconnaître son fils, malgré la cécité.
    L’air de flûte qui marquait la séparation du rivage accompagne désormais la réunion des êtres. Symboliquement, nous sommes également aux abords d’un rivage.
    Au dernier plan, une mère enlace un fils retrouvé, la caméra exécute un mouvement vers la gauche. Au loin, nous apercevons le labeur d’un paysan, un témoin inépuisable de l’ordre cyclique du monde. Zushio aura brillé par ses exploits politiques et humanistes, mais fondamentalement, rien n’aura changé pour la masse des opprimés.
    L’intendant Sansho est le joyaux au cœur d’une œuvre Mizoguchienne bien garnie.
    Patjob
    Patjob

    34 abonnés 600 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 19 novembre 2021
    Quelle année 1954 pour le cinéma Japonais ! Sortent en effet ces chefs d’œuvre que sont le formidable « Les sept samouraïs » de Kurosawa et cet « Intendant Sansho » de Mizoguchi. Inspiré d’une légende populaire, se déroulant dans un Japon médiéval brutal et impitoyable, ce dernier est un grand film social, politique et moral. Social, par la description de la domination d’une classe sur une autre, et de la misère de la population opprimée. Politique, par celle des luttes de pouvoir et des différentes conceptions de l’exercer ; dans ce domaine, si le film peut sembler un peu caricatural au premier abord, il ne l’est pas tant que cela, tant la volonté de bien faire peut être entravée par le système en place et tant elle peut générer de déception. Moral, par le questionnement sur le sens que l’on peut donner à sa vie, et le rôle que l’on peut jouer vis-à-vis des autres, que ce soit dans le dénuement ou en situation de pouvoir. Ces différentes dimensions s’interférant par la place du déterminisme social : dans quelle mesure est-il possible d’être véritablement soi, tant la prégnance de la situation et des conditions de vie pèsent sur nos actes ? Symbole de la difficulté d’affirmer une personnalité face au cours de la vie, Zushio, qui est le personnage central du film, contrairement à ce que le titre pourrait laisser supposer, aura ainsi trois noms successifs, qui correspondent à trois époques de sa vie et à trois statuts sociaux différents. Il parviendra tout de même, après des épreuves terribles, à mettre en application les préceptes humanistes et peut être idéalistes de son père et à recouvrer son vrai nom, celui de son enfance, en retrouvant, dans une dernière scène aussi belle que déchirante, sa vieille mère bafouée, infirme et aveugle.
    Ce qui paraît constituer l’art et la force de Mizoguchi, c’est que cette succession de drames et d’atrocités est filmée de façon simple et pudique, avec énormément d’empathie. Le récit très dense et chaotique est mis en scène avec douceur et fluidité ; avec poésie aussi, la nature intervenant souvent comme cadre magique. Ainsi les esclaves libérés qui se livrent à la débauche, au pillage et à la destruction sont filmés en un seul travelling latéral délicat, qui fait ressentir à la fois toute la déception et la compréhension que cette attitude peut inspirer. Ainsi le suicide de Anju, dont on ne voit l’image qu’à travers des frondaisons, et, après une ellipse pudique sur le moment fatal, que les cercles concentriques formés sur l’eau en train de disparaitre...
    soulman
    soulman

    92 abonnés 1 227 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 7 août 2021
    Déchirant mélodrame médiéval, poétique et d'une grande beauté formelle. Comme chez Ozu, chaque plan est un tableau en soi, mais ici l'intimité est écrasée par le chaos et la barbarie d'une époque ô combien violente et inégalitaire. Les deux jeunes héros sont acharnés dans leur dévouement et leur soif de justice, hérités de leur père, gouverneur injustement banni. Une fois encore, ce sont les femmes qui agissent de manière déterminante sur le cours du récit, la jeune soeur, par son intransigeance et son sacrifice, redonnant foi et courage à son frère dans la poursuite d'un idéal longtemps bafoué. Les retrouvailles finales avec sa mère, elle-aussi fidèle à ses souvenirs et à son désir de revoir ses enfants, sont magnifiques de retenue et de simplicité.
    Criticman17
    Criticman17

    6 abonnés 237 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 20 avril 2020
    Chef d'oeuvre du cinéma japonais. Kenji Mizoguchi réalise un film bouleversant humaniste qui combat les minorités et tout un système mettant en danger l'humanité. On est face à une perfection dans la réalisation au niveau de la mise en scène d'une grande pureté esthétique. Cette fable populaire poétique a le courage de défier l'injustice, la domination de certains individus qui abusent de leurs pouvoirs. Cette œuvre humaniste nous permet de faire grandir nos idées et nous conforte dans notre Humanité gardons espoir d'un jour meilleur et avançons ensemble dans ce monde pour le rendre plus solidaire. Merci pour ce chef d'oeuvre. A voir absolument.
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 10 avril 2020
     « II.1. Le maître dit :  celui qui fonde son gouvernement sur la vertu peut se comparer à l’étoile Polaire qui demeure immobile, cependant que les autres étoiles tournent autour d’elle. » Confucius – Les entretiens.

    Cette « étoile Polaire » pourrait bien correspondre à l’image du gouverneur de province exilé en préambule de « L’intendant Sansho » pour avoir pris le parti des paysans contre l’autorité du pouvoir institué tant ce bref portrait irriguera l’ensemble du film et marquera les esprits du spectateur à jamais.
    L’ouverture est poignante, le gouverneur sanctionné pour ses excès de bonté est contraint à l’exil, il laisse sur place sa femme Tamaki, son fils Zushio et sa fille Anju. Avant son départ, il prodigue un ultime enseignement à son fils : « sans compassion, un homme n’est plus humain ».
    Sur le chemin de son exil, une masse constitué des opprimés vient rendre un dernier hommage à son héros. Trait de la cruauté Mizoguchienne, cette masse est rapidement domptée par les serviteurs de l’autorité en présence. Trait également de l’adhésion du réalisateur au marxisme, une certaine représentation de la lutte des classes est discrètement perceptible.
    De ce bref portrait émerge la figure du sage confucéen. Un idéal de compassion et de bonté que Mizoguchi confrontera durant tout son film à l’atrocité du réel. Comme parfois au cinéma japonais, la figure paternelle s’éclipse vite, et ne sera plus que parole, puis souvenir pour ceux qui restent au cœur de l’intrigue. C’est par ce postulat que débute cette histoire inspirée des contes populaires. Nous sommes au 16e siècle…

    À leur tour, femme et enfants doivent prendre la route vers le village natal de la mère. En chemin, la mère déclame : « il faudra marcher sur les traces du père ».
    À partir de ce périple initiatique, une question se pose. À l’instar du père, sauront-ils conserver une vie de rectitude ?
    Les premiers éléments de réponse nous parviennent rapidement, car le périple sera écourté. La contrée est infestée d’esclavagistes dont les rafles sont soudaines et brutales. Nos voyageurs accordent leur confiance à une prêtresse qui propose de les héberger. Cette dernière aura sitôt fait de se corrompre en dénonçant ces proies faciles aux esclavagistes. La situation apporte une première déconstruction dans le film. En effet, un représentant de la religion est l’instigateur d’une trahison. En ce monde où l’institution religieuse vacille, la foi véritable ne peut qu’en pâtir. Cela amène à une séquence de désespoir, celle de la séparation. Un plan attire particulièrement mon attention : la mère est emmenée en pirogue par la force de ceux ont fait de l’humain un commerce pendant que les enfants accourent vers elle sur le rivage. Avec l’éloignement progressif de la mère, ce plan utilise habilement la profondeur de champ dans le but de renforcer la dramaturgie de la scène. En élément sonore, les notes d’une flûte se font entendre. Par la force des chose, la mère deviendra courtisane sur une île lointaine, et ses enfants seront vendus comme esclaves.

    Après plusieurs transactions infructueuses, les enfants sont placés sous le joug de l’intendant Sansho. Prêtant son nom au titre du film, ce personnage fait office d’antagoniste moral à la figure du père évoquée précédemment. Ce gestionnaire d’un grand domaine, aussi tyrannique soit-il, deviendra un père de substitution pour Anju et particulièrement Zushio. Cependant, l’intendant Sancho a lui aussi un fils nommé Taro dont la sensibilité s’oppose à celle de son père biologique. À l’instant où Sansho confie à Taro la tâche de molester une esclave « indisciplinée », le fils renie cette petite intronisation à la passation de pouvoir. Cet épisode marque la fin de la première partie du film.

    Après un bon de dix années dans le temps, l’intrigue reprend sur un plan similaire. Sous les ordres de l’intendant, un fils moleste un esclave fuyard. Cependant, ce fils n’est pas Taro. Il s’agit de Zushio. À ce moment, un basculement à lieu. Les deux fils évoqués se détournent de la voie des pères biologiques. Les années de labeur et de souffrance ont rendu Zushio opportuniste auprès de l’intendant Sansho. À l’inverse, le quotidien de Taro s’est, par l’intermédiaire des restitutions de Zushio et Anju, imprégné de la philosophie du gouverneur exilé. Écœuré par un monde désœuvré, Taro s’est retiré au sein d’un sanctuaire bouddhiste, nous l’apprendrons plus tard. Cette conversion renforce le pouvoir de l’éloquence d’un discours juste sur un être prédisposé. Toutefois, il demeure d’autres pouvoirs, la tyrannie en est un exemple. Elle est soulignée par les actes de l’intendant Sansho et de ses sbires. Une seconde déconstruction s’opère, la gestion tyrannique est célébrée par les plus hautes instances du pouvoir féodal. Lors d’une fastueuse réception, un dignitaire vante les mérites d’un intendant craint et respecté de tous. Au cœur de ce pouvoir vertical, Zushio tient son rang. Le petit garçon pétri d’illusions est désormais un adulte inspirant la peur et le mépris de ses homologues esclaves. Anju semble quant à elle avoir conservé les préceptes de son père.
    Mais quelques temps après, une nouvelle bascule a lieu. Anju en est l’instigatrice.

    Lors d’un enterrement prématuré auquel Anju et Zushio doivent apporter une malheureuse contribution, ces derniers se retrouvent seuls dans les bois avoisinant le domaine. Au cours d’un instant fugace a lieu une réminiscence que seul le 7e art peut offrir : la parfaite union de l’image et du son. En saisissant quelques branchages, Anju et Zushio se remémorent les mots de la mère. Au loin, le chant triste de la mère se fait entendre.
    Il aura suffit de cet instant pour que le cruel jeune homme redevienne l’enfant idéaliste. À partir de ce moment, rien ne sera plus comme avant. Anju aidera son frère à fuir sa condition, elle acceptera un sort funèbre avec stoïcisme, car son nom d’esclave désigne celle qui endure tout. En silence, elle disparaîtra dans l’abîme…
    Cinéaste de la beauté, Mizoguchi atteint la plénitude avec le plan de la mort d’Anju.

    Au cours de sa fuite, Zushio rencontre Taro. Ce dernier contribue à son hébergement et à sa protection chez les moines bouddhistes. Cette aide bienvenue répond directement à la trahison de la prêtresse. Chez Mizoguchi, le mal ne réside pas en le pouvoir ou en la religion, mais en ceux qui en font l’apanage. La destruction par une arme dépend avant du choix de celui qui l’utilise. Le film nous donne à voir deux oppositions caractéristiques : le père contre l’intendant Sansho pour le pouvoir ; la prêtresse contre les moines bouddhistes pour la religion.

    Souhaitant racheter ses fautes, Zushio se rend à Kyoto dans le but de rencontrer les plus hauts représentants du pouvoir. Grâce à son héritage physique (une statue de la déesse de la miséricorde) et moral, Zushio prendra le poste vacant de son père décédé. Un hommage est rendu sur la tombe du père, et la transmission qui a avorté entre Sansho et Taro a bien lieu entre l’ancien gouverneur exilé et son, fils Zushio nommé gouverneur à son tour.
    Par la suite, Zushio se dévoile comme le digne héritier de son père. Il affranchit les esclaves, puis contraint Sansho à l’exil. Mais outrepassant ses droits, il rejette son pouvoir avant que le couperet d’une législation punitive ne s’abatte sur lui.

    L’épilogue du film est le point culminant émotionnel. Zushio part à la recherche de sa mère d’après quelques indications hasardeuses. Sur place, la mère est bien présente. Elle n’a pas encore atteint l’âge de 50 ans, mais elle est déjà une vieillarde rendue aveugle par la compilation des années d’humiliation et les larmes incessante qui inondent chacune de ses complaintes pour ses enfants disparus. La même statue qui permit à Zushio de se faire reconnaître comme le fils de son illustre père permet ici à la mère de reconnaître son fils, malgré la cécité.L’air de flûte qui marquait la séparation du rivage accompagne désormais la réunion des êtres. Symboliquement, nous sommes également aux abords d’un rivage.
    Au dernier plan, une mère enlace un fils retrouvé, la caméra exécute un mouvement vers la gauche. Au loin, nous apercevons le labeur d’un paysan, un témoin inépuisable de l’ordre cyclique du monde. Zushio aura brillé par ses exploits politiques et humanistes, mais fondamentalement, rien n’aura changé pour la masse des opprimés.
    L’intendant Sansho est le joyaux au cœur d’une œuvre Mizoguchienne bien garnie.
    Frédéric P
    Frédéric P

    15 abonnés 185 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 16 août 2019
    Film magnifique. Dès le premier cadre on comprend qu'on est en présence d'un des réalisateurs majeurs. Tout au long des plus de deux heures de film chaque angle, cadre, profondeur de champ est sérieusement étudié.
    La trame : un gouverneur qui s'est rangé du côté des paysans en désobéissant à son supérieur est exilé et sa famille tombe dans un piège en essayant de fuir et se retrouve réduite en esclavage. Mais le père a réussi avant leur séparation à inculquer des valeurs morales de bienveillance envers les autres à ses enfants.
    Le sujet : splendeur et misère du refus de l'obéissance. Quelle compromissions faut-il accepter à court terme pour faire triompher ses idées à long terme ?
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 7 juillet 2019
    Chef d'oeuvre absolu.
    http://legoutducinema.blogspot.com/2015/05/lintendant-sansho-sansho-dayu-de-k.html
     Kurosawa
    Kurosawa

    591 abonnés 1 509 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 9 novembre 2016
    Fable politique et humaniste, "L'Intendant Sansho" est un film déchirant, l'un des plus beaux du monde. Et pourtant, un grand nombre de cinéastes seraient tombés dans le misérabilisme et la cruauté complaisante devant une telle histoire, dont le tragique est annoncé d'emblée, comme pour signaler au spectateur que l'humour n'aura pas sa place lors des deux heures qui vont suivre et que l'issue risque d'être terrible. Mais si "L'Intendant Sansho" est aussi immense, c'est parce que le regard que porte Mizoguchi sur ses personnages est noble et respectueux et parce que le cinéaste leur accorde toujours cette liberté d'espérer et de croire en leurs valeurs, celles d'un père exilé qui aura inculqué à son fils la morale suivante : "Sois dur avec toi même, généreux envers autrui". Ces mots, Zushio et sa sœur Anju ne les oublieront jamais, même si une fois esclaves, l'impitoyable Sansho tentera de les déshumaniser. Le film adopte essentiellement le point de vue des enfants afin de nourrir le hors-champ, qui dit l'incertitude qu'ils ont d'échapper à leur condition et de rejoindre une mère peut-être déjà morte. C'est ce combat-là que le film raconte, de même qu'il affirme sans cesse la nécessité de rester digne et de sauvegarder la morale devant les ignominies politiques (entre le ministre et Sansho); il dit tout cela à travers une mise en scène aérienne qui fait valoir sa pleine maîtrise du montage parallèle et une affolante légèreté des mouvements de caméra. Rageur, insoumis et toujours luttant contre la fatalité, "L'Intendant Sansho" est un moment de cinéma époustouflant, qui échappe au simplisme pour se mettre à la hauteur de la complexité des enjeux politiques et moraux; il nous met enfin dans deux états contradictoires : en effet, on reste inconsolable devant cette histoire d'une tristesse infinie, au bord des larmes et la gorge serrée, et en même temps heureux d'avoir vu un film d'une telle ampleur.
    julien_beauchesne
    julien_beauchesne

    10 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 1 septembre 2015
    Histoire simple magnifiquement traitee. Chaque plan, chaque phrase sont des bijoux. Chef d oeuvre !
    Mephiless s.
    Mephiless s.

    63 abonnés 697 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 10 août 2015
    Kenji Mizoguchi signe une oeuvre sublime avec une histoire tragique et intéressante. Beaucoup de choses sont critiquées, comme la condition des femmes, l'esclavage, la violence etc. La photographie et la réalisation sont soignées, et le noir et blanc renforce encore plus le propos. Les acteurs sont d'ailleurs excellents et les 30 dernières minutes du film sont déchirantes. Inoubliable!
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 14 novembre 2014
    Ce film est un chef d’œuvre absolu. Kenji Mizoguchi est un immense cinéaste dont un des mérites, et pas des moindres, est d'avoir sans relâche dénoncé la condition des femmes. Injustice, violence, pouvoir…Il y a beaucoup d'humanité chez ce cinéaste, et ce film est l'un des plus bouleversants qui nous soit parvenu. Et d'une beauté formelle incroyable.
    real-disciple
    real-disciple

    85 abonnés 1 024 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 5 décembre 2012
    Ce film est un vrai chef d'oeuvre du cinéma japonais et mondial. Le film touche au sublime dans sa mise en scène et cette histoire déchirante digne des plus beaux romans est un vrai bijou dramatique. On sent que Mizogushi ne laisse aucun plan au hasard, dans ce film tous les plans sont travaillés, de même que la direction d'acteurs et la reconstitution d'époque. On ne peut que se taire et admirer.
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 21 octobre 2011
    La beauté des plans, la musique filmée comme le cri du coeur, une dialectique interessante sur le monde et un scénario très bien écris, que demander de plus ?
    Trelkovsky
    Trelkovsky

    73 abonnés 264 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 15 août 2011
    Si « Les amants crucifiés » paraissaient comme assez lourds, ce Mizoguchi subjugue par son incroyable justesse : autant dans ce qu'il a de tragique et romanesque que dans ce qu'il a de plus métaphysique et mystique. Mais c'est surtout une œuvre de pure poésie, construite essentiellement sur les sentiments de ses protagonistes et offrant des moments absolument sidérants de beauté (ah, le chant cette voix intérieure semblant surgir du lointain, ou encore le suicide de Anju …). Grandiose tableau épique et intimiste, magnifique médiation sur la conservation de ses valeurs éthiques et humanistes, « L'intendant Sansho » est un chef-d'œuvre.
    Kenji Mizoguchi, par une esthétique d'un éclat hallucinant, transcende l'aventure intérieure de ses personnages en une quête universelle profondément spirituelle, évoquant l'œuvre de Tarkovski (lequel était un grand admirateur du cinéaste japonais). Tout simplement l'un des plus beaux films de tous les temps.
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